Au cours de ses voyages, Alexandre Chouinard a contracté deux gastro-entérites et une varicelle, mais il a toujours la piqûre du tiers-monde. |
Chiapas, 1990: durant un stage de coopération
internationale, Alexandre Chouinard attrape la piqûre...
du tiers-monde. "Un voyage passionnant. Malgré l'inexpérience
et les petites bévues, je suis revenu vivant!" Depuis,
l'étudiant en médecine a séjourné
au Nicaragua, au Chili et même à Povungnituk, avec
les Inuits. Il vient de publier un guide à l'intention
des coopérants en herbe du Québec.
L'ouvrage renferme une foule de renseignements et de ressources pour ceux qui voudraient tenter l'aventure d'un voyage dans les pays en voie de développement. Publié aux Éditions Ulysse, Stagiaires sans frontières est un outil d'aide à la préparation et à la réalisation d'un stage au tiers-monde. Il comprend aussi des témoignages d'étudiants stagiaires, une liste d'adresses Internet et de suggestions de lecture ainsi que plusieurs trucs pratiques.
En voici un très utile pour prévenir les risques de maladies: "Faites attention à l'eau du robinet, même si les gens du pays la consomment, prévient l'auteur. Ne buvez que de l'eau embouteillée ou bouillie, même pour vous brosser les dents. Pour désinfecter l'eau, utilisez quatre gouttes de teinture d'iode par litre d'eau claire. Si vous n'aimez pas le goût, rajoutez-y de la poudre à saveur de jus."
L'intérêt du guide ne s'arrête pas là. Il renferme également des idées de financement. C'est d'ailleurs pour financer un stage de formation en médecine familiale au Chili qu'Alexandre Chouinard a produit ce guide. "Les gens intéressés par ce genre d'expérience me demandaient des conseils et je me suis rendu compte qu'il y avait un besoin, dit-il. J'ai alors eu l'idée de regrouper dans un même volume les renseignements utiles à l'usage des personnes qui souhaitent effectuer ce type de stage."
Aussitôt publié... aussitôt épuisé! "Un mois à peine après la parution d'un article dans le journal Forum, les 200 copies de mon livre étaient vendues", raconte l'étudiant qui a réalisé lui-même toutes les étapes de la production de l'ouvrage, même l'édition. C'était il y a trois ans. Depuis, il a effectué d'autres voyages, dont un en Indonésie. Et puis, il a retravaillé son guide dans le but cette fois de trouver preneur chez un éditeur. "Je trouvais dommage que l'information ne soit pas accessible à un plus grand nombre. D'autant plus qu'il n'existe aucune référence du genre au Québec", souligne-t-il.
La première publication était une version maison à tirage limité. L'ouvrage comprenait des renseignements sur la manière d'organiser un stage dans les pays en voie de développement, mais les ressources mentionnées se limitaient essentiellement à celles de l'Université de Montréal. La nouvelle édition est donc plus complète puisqu'on y retrouve les coordonnées d'organismes du domaine de la coopération internationale pour l'ensemble de la province.
Pourquoi partir?
"Quelle mouche t'a piqué? Que veux-tu aller faire
par-là?" L'apprenti tiermondiste se fera sans doute
poser des questions semblables, signale l'auteur. Il conseille
d'ailleurs aux stagiaires de s'interroger sur leurs réelles
motivations à vouloir partir. "On ne s'embarque pas
comme ça à l'aveuglette, sans quoi on risque de
revenir frustré et d'entretenir des préjugés
contre le pays visité", déclare-t-il.
Si le vétéran de la coopération souligne l'importance d'une telle réflexion, c'est aussi parce que les étudiants ont souvent de trop grandes attentes par rapport à leur stage. "Le stagiaire a intérêt à savoir qui il est vraiment et ce qui le motive. Il doit apprendre à connaître ses limites, celles de son action ainsi que la distance qui le sépare de l'utopie qui doit l'animer", écrit-il dans l'introduction de son guide. Bref, il faut savoir garder les deux pieds sur terre.
Le coopérant ne changera pas le monde en séjournant quelques semaines au Cameroun, en Bolivie ou en Chine. Une chose est néanmoins fort probable, assure Alexandre Chouinard: "Il en reviendra transformé et son engagement lui permettra une meilleure compréhension du monde." Il insiste toutefois sur la nécessité de planifier son voyage longtemps d'avance. Et cela inclut aussi bien le départ que le retour. "Il est tout aussi important de s'informer sur le lieu où l'on va que de préparer son retour au pays, car le choc culturel ne se produit pas seulement lorsqu'on arrive à l'étranger", affirme l'auteur. Il rappelle par ailleurs que, malgré toutes les différences, les choses qui se passent ici ne sont pas sans lien avec celles du tiers-monde.
Voilà sans doute pourquoi il a tenu à préciser dans son guide la différence entre charité et solidarité. "La charité n'est pas la meilleure façon d'aider puisqu'elle place les pays en développement en situation de dépendance, écrit-il. Une fois l'aide terminée, la misère revient en force. La solidarité, par contre, en visant la compréhension entre les peuples, l'appui mutuel et l'enrichissement de chacun, a pour but un développement durable et propose un échange, un dialogue, une écoute des besoins du milieu, une approche, somme toute, beaucoup plus respectueuse de l'autonomie des peuples."
Dominique Nancy
Alexandre Chouinard, Stagiaires sans frontières,
Montréal, Les Éditions Ulysse, 1999, 240 pages,
14,95$.