Michel Trahan |
"L'Université fonctionne sur le mode
de la relance, mais le Comité du budget demeure dans le
mode des compressions", a déclaré le vice-recteur
exécutif Michel Trahan devant l'Assemblée universitaire
réunie le 3 mai dernier en séance intensive avec
un ordre du jour bien chargé. Y figurait notamment le budget
de fonctionnement 1999-2000, considéré comme un
budget de transition.
Si l'Université a bien semé les graines de la relance, grâce notamment au fonds du même nom, pour augmenter ses revenus, la moisson, elle, ne viendra que dans 18 mois. C'est en effet le délai que s'accorde Québec pour rectifier sa subvention à la hausse ou à la baisse en fonction des fluctuations des clientèles étudiantes.
La frugalité demeurant donc de rigueur, la plupart des unités verront leur budget reconduit pour 1999-2000, à l'exception de certaines modifications, généralement mineures.
Digestion lente
Présentant le budget de fonctionnement pour l'année
budgétaire qui commence en juin, le vice-recteur exécutif
a tenu à faire certaines constatations concernant l'exercice
budgétaire qui se termine dans trois semaines.
"À la fin de l'exercice 1998-1999, l'"écart structurel" entre les revenus et les dépenses atteint 17,5M$ par année", a observé M. Trahan.
Certes, le budget Landry annonce la fin des compressions et la reprise en charge par le gouvernement des coûts dits "de système" (essentiellement l'indexation de certaines dépenses courantes et l'augmentation de la masse salariale due à la progression dans les échelles).
"Mais nous n'avons pas fini de digérer les effets des compressions cumulatives des dernières années et cette digestion se fait lentement", a-t-il ajouté. Quant au financement par Québec des départs volontaires à la retraite, il s'agissait selon lui d'une simple mesure d'équité puisque le gouvernement avait assumé les coûts de ces programmes dans les cégeps et les commissions scolaires. La somme ainsi versée, qui ne peut servir qu'à rabattre le déficit accumulé, permet tout au plus d'économiser 1,5M$ sur le service de la dette. D'ailleurs, le dernier quart de ce montant ne sera versé que sur présentation d'un plan de retour à l'équilibre budgétaire comprenant un début de résorption du déficit accumulé.
Imprévus
L'équilibre budgétaire demeure évidemment
toujours la cible à atteindre. Dans les projections établies
en septembre 1998, la direction de l'Université prévoyait
y parvenir en 1999-2000, soit avant que prenne fin le congé
de cotisation au Régime de retraite, en janvier 2001. Toutefois,
l'objectif ne pourra pas être atteint aussi rapidement,
et ce, principalement pour trois raisons.
Budget 1999-2000
Les paramètres du budget de
fonctionnement de 1999-2000 se présentent donc ainsi*:
Quant au Fonds de relance (dont les liquidités proviennent du congé de cotisation au Régime de retraite), il permettra d'injecter ponctuellement certaines sommes pour faire face à l'arrivée d'un nombre accru d'étudiants. Cet accroissement est estimé pour l'instant à 1575 étudiants équivalents temps complet (EETC) pour 1999-2000. Si ces futurs étudiants sont fidèles au rendez-vous - en clair, si les nouveaux admis s'inscrivent réellement à l'Université de Montréal -, les revenus de l'établissement devraient s'accroître de 9,4M$ en 2000-2001 et de 17,2M$ en 2001-2002.
L'investissement requis du Fonds de relance pour faire face aux coûts associés à ces variations de clientèles étudiantes est estimé à 4M$ pour 1999-2000. Le Fonds servira également, entre autres, au recrutement de professeurs (1M$), à la création de bourses à l'admission (1,2M$) et à la modernisation technologique (1,9M$).
Revenus
Pour les trois quarts (77%) de son budget de fonctionnement, l'Université
dépend de la subvention accordée par Québec.
Celle-ci devrait s'élever à 211 500 000$, en augmentation
de 3,4% par rapport à 1998-1999. Les droits de scolarité
devraient rapporter près de 48M$. Il s'agit là d'une
hausse anticipée de 8% par rapport à l'exercice
précédent. On l'attribue principalement à
la croissance de la clientèle (2,7M$) et aux frais de rédaction
(0,7M$). S'ajoutent à ces revenus l'apport du Fonds de
relance (4,3M$), les autres revenus (11,4M$) et le résultat
des activités autofinancées (24,6M$), pour un total
de 299,7M$. Mais comme les dépenses de fonctionnement devraient
s'élever à 282M$ et les activités autofinancées
accuser un léger manque à gagner, on prévoit
un déficit de fonctionnement de 4,6M$. Quant au déficit
accumulé, il devrait être de 60M$ à la fin
de l'exercice.
Retour à l'équilibre
L'équilibre budgétaire ne sera visiblement atteint
qu'en 2001-2002 et même 2002-2003, selon un budget pro
forma présenté par le directeur des finances
André Racette et prévoyant deux scénarios
possibles d'accroissement de la population étudiante. Tous
deux prévoient 1575 EETC de plus pour l'exercice financier
qui commence en juin. Cependant, dans le scénario optimiste,
l'Université atteindrait l'équilibre budgétaire
avec 4284 EETC de plus dès 2001-2002. Dans le second, elle
atteindrait son rythme de croisière ainsi que l'équilibre
budgétaire en 2002-2003 avec 2800 EETC supplémentaires.
Selon Jean McNeil, président du Comité du budget de l'Assemblée universitaire, un accroissement des effectifs étudiants de 4284 sur trois ans équivaudrait à retrouver un peu plus que les étudiants perdus depuis 1992-1993, pour une augmentation de 6% par année au cours des deux prochaines années. Si la population étudiante totale des universités du Québec reste stable durant cette période, une telle hausse équivaudrait pour l'Université de Montréal à une augmentation de 15,5% à 18,2% de sa part de marché.
Détecteur d'hélium
"Mais toutes les universités font des efforts pour
augmenter leur nombre d'étudiants, a constaté Yves
Lépine. Et l'ouverture d'antennes à Longueuil ou
ailleurs ne risque-t-elle pas tout simplement de se traduire par
un déplacement des clientèles?"
Sans nier cette possibilité, le recteur Robert Lacroix s'est montré optimiste étant donné la mise sur pied récente de programmes visant de nouvelles clientèles et le décontingentement de secteurs très courus. Ces derniers, qui n'admettaient qu'une fraction des candidats qui font une demande d'admission, devraient pouvoir accroître sans difficulté le nombre des inscrits.
"Comme nous sommes en baisse de clientèle depuis six ans, il n'est pas facile de faire des prévisions", a constaté le recteur. Il a précisé que les variations de clientèles étudiantes étaient maintenant suivies quasiment à la semaine par les membres de la direction et le registraire. De la sorte, si la cible semble ne pas devoir être atteinte, il est possible de réagir rapidement afin de diminuer les coûts.
Pour sa part, le vice-recteur Trahan a signalé que les prévisions d'accroissement des unités avaient été étudiées "avec un détecteur d'hélium" et validées par ailleurs avant d'être comptabilisées.
Françoise Lachance