Denis Plante a évalué le taux de satisfaction des chercheurs quant à la qualité de la salle de consultation de la Division des archives de l'Université. De ce côté, le nouveau directeur, Claude Minotto, peut être rassuré. |
Lorsque Mathieu-Robert Sauvé est allé consulter le fonds Louis-Hémon aux archives de l'Université de Montréal, il ne s'attendait pas à y trouver une nouvelle inédite du célèbre écrivain français. L'oeuvre de 10 pages a pour titre L'enquête, révèle le journaliste, et elle a été écrite entre 1906 et 1911. "À ma grande surprise, cette nouvelle, signée L. Hémon, a échappé à tous les chercheurs qui ont travaillé sur cet auteur."
Denis Plante, archiviste à la Division des archives de l'Université depuis 1972, n'est pas très étonné. "Les documents des fonds institutionnels et privés forment une banque d'information unique et précieuse", mentionne-t-il. C'est le cas de le dire! "La documentation est variée et répond à différents besoins", ajoute Denis Plante. Il sait de quoi il parle: c'est lui qui a effectué le sondage sur la qualité des services offerts par la Division des archives. "Nous avons toujours eu le souci de répondre de façon satisfaisante aux demandes de recherche, dit l'archiviste. Mais nous voulions évaluer le taux de satisfaction de notre clientèle de manière à répondre encore mieux aux besoins intellectuels, techniques et matériels des chercheurs."
L'étude menée l'automne dernier auprès des usagers ayant fréquenté les archives durant la période 1997-1998 dévoile un taux de satisfaction élevé. Quatre-vingt-onze pour cent des répondants se disent satisfaits de la qualité de la documentation, des appareils, de la rapidité du service, de l'atmosphère de la salle de consultation et des heures d'ouverture. Concernant les outils de recherche et les ouvrages de référence, 81% les considèrent comme utiles et faciles à consulter.
Fonds et index: une véritable mine d'or
L'apport des documents à la réalisation des projets de recherche est significatif: le quart des corpus d'études est composé entre 50% et 100% de sources provenant de la Division des archives de l'Université. Actuellement, les archives comprennent "300 fonds institutionnels et 250 fonds privés qui totalisent 1,4 kilomètre linéaire de documents relatifs à la mission d'enseignement et de recherche de l'Université de Montréal", peut-on lire dans le guide du chercheur. C'est environ la distance entre le Pavillon Marie-Victorin et la Faculté de l'éducation permanente! Et c'est sans compter les 8000 photographies, les 19 000 archives imprimées et la grande quantité de pièces iconographiques et audiovisuelles.
L'an dernier, la Division des archives a acquis le fonds de l'Institut agricole d'Oka, qui porte sur l'enseignement de l'agriculture au Québec. S'ajouteront prochainement de nouveaux fonds comme celui de Jean Valerand, célèbre critique musical, et celui de Vincent Witold AdamKiewicz, un des premiers professeurs de microbiologie. "Ces documents ainsi que plusieurs autres font présentement l'objet de négociations, mais, si tout se passe comme prévu, ils devraient bientôt être accessibles aux chercheurs", précise l'adjointe au directeur, Denise Pélissier.
De nombreux instruments de recherche conçus par la Division des archives sont aussi offerts aux usagers. Selon le sondage, 70% des répondants affirment d'ailleurs avoir eu recours à au moins un de ces outils. Entre autres, l'index rattaché à l'État général des fonds (EGF) recense par ordre alphabétique tous les noms propres de personnes, d'organismes et de lieux mentionnés dans les fonds d'archives. Quant à l'EGF, il comprend une description sommaire du contenu de chacun des fonds. Cet outil a été consulté par 32% des personnes interrogées, souligne M. Plante. À noter que, dès janvier, l'EGF sera progressivement mis à la disposition des chercheurs sur le Web. "On compte ainsi augmenter l'achalandage de 5%, estime l'archiviste. L'an dernier, 600 demandes de recherche ont été reçues et traitées", fait-il valoir.
Parmi les répondants, 56% mentionnent avoir consulté un fonds d'archives et 45% en ont examiné deux ou plus. "La majorité des chercheurs habitent Montréal ou la région immédiate, signale M. Plante, mais les champs de recherche sont variés." Les différentes disciplines universitaires font l'objet de recherches dans les proportions suivantes: 68% en sciences humaines, 16% en sciences sociales, 7% en musique, 5% en sciences pures et appliquées, 2% en sciences de la santé et 2% dans d'autres domaines.
Les archives musicales ainsi que celles de la santé et des sciences pures ne pourraient-elles pas davantage être exploitées compte tenu de la richesse de ces fonds? Denis Plante ne peut pas pour l'instant expliquer cette situation. Chose certaine, les études portant sur l'histoire de l'Université de Montréal n'ont jamais été aussi populaires: 56% des recherches effectuées aux archives entre juin 1997 et mai 1998 s'intéressaient à une unité, à un membre ou encore à un administrateur.
Et ces études n'ont pas toutes pour but la rédaction d'un mémoire de maîtrise ou d'une thèse de doctorat. En fait, 70% des chercheurs poursuivent un autre objectif, comme la publication d'un livre ou d'un article. D'autres (7%) veulent réaliser un film, une vidéo ou une série télévisée. L'an dernier par exemple, les archives de l'Université ont été consultées par Radio-Canada pour le tournage d'une émission sur l'histoire des sciences au Canada. Les archives ont aussi servi dans le cadre d'un reportage biographique sur Maryvonne Kendergi, musicologue de renommée internationale et professeure émérite à la Faculté de musique; pour l'émission d'un timbre-poste sur Édouard Montpetit; pour la reconstitution de l'histoire de la Faculté de théologie, etc.
Veiller à la conservation du patrimoine
"Les archives constituent l'ensemble des documents produits par une personne physique ou morale dans sa vie, explique Denis Plante. Les fonds privés proviennent du milieu des arts, de la création littéraire, de l'éducation, de la musique et des sciences, y compris les sciences de la santé." Mais l'Université s'intéresse d'abord aux documents produits dans ses murs. En fait, elle est même une pionnière de la mise en application des règles de conservation à l'interne. Quelques exemples de documents que nous retrouvons aux archives: procès-verbaux et correspondance du secrétariat général, notes et dossiers scientifiques ou professionnels, manuscrits d'ouvrages ou d'articles publiés, textes d'allocutions ou de conférences prononcées, etc. Une véritable mine d'or!
Mais combien de temps encore les professeurs, étudiants et chercheurs autonomes pourront-ils profiter de ces documents précieux? Telle est la préoccupation de Denise Pélissier, qui s'inquiète des mauvaises conditions de conservation. "Certains locaux de l'Université ne répondent pas aux normes minimales exigées par le Conseil canadien des archives, déclare-t-elle. Mais nous travaillons actuellement de concert avec les unités concernées pour rétablir des normes acceptables dans les lieux d'entreposage des documents d'archives", assure Denise Pélissier.
En été, il fait 37 °C dans la tour du Pavillon principal, explique l'adjointe au directeur. Avec une chaleur pareille, les papiers jaunissent et à la longue ils deviennent très fragiles ou inutilisables. "La seule solution, et de loin la moins coûteuse, est d'assurer une température appropriée aux documents." Le hic? Il en coûterait 15 000 $ pour climatiser, de juin à septembre, les étages de la tour où sont archivés les fonds. Et l'Université n'a pas cet argent. Pour Denise Pélissier, le manque de ressources financières ne fait pas de doute, mais le besoin demeure. "Si le toit s'effondre, se pose-t-on la question de savoir si l'on va le réparer? Dans le cas des archives, on n'a pas plus le choix: notre patrimoine est en jeu!"
Dominique Nancy