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Reconstruire le Canada

Le ministre Ménard voit dans le jugement de la Cour suprême un appel à la raison.

Le récent jugement de la Cour suprême du Canada sur l'accession du Québec à la souveraineté incite-t-il les souverainistes à modifier leur discours à l'approche des élections québécoises? C'est ce que donnent à penser les propos du ministre de la Justice du Québec, Serge Ménard, qui répondait le 15 septembre dernier à une invitation des étudiants de la Faculté de droit.

«Nous ne voulons pas nous séparer, a-t-il affirmé en répondant à la question d'un étudiant. Je ne déteste ni le Canada ni les Canadiens. Ce que je n'aime pas, c'est la constitution actuelle, comme d'ailleurs bien d'autres Canadiens, qui ne la considèrent que comme un moindre mal. Ce que nous voulons, c'est sortir de cette constitution afin de reconstruire quelque chose de nouveau sur la base de la souveraineté des deux peuples fondateurs.»

La vision qu'il a de la chose lui semble parfaitement réalisable à l'intérieur des balises dressées par la Cour suprême. La notion de «question claire» amenée par le tribunal ne renvoie pas, selon le ministre, à une question dure telle «Êtes-vous pour la sécession?», mais signifie «qu'on peut, par une question claire, modifier la Constitution».

«La Cour suprême a ainsi ouvert une nouvelle voie pour changer la Constitution autrement que par le processus d'amendement prévu.» Cette nouvelle voie, c'est celle d'un «référendum enclenchant un processus de négociation».

Quant à la question de la «majorité claire», Serge Ménard est d'avis que, si la Cour avait cru qu'il fallait autre chose que 50% plus un, elle l'aurait dit. Ce qu'il faut comprendre, selon le ministre, c'est que la Cour suprême demande que le résultat soit clair, c'est-à-dire que le déroulement du vote n'ait pas été entravé par des circonstances exceptionnelles, comme un boycottage, une fraude ou d'autres incidents majeurs. L'expression doit donc être comprise «dans son sens qualitatif et non quantitatif».

Désamorcer la violence

Serge Ménard voit une autre vertu dans le jugement que plusieurs souverainistes ont décrié. «La Cour désamorce les sources potentielles de violence. En faisant de la souveraineté un objectif légitime, elle dit au Canada que la solution au problème n'est pas l'armée mais la négociation politique. Elle désarme ceux qui nous voient comme des traîtres. C'est d'ailleurs là le rôle des juristes: trouver des solutions pacifiques aux conflits», a-t-il mentionné en soulignant le travail d'Antonio Lamer dont il voit la marque dans cet aspect du jugement.

Le ministre est par ailleurs convaincu que le Canada ne pourrait pas refuser de négocier: «Le créancier est toujours mieux placé que le débiteur.» Le partenariat, le paiement de notre part de la dette canadienne, le maintien d'institutions communes, d'une monnaie commune et de valeurs communes qui nous distinguent des États-Unis feraient partie de cette offre qu'on ne peut pas refuser.

Autant de choses pouvant aussi constituer ce que certains appellent du fédéralisme renouvelé. Et la voie de l'amendement constitutionnel souhaité par le ministre de la Justice ressemble étrangement à un nouveau pacte confédéral, même si le mot n'a pas été prononcé.

Daniel Baril


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