FORUM - 17 AVRIL 2000La liberté au rythme des percussionsDanse Université de Montréal présente son spectacle de fin d'année.
À sa deuxième saison, Danse Université de Montréal (DUM), une troupe exclusivement féminine, propose une création chorégraphique et musicale. Basé sur une musique de percussion originale, Un espoir de liberté est l'oeuvre de Patrick Lamothe, un jeune chorégraphe montréalais que le milieu classe déjà comme un incontournable de la danse québécoise. L'hebdomadaire Mirror l'a inclus dans ses "Noise Makers 2000", une sélection des artistes à suivre. Découlant d'une année 1999 où il aura été de toutes les scènes tant comme chorégraphe que comme interprète, cette reconnaissance a culminé avec les éloges critiques de sa chorégraphie Thrash. Présentée en décembre chez Tangente, cette oeuvre lui avait permis d'obtenir une bourse du Conseil des arts du Canada. Diplômé en 1995 du cégep de Drummondville en danse, Patrick Lamothe a côtoyé les plus grands: Jean-Pierre Perrault, Pierre-Paul Savoie et, surtout, Harold Rhéaume, son mentor et sa source d'inspiration, dont il a dansé, l'an dernier, Les dix commandements à la Place des arts. À l'Université de Montréal depuis septembre, Patrick Lamothe a rapidement fait de la liberté le mot clé de sa chorégraphie. Il a constaté que les membres de DUM étaient enfermées dans un carcan intellectuel. "Elles ne réussissaient pas à oublier leurs cours et à se laisser aller. Avec les répétitions, nous sommes arrivés à quelque chose de fragile et de vulnérable." Un espoir de liberté est basé sur la vulnérabilité, l'ouverture, le désir d'embrasser le ciel. Cette ouverture, récurrente dans ses oeuvres, se traduit par des gestes vers le haut dans un espace qui se veut sans limites.
Liberté dans une "boîte de carton" La minuscule salle du CEPSUM, la "boîte de carton", où la DUM répétait une fois par semaine, a également été source d'inspiration. Le chorégraphe s'en est servi pour forcer les interprètes à puiser l'énergie au fond d'elles-mêmes. "Dans ce petit espace, elles ont appris à danser proche les unes des autres", conclut-il. Résultat: elles réussissent à habiter leur corps avant d'habiter la scène, faisant dire au chorégraphe qu'elles sont des "peintures humaines", telles ces toiles où tout est condensé, couches, textures et couleurs. Loin de travailler sur quelque chose de fixe, Patrick Lamothe prétend trouver la liberté dans ce qu'il appelle l'"improvisation structurée", où il demande à ses interprètes d'exécuter des mouvements en apportant des gestes personnels. Il apprécie également les "accidents" que provoquent, par leurs erreurs, les danseurs peu expérimentés. "J'aime le non-académique, trouver de nouveaux mouvements, de nouvelles façons de tenir un bras. Les danseurs professionnels sont prompts au jugement: 'Dans le métier, on ne fait pas ça comme ça.' Ces jugements, les étudiantes ne les ont pas, et c'est ce que j'aime. Elles sont ouvertes, prêtes à essayer des choses. Pour un créateur, c'est agréable, tout reste possible." La création par les percussions C'est la troisième fois que Patrick Lamothe chorégraphie sur une création musicale, mais c'est la toute première qu'il ne s'en mêle pas. "J'ai donné carte blanche à Johanne", dit celui qui est habituellement très exigeant pour ce qui est de la musique. Avec Johanne Latreille, il ne sera pas déçu: elle ne se contente pas de composer une oeuvre, elle conçoit également ses instruments. Sa douzaine d'inventions reproduit des sons tirés du quotidien et des éléments naturels: son "océanophone" rappelle l'eau et son carillon fait de bouts de métal, l'air. La pièce musicale ne sera présentée à la troupe que quelques semaines avant la première d'Un espoir de liberté. Que ses interprètes doivent s'adapter à une musique nouvelle la veille du spectacle n'effraie pas Patrick Lamothe. Travaillant déjà avec des pièces différentes à chaque répétition, il y voit là un exercice très riche et rafraîchissant, d'autant plus que Johanne Latreille, accompagnée de Jean-François Côté, sera sur scène les soirs de représentation. "Il y aura des découvertes par rapport à l'instrument, sa sonorité, son rythme. Chez moi, il n'y a rien de coulé dans le béton." Liberté et constante évolution. Voilà ce que retiendra Patrick Lamothe de son année à la tête de Danse Université de Montréal, qu'il quitte pour se joindre à O Vertigo, une des troupes québécoises les plus en vue. Et avec Un espoir de liberté, il souhaite éveiller les sens des gens, les faire voyager, leur donner confiance en l'avenir et le goût de bouger. "Pas nécessairement de danser, mais de faire un mouvement." Jérôme Delgado Un espoir de liberté, par Danse Université de Montréal, une chorégraphie de Patrick Lamothe sur une musique originale de Johanne Latreille. Les vendredi 28 et samedi 29 avril à 19 h 30, au Centre d'essai. Info-DUM: (514) 343-6111, poste 4686. |