ASSEMBLEE UNIVERSITAIRE
L'Assemblée universitaire (AU) a tenu le 29 mars une réunion extraordinaire qui fut entièrement consacrée à la question de l'augmentation des frais de rédaction que l'Université envisage d'instaurer prochainement (voir Forum du 29 mars).
Dès l'ouverture de la séance, les étudiants ont présenté une résolution demandant à la direction de l'Université de suspendre pour une période d'un an, soit pour la durée de l'exercice financier commençant en juin, "toute décision relative à l'augmentation des frais de rédaction et aux mesures financières concernant les étudiants". Dans la même proposition, les étudiants demandaient que l'Assemblée universitaire constitue un groupe de travail pour étudier "la pertinence de telles mesures et mesurer avec précision leurs impacts sur les étudiants et sur les activités de l'Université".
Présentant la résolution, Patrick Lebel, de la FAECUM, a déclaré ne pas être convaincu de l'urgence d'augmenter ces frais "au moment où l'Université vient de toucher 30 M$". Selon lui, un moratoire d'un an permettrait de soupeser "de façon méthodique et scientifique" les répercussions de ces augmentations sur les étudiants.
Dans la discussion en comité plénier qui a suivi, le vice-recteur exécutif Michel Trahan a expliqué que les 29 M$ que l'Université allait bientôt encaisser ne visaient en tout et pour tout qu'à diminuer la part du déficit accumulé attribuable aux programmes d'aide à la retraite et que leur seul effet sur le budget de fonctionnement serait de réduire le service de la dette de 1,2 M$.
Proposition d'étalement
Pour sa part, le recteur Robert Lacroix a signalé que l'Université
se retrouvait avec un manque à gagner de 4 à 5 M$
par rapport au budget qui fut adopté au printemps 1998.
Celui-ci ayant été déterminé sans
la tenue d'audiences, l'Université a dû accorder
en cours d'année des rallonges budgétaires "parce
que nous étions rendus à l'incompressible dans plusieurs
unités". Se sont ajoutées pendant l'année
des dépenses imprévues d'entretien de la tuyauterie.
La vice-rectrice à l'enseignement de premier cycle et à la formation continue, Claire McNicoll, a expliqué la nouvelle proposition de l'Université sur le sujet, qualifiée de "proposition d'étalement". Celle-ci fait en sorte que le plein montant des frais de rédaction, soit 556$ par trimestre, serait atteint à l'automne 2001 plutôt qu'à l'été 2000. La proposition devait d'ailleurs être étudiée le 31 mars au Comité consultatif sur les mesures financières relatives aux étudiants, que préside Mme McNicoll et auquel siègent trois représentants étudiants. De plus, a-t-elle ajouté, pour un étudiant en rédaction dont le revenu annuel serait de 11 500$, le coût réel des frais de rédaction s'élèvera, en réalité, à 229$ puisqu'il recevra 327$ de remboursement d'impôt selon les déductions fiscales actuellement permises. De plus, l'étudiant qui n'aurait pas un revenu suffisant pour en bénéficier pourrait reporter ces déductions sur les années suivantes.
Plusieurs intervenants ont exprimé leur malaise par rapport à la résolution des étudiants, comprenant d'une part leur opposition à cette hausse de frais mais admettant d'autre part ne pas voir comment l'Université pouvait l'éviter. Certains ont même soupçonné les étudiants de vouloir gagner du temps en proposant la création d'un comité qui se pencherait sur "le sexe des anges".
"Pourquoi attendre? a demandé le doyen Claude Fabien. Dans l'espoir que la direction change d'avis? Pour faire payer les étudiants qui suivront? Dans l'espoir d'un deus ex machina, d'une solution relevant de la pensée magique?"
Scrutin secret
L'Université de Montréal est celle qui a la charge
professorale la plus lourde au Québec en matière
de tutoring; or, elle doit demeurer concurrentielle par
rapport aux autres qui ont déjà augmenté
leur frais de rédaction, a souligné le doyen Louis
Maheu, de la Faculté des études supérieures.
Les universités qui ont déjà augmenté
ces frais n'ont pas constaté de baisse significative de
la clientèle étudiante et ont même observé
une diminution du décrochage et de la durée des
études, a-t-il précisé. Il a rappelé
que l'Université consacrerait le quart des revenus supplémentaires
engendrés par cette hausse à des bourses pour les
étudiants.
Pour maintenir la qualité de la formation aux cycles supérieurs, l'Université doit également tenir compte de la réalité des coûts, qui sont plus élevés qu'au premier cycle en raison de la formation en petits groupes et de l'encadrement individualisé, a signalé Michel Trahan. "C'est d'ailleurs là une demande historique de l'Université de Montréal", où les professeurs consacrent de 18% à 20% de leur temps à l'enseignement aux deuxième et troisième cycles, a constaté le vice-recteur.
Prenant parti en faveur des étudiants, le professeur Gabriel Gagnon a déclaré regretter que la question comptable prenne le pas sur la question fondamentale de l'accessibilité pour le plus grand nombre. Il a suggéré de "marcher dans la rue pour demander plus d'argent à l'État". La professeure Denise Couture s'est aussi prononcée en faveur du moratoire demandé par les étudiants, disant préférer une mesure universelle à un programme de bourses qui force les étudiants à subir "l'humiliation d'avoir à faire la démonstration de leur pauvreté et de leurs besoins".
Bref, malgré l'appui de quelques professeurs et des représentants du personnel de soutien, au moment du vote, à scrutin secret, les étudiants n'ont recueilli que 20 voix en faveur de leur proposition, 45 membres de l'Assemblée ayant voté contre.
Françoise Lachance
Les documents déposés au cours de cette séance sont disponibles au Secrétariat général.