Les Boys
L'équipe de hockey des employés de l'Université
a du muscle et du coeur.
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Quatorze des 20 membres de l'équipe
Les Boys. Au premier plan: Pierre Moreau, Yan Burrelle, Patrice
Bélanger et Claude Gauvreau; derrière eux: Gilles
de Gagné et Chantal Daigle; près de la bande: Joseph
Zayed, Marc Bélanger, Arthur Long, Richard Alix, Jean-Marc
Lavoie et Daniel Laflamme; au dernier rang: Guy Labelle et Mathieu-Robert
Sauvé. |
Chaque mercredi matin, une vingtaine d'employés,
de techniciens, de professeurs et d'étudiants de l'Université
se retrouvent au stade d'hiver du CEPSUM pour jouer au hockey.
L'amour pour notre sport national les pousse à se lever
à l'aube. Mais derrière cette effervescence se
cache une autre motivation: le besoin de se retrouver entre gars.
"Les Boys", c'est ainsi qu'ils se
surnomment, ont créé une tradition au Service des
sports, qui leur laisse utiliser la patinoire de septembre à
mai. Signe des temps, l'équipe compte aussi une femme:
Chantal Daigle, chargée de cours au Département
de kinésiologie. Preuve que les mâles ne sont pas
tous des machos!
7 h 10: Guy Labelle, surintendant à
la Direction des immeubles, prêche par l'exemple. Ce grand
gaillard, bâti comme une armoire à glace, qui a
fêté récemment ses 50 ans, est le premier
arrivé sur la patinoire. "On joue pendant une heure
et après on patine pour arriver à temps au boulot",
lance-t-il. Mais l'activité est très appréciée
des joueurs, qui ne perçoivent pas de façon négative
cet horaire matinal.
"C'est bien meilleur le matin!"
commente à la blague l'un des membres de l'équipe.
Et un autre d'enchaîner: "En tout cas, à cette
heure-là, on ne risque pas d'être coincé
sur le pont Mercier." Trêve de plaisanterie: pourquoi
jouer avant plutôt qu'après le travail? "C'est
le seul moment où la patinoire n'est pas réservée
par les étudiants", répond Michel Valois,
coordonnateur de l'équipe. Autre raison plus philosophique:
"Ça commence bien la journée", déclare
Patrice Bélanger, étudiant au doctorat en physiologie.
Il n'y a pas que son coup de patin qui a épaté
Forum.
L'important, ce n'est pas de gagner
7 h 15: tous les hockeyeurs sont sur la glace. On en profite
pour équilibrer la force des équipes. Aujourd'hui,
il n'y a que 13 joueurs présents. Tant pis, on commence.
L'arbitre, Gilles de Gagné, fait la mise au jeu initiale.
Déjà, l'enthousiasme est palpable. Et le calibre
des joueurs est surprenant. Forum a même été
étonné par la précision des passes et l'assurance
dans l'exécution des jeux.
L'équipe est formée essentiellement
d'employés de l'Université, mais il y a aussi quelques
étudiants, signale Michel Valois. Une organisation souple
et bien huilée, qui impose néanmoins une règle:
"Pas de contact, ni de lancer frappé. Notre but est
de s'amuser!" fait valoir le coordonnateur. Mais ce n'est
pas parce que l'agressivité est bannie que le jeu est
moins captivant. Les joueurs ne figurent pas parmi les étoiles
de la Ligue nationale de hockey, mais tous y mettent du coeur.
Dans cette bande-là, il n'y a pas de petits rendements
pour de gros salaires!
"Go! Go! Go!" crient les deux seuls
partisans présents devant une montée de jeu spectaculaire.
Et vlan, la rondelle file droit dans la cage. Le premier but
est compté à la seizième minute de la partie
par Arthur Long, responsable du laboratoire de physiologie de
l'exercice.
Quel match!
Le jeu se poursuit sans répit. Seule une punition permet
aux joueurs de se reposer un peu. C'est alors que l'arbitre siffle
et dit: "Numéro 3, une minute pour avoir retenu."
Patrice Bélanger se dirige vers le banc des punitions.
"Je n'ai pas fait exprès", affirme l'étudiant.
"C'est un joueur de haut niveau", mentionnera plus
tard un de ses coéquipiers en parlant du jeune homme.
L'arbitre n'a pas la tâche facile. "Il
ne voit rien", dit en plaisantant Jean-Marc Lavoie, professeur
au Département de kinésiologie. Gilles de Gagné
sait que ses décisions sont contestables, mais il préfère
en rire. Le technicien de laboratoire à la Faculté
de pharmacie a même suivi une formation à la Ville
de Montréal pour obtenir son accréditation. Sous
l'oeil vigilant de cet arbitre, dit-on plus sérieusement,
peu de fautes demeurent impunies.
Pour sa part, Michel Valois veille comme un
bon père de famille, depuis six ans, à tout ce
qui se rapporte à la logistique. "Je m'occupe entre
autres de réserver la patinoire et de convoquer, en début
de saison, les joueurs", note le responsable du service
à la clientèle à la Direction des infrastructures
technologiques d'enseignement et de recherche (DITER).
Avant lui, c'est Guy Labelle qui a assumé
ces tâches pendant 20 ans. Des anecdotes, il peut en conter
plusieurs. Comme celle qui met en scène Mathieu-Robert
Sauvé: trop pressé de jouer, il a sauté
sur la glace avec ses protège-lames! "Pire encore,
j'ai déjà lancé la rondelle dans les filets
de mon équipe!" déclare de son propre aveu
le journaliste de Forum, surnommé "The Rocket"
parce qu'il se donne à fond comme le faisait le célèbre
Maurice Richard.
Fidèle à son surnom, ce dernier
marquera le deuxième but des Bleus. L'équipe adverse
n'avait cependant pas dit son dernier mot. Presque aussitôt,
un beau jeu de Jean-Marc Lavoie permet à Daniel Laflamme,
messager et chauffeur à la Direction des immeubles, de
compter le premier but des Oranges. La nouvelle recrue répétera
l'exploit à une minute de la fin du second tiers-temps.
Le score: deux à deux.
L'âge varie entre 25 et 50 ans
7 h 55: les joueurs donnent le meilleur d'eux-mêmes. Visiblement,
ils ne manquent pas d'entraînement physique. Même
les plus âgés sont déchaînés.
Le doyen de l'équipe: Claude Gauvreau. À 50 ans,
l'électrotechnicien de la DITER n'est plus de la première
jeunesse, mais la carcasse et le moteur sont encore performants.
C'est un solide défenseur. Tout comme son coéquipier
Joseph Zayed.
Mais comment un Égyptien d'origine
en vient-il à aimer le hockey? "Lorsque je suis arrivé
au Québec à l'âge de 13 ans, tous les p'tits
gars du coin jouaient au hockey... Ils m'y ont initié!"
Le professeur au Département de médecine du travail
et d'hygiène du milieu est membre de l'équipe depuis
1978. "J'ai assisté au mariage de plusieurs gars,
à quelques divorces ainsi qu'à maintes chicanes
et réconciliations." Joseph Zayed a un style peu
commun: il est étonnamment habile à diriger la
rondelle avec le patin. Les matchs de soccer ont eu du bon...
Les styles créatif et offensif sont
aussi présents. En tout cas, ce matin-là Arthur
Long était intenable. Malgré les habiletés
de Pierre Moreau, professeur à la Faculté de pharmacie
et gardien de but, le dynamique père de jumeaux âgés
de deux ans marque un autre point. Quelques minutes plus tard,
quand les Oranges lèvent un peu la garde derrière
le filet, il récidive avec un tour du chapeau.
La tension est forte chez les Oranges. Mais
le hockey, c'est comme beaucoup de choses: le meilleur arrive
à la fin! Richard Alix accepte une passe dans sa propre
zone et traverse la patinoire de bout en bout. Déjouant
des adversaires médusés, l'agent de gestion financière
à la Direction des immeubles donne un précieux
point aux siens.
Le temps passe, les joueurs sont un peu fourbus.
Et les Oranges, de plus en plus hargneux; ils butent sans cesse
sur la superbe défense des Bleus. Inlassables, les Oranges
réussissent néanmoins à enfiler leur quatrième
but à 10 minutes de la fin de la rencontre. Mais les Bleus
interviennent rapidement. Ils gagnent de justesse en portant
le score final à 5-4.
Les joueurs ont donné leur 110%. Le
moins qu'on puisse dire, c'est que Forum a assisté
à un excellent match comme il s'en diffuse rarement à
la Soirée du hockey. Les hockeyeurs se serrent
la main. Et hop, à la douche! C'est maintenant le temps
d'attaquer la journée de travail.
Dominique Nancy
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