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Les membres du Conseil sont à l'abri des conflits d'intérêts

La loi 131 ne porterait pas atteinte à la charte de l'Université, selon un avis juridique.

Un membre du conseil d'administration de l'Université, nommé à ce poste par l'Assemblée universitaire en sa qualité de professeur, peut-il voter sur des questions présentant un intérêt pour l'ensemble du corps professoral? Est-il alors en situation de conflit d'intérêts?

On se souvient que la question s'est posée avec acuité en décembre dernier alors que le Conseil devait statuer sur l'utilisation du surplus actuariel du Régime de retraite. Un avis juridique demandé par le Conseil concluait que les professeurs membres étaient en "conflit d'intérêts potentiel ou apparent" et leur recommandait de ne pas participer au vote, ce qu'ils ont fait.

Au même moment entrait en vigueur la loi 131, obligeant les organismes publics et parapublics à se doter d'un code de déontologie visant à éviter que les administrateurs ne se retrouvent en situation de conflit d'intérêts. L'enjeu était de taille puisque, si l'avis juridique s'avérait fondé, cela risquait de compromettre la participation des professeurs et des étudiants aux décisions prises par le Conseil. Le contexte préoccupait suffisamment l'Assemblée universitaire pour qu'elle forme un comité mixte avec le Conseil afin d'étudier les incidences de cette loi sur la gestion de l'Université.

Le 4 mai dernier, ce comité présentait son rapport à l'Assemblée universitaire. Selon son analyse, la charte de l'Université de Montréal, adoptée par le Conseil des ministres en 1967, consacre le principe de la participation des professeurs à l'administration de l'Université.

Ce principe est notamment exprimé dans le préambule de la charte, qui stipule que l'Université "désire faire participer à son administration ses professeurs, ses étudiants et ses diplômés". Depuis, le principe a été appliqué en pratique à l'ensemble des groupes constituant la communauté universitaire.

"Toute la charte de l'Université s'articule autour de ce principe et lui donne forme, soutient le syndicaliste Fernand Daoust, membre du Conseil et président du comité mixte. Cette volonté de faire participer les professeurs à la gestion va jusqu'à leur donner le pouvoir, par le biais de l'Assemblée universitaire, de participer de façon majoritaire à l'adoption des règles qui concernent leur propre statut."

 

Intérêt collectif

Pour faire valoir que ce principe, entériné par le gouvernement lui-même, ne place pas les professeurs en conflit d'intérêts, le comité établit une distinction entre "intérêt personnel distinct" et "intérêt collectif". Une situation présentant pour un professeur un intérêt personnel distinct - comme un vote sur une promotion le concernant ou l'attribution d'un contrat à une entreprise à laquelle il est lié - placerait bel et bien ce professeur en conflit d'intérêts selon le sens que lui donne le droit commun.

Toutefois, une situation où un intérêt collectif est en jeu - comme le vote sur le surplus actuariel ou la nomination d'un recteur - revêt un caractère non distinct et ne peut être considérée comme plaçant les représentants élus ou désignés en situation de conflit d'intérêts. "Telle est la situation lorsqu'un membre du Conseil participe à une décision où, à l'instar de ses collègues professeurs, il a un intérêt dans la question débattue telle l'adoption du budget", écrit le comité.

La même logique peut prévaloir chez les étudiants pour toute question relative aux règlements pédagogiques.

Cette opinion est soutenue par un avis juridique commandé par le Syndicat général des professeurs de l'UdeM (SGPUM) auprès du contentieux de la Fédération québécoise des professeurs d'université. "Exclure les professeurs au moment des délibérations et du vote sur des matières qui les concernent de façon collective au même titre que l'ensemble des professeurs irait à l'encontre des prescriptions de la charte" de l'Université, conclut cet avis.

En plus d'établir cette distinction, l'avis souligne que l'Université Laval et l'Université du Québec ont des dispositions analogues dans leur charte.

Le président du SGPUM, André Tremblay, a de plus indiqué à l'Assemblée universitaire que le Conseil disposait déjà d'un avis en ce sens au moment de la polémique entourant le vote sur le surplus du Régime de retraite. Un document émanant du Bureau des affaires juridiques de l'UdeM, daté de janvier 1996, mentionne en effet que "les membres du Conseil qui sont nommés par l'Assemblée universitaire ont le droit de voter sur toute question, au même titre que tout autre membre du Conseil". Cela s'applique aux membres professeurs.

Le comité mixte propose donc à l'Assemblée universitaire et au Conseil de n'exclure, dans le code de déontologie exigé par la loi 131, que le conflit d'intérêts personnel distinct afin que soit sauvegardé le principe de la participation des membres de la communauté universitaire à l'administration de l'Université.

"On fait le pari que la charte est respectée, mais le vrai test demeure celui de la Cour supérieure et de la Cour suprême", a toutefois souligné Pierre-Paul Côté, professeur à la Faculté de droit et membre du Conseil.

Daniel Baril



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