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Création d'une chaire de recherche
en salubrité des viandes

Trois partenaires s'associent à la Faculté de médecine vétérinaire pour créer la première chaire du genre en Amérique du Nord.

La contamination de la viande n'est pas un phénomène nouveau, dit le Dr Sylvain Quessy, mais que les gens se rassurent, il y en a de moins en moins.

Au Québec, la production de porcs s'élève annuellement à plus de six millions de têtes, une augmentation d'environ 25% depuis 1996. La chair de volaille (poulet et dinde) représente quant à elle 35% de notre consommation de viande, soit 26 kilos par année par habitant. Une certaine proportion de cette viande risque de contenir des bactéries et des résidus nocifs pour la santé.

Inaugurée le 8 décembre dernier, la Chaire de recherche en salubrité des viandes de la Faculté de médecine vétérinaire, à Saint-Hyacinthe, vise l'élaboration de moyens de contrôle des sources potentielles de contamination dans les productions porcine et avicole. "La mission de la Chaire est de mettre au point et d'optimiser de nouvelles approches pour aider l'industrie de la viande à améliorer la salubrité du produit", a déclaré en entrevue à Forum le Dr Sylvain Quessy, titulaire de la Chaire. Dans cette perspective, la Fédération des producteurs de porcs du Québec, la société F. Ménard et Les consultants Vetco, associés à la Faculté de médecine vétérinaire, y investiront plus de deux millions de dollars au cours des prochaines années.

"Pour notre établissement, la création d'une telle chaire constitue la pierre angulaire du développement de la recherche dans le domaine de la salubrité des viandes", déclare le Dr Raymond S. Roy, doyen de la Faculté de médecine vétérinaire. Satisfait des efforts déployés par l'industrie agroalimentaire et les différents organismes de recherche et de développement, le Dr Quessy rapporte pour sa part que l'importance et l'ampleur du travail à accomplir nécessiteront néanmoins d'autres subventions.

De la ferme à la table
Selon le modèle d'analyse des dangers et de contrôle des points critiques, plus connu sous l'appellation HACCP (Hazard Analysis and Critical Control Point), un contrôle efficace n'est possible que dans la mesure où toutes les étapes de la production sont surveillées. "Pour soutenir l'application de ces nouvelles normes dans la gestion des dangers, signale le Dr Quessy, il faut mettre en place des mesures de prévention 'de la ferme à la table'."

Peu de gens connaissent toutes les étapes qui précèdent la cuisson d'un jambon. Vingt jours après sa naissance, le cochonnet est transféré de la maternité à la pouponnière. Il y restera, en compagnie d'autres cochons, jusqu'à ce qu'il pèse 25 kilos. Puis, il sera amené dans un grand bâtiment avec des parcs. Dans cette unité d'engraissement, il séjournera pendant quatre mois environ. C'est le temps qu'il faut pour qu'un porc atteigne le poids requis pour le marché, soit 80 kilos. Il est alors abattu et sa viande est aussitôt inspectée par des agents de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. La carcasse est ensuite rapidement entreposée dans un réfrigérateur.

Cette étape constitue un des éléments critiques dans le processus d'innocuité. Le froid empêche la prolifération des bactéries et augmente le temps de conservation de la viande, dit le Dr Quessy. Mais ces efforts sanitaires garantissent-ils que la viande est exempte de contaminants? "Non, répond le spécialiste. D'autres mesures de contrôle, comme la surveillance du temps d'arrêt d'utilisation des médicaments avant l'abattage, doivent être appliquées. Le modèle HACCP tient compte de cette période de retrait des antibiotiques. À l'heure actuelle, une très faible proportion de résidus de médicaments risque de se retrouver dans la viande animale. Grâce au modèle HACCP, nous pouvons même réduire ce risque à zéro", soutient le Dr Quessy, chercheur renommé dans le domaine de la salubrité des aliments.

Médication et productivité
D'après lui, la médication, sous forme d'injections ou dans la moulée, est inévitable pour prévenir la propagation de maladies chez les animaux. Certains contestent néanmoins l'utilisation d'antibiotiques comme promoteurs de croissance. Ils craignent que l'animal développe une résistance aux antibiotiques et la transmette aux humains. "Rien n'a encore été démontré concernant l'utilisation thérapeutique de médicaments, indique le Dr Quessy. Les études sur l'emploi de la médication pour des besoins de productivité sont quant à elles contradictoires. Mais qu'on se rassure, ajoute-t-il, la proportion de la résistance chez l'homme, attribuable à l'utilisation d'antibiotiques chez les animaux, est dans le pire des cas de 25% à 30%."

Sur ce point, le titulaire n'est donc pas inquiet. Si des partenaires telle la Fédération des producteurs de porcs du Québec s'associent à la chaire de recherche, c'est parce qu'ils sont prêts à modifier leurs pratiques dans une perspective d'assurance qualité, croit-il. Ce dernier admet toutefois qu'il y a encore beaucoup de questions qui demeurent sans réponses. "Le rôle de la Chaire sera d'acquérir une expertise et d'assurer une formation continue en normes HACCP."

Dominique Nancy


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