André Caillé reçoit l'Ordre du mérite |
André Caillé, PDG d'Hydro-Québec, et la présidente de l'Association des diplômés, Johanne Rémillard. |
Quand le jeune André Caillé a grimpé, à pied, le chemin de la Côte-des-Neiges jusqu'à l'Université de Montréal, durant les années 1960, il s'est promis qu'il ne redescendrait pas cette côte avant d'avoir un diplôme. Quand il la descendit, en 1970, il avait en main un baccalauréat, une maîtrise et un doctorat en chimie.
Non, le PDG d'Hydro-Québec n'a pas étudié en administration ou en économie. Et quand il parle de ses études, il évoque bien sûr les années d'effort, mais il attribue ses succès à la chance. "J'ai eu la chance d'étudier jusqu'au doctorat, a-t-il déclaré à l'occasion d'une soirée en son honneur le 21 mai dernier. Et je l'ai fait à l'Université de Montréal, l'un des endroits dont les Québécois peuvent être le plus fiers."
"Il est l'une des meilleures nouvelles qu'ait connues Hydro-Québec depuis une décennie", dit de lui son collègue Michel Clair. Pour un autre, c'est "un excellent chef d'équipe qui propulsera Hydro parmi les leaders mondiaux". On vante ici son "enthousiasme contagieux", là sa simplicité, son sens de l'humour ou ses qualités de bon vivant.
Pour le comité chargé de désigner parmi quelque 200,000 diplômés de l'Université de Montréal celui ou celle qui allait être décoré de la prestigieuse médaille de l'Ordre du mérite (qu'ont déjà reçue notamment Daniel Johnson père, Robert Bourassa, Pierre Elliott Trudeau, Antonio Lamer et Pierre Péladeau), trois critères ont prévalu: la carrière exceptionnelle du lauréat, sa contribution à la communauté et son apport au rayonnement de l'Université de Montréal.
La présidente de l'Association des diplômés, Johanne Rémillard, a signalé que le choix du 31e lauréat s'est fait en octobre dernier, soit bien avant la désormais célèbre crise du verglas.
Pendant cette crise sans précédent, André Caillé s'est montré disponible et rassurant, et n'a jamais cherché à esquiver les questions difficiles. Vêtu de son col roulé institutionnel, il apparaissait en pleine possession de ses moyens aux informations télévisées, au côté de Lucien Bouchard. Les Québécois ont semblé apprécier le patron de leur entreprise nationale d'électricité.
"Je vous assure que le verglas, ce n'était pas mon idée, a lancé M. Caillé au grand plaisir de l'assistance. Durant ces 28 jours de crise, nous avons vécu des joies, des peines, des angoisses et surtout l'expression d'une belle solidarité."
Si André Caillé était alors révélé au grand public, le milieu des affaires connaissait déjà cette étoile montante, ancien sous-ministre de l'Environnement passé, en 1982, à Gaz métropolitain à titre de vice-président aux affaires publiques. Trois ans plus tard, il était devenu vice-président exécutif et chef des opérations, puis était nommé président et chef de la direction en 1987.
"Il a tellement eu d'impact chez Gaz métropolitain, commente André Bérard, président de la Banque nationale, qu'on devrait écrire 'made by Caillé' sous le logo de l'entreprise."
Pour Bernard Lemaire, fondateur de la papetière Cascades, il est cocasse de voir André Caillé à la tête d'une entreprise qui était, jusqu'à sa nomination en 1996, son plus important concurrent.
D'ailleurs, dans une vidéo réalisée par la Direction des infrastructures technologiques d'enseignement et de recherche de l'Université de Montréal, on diffusait un vieil extrait du Téléjournal où l'on annonçait que la nouvelle liste de prix de Gaz métropolitain rendait le chauffage au gaz plus économique que celui à l'électricité...
"Jusqu'à ce qu'on m'appelle, je menais une vie tranquille à Gaz métro, a ironisé M. Caillé. J'étais peinard, caché à l'est du pont Jacques-Cartier. Quelqu'un d'entre vous m'a dénoncé. On m'a offert la présidence d'Hydro-Québec."
Dans son témoignage, M. Caillé a voulu rendre hommage à son père, qui était analphabète mais qui avait du coeur. Il a aussi nommé des enseignants de la petite école qui lui ont donné le goût d'apprendre. "Deux choses sont essentielles dans la vie d'un homme, a-t-il dit: la connaissance et la santé."
Il a également mentionné que la jeunesse québécoise devait être mise en valeur. "Nous ne pouvons pas nous priver de nos jeunes, et les jeunes ne peuvent pas se priver de la connaissance."
Faisant écho à ces propos, le recteur sortant René Simard a dénoncé les compressions dans le monde de l'éducation qui, selon lui, compromettent la qualité des études universitaires. Cachant mal son amertume, il a appelé à la solidarité des quelque 200,000 diplômés de l'Université de Montréal.
Plus de 300 convives issus du milieu des affaires, du milieu universitaire et du milieu politique étaient réunis autour de M. Caillé. Ils en ont fait l'un des meilleurs succès des dernières années.
Mathieu-Robert Sauvé