De la guitare électrique à la direction d'orchestre... classique

François Ouimet mobilise 44 choristes et musiciens pour son récital de fin de maîtrise.

François Ouimet présentait, le 7 avril dernier, son récital de fin de maîtrise en direction d'orchestre à la salle Claude-Champagne, de la Faculté de musique. Cette année, il était le seul à avoir choisi cette discipline. Au programme, des oeuvres baroques de Bach, Monteverdi, Schütz et Gabrieli.

Il s'agissait d'un défi de taille pour François Ouimet. Il y a un an, il n'avait encore ni orchestre ni choeur à diriger. Pour son projet de fin de maîtrise, il a dû mobiliser en un temps record 24 chanteurs, 5 solistes et 15 musiciens professionnels. Afin d'offrir un salaire symbolique à ces derniers, il est allé demander une aide financière à ses proches. "Tout ça représente beaucoup de travail, mais je savais dans quoi je m'embarquais. Être chef d'orchestre, c'est aussi être gestionnaire", commentait-il quelques jours avant son récital.

François Ouimet a voulu se familiariser avec toutes les facettes du métier. "Je n'ai pas beaucoup délégué, j'ai voulu tout faire, seul. La direction, ce n'est pas seulement du travail musical. Quand on dirige 30 musiciens, il faut savoir être un bon planificateur, et puis il faut aussi être diplomate, surtout quand on débute", a-t-il expliqué.

Une semaine avant son récital, il ne cachait pas sa nervosité. Diriger des musiciens professionnels n'est pas une chose facile, mais il comptait sur leur indulgence. "Mes musiciens sont très compréhensifs, ils savent que je n'ai pas beaucoup d'expérience. J'ai beaucoup appris en travaillant avec eux. J'ai appris qu'il faut être à leur écoute, il faut s'impliquer dans la musique."

Le classique est une vocation tardive pour François Ouimet. En effet, il a fait un baccalauréat en interprétation à la guitare électrique. "J'ai une formation en jazz. J'ai aussi beaucoup joué dans des groupes de rock. Ça fait seulement quatre ou cinq ans que je m'intéresse à la musique classique et à la musique de choeur."

Passer de l'interprétation à la direction n'a pas était un choc pour l'étudiant. Très vite, il s'est senti à l'aise dans son nouveau rôle. "Je me sens plus à ma place comme chef d'orchestre que comme interprète. Un groupe de rock ou un ensemble de jazz, c'est un peu une structure anarchique et ça peut être fatigant. Tandis que, dans un orchestre, j'ai un rôle qui est bien défini, je peux exprimer mes idées. Et puis jouer d'un instrument ou diriger un orchestre, c'est un peu la même chose. Un orchestre, c'est aussi un instrument de musique."

Pour son récital, François Ouimet a choisi d'interpréter de la musique baroque, un style de plus en plus populaire au Québec. "En ce moment, on a tendance à légitimer ce style de musique. Je pense qu'il y a des affinités entre l'époque baroque et la nôtre. C'était une période d'extrêmes dans les émotions. La musique baroque était une réaction à la dureté de l'époque."

Le jeune chef a baptisé son ensemble Tactus. "C'était la pulsation rythmique à la Renaissance. On la calculait par rapport aux battements du coeur. J'ai trouvé ça beau." Ce choix reflète l'approche musicale de François Ouimet. Il recherche avant tout l'émotion dans la musique. On ressent l'influence de sa formation rock. "Je fuis un peu la technique pour la technique. Souvent, en musique ancienne, on entend des interprétations qui sont très poussées au niveau musicologique mais qui manquent de chaleur, d'émotion."

François Ouimet est loin d'être un puriste. Pour lui, la musique classique n'a rien de sacrée. Il n'a pas peur de tenir des propos peu orthodoxes. "La distinction entre musique sérieuse et musique légère m'énerve. À l'époque classique, bien de la musique n'était pas de l'art. C'était souvent de la musique fonctionnelle, conçue pour un roi qui n'avait pas nécessairement l'oreille musicale. Des musiques rock réalisées avec intégrité peuvent avoir plus de valeur que certaines symphonies de Haydn."

Quels sont les projets de François Ouimet une fois la maîtrise terminée? "J'espère continuer à diriger et j'aimerais enseigner, être directeur de programme ou chef de choeur dans un cégep ou dans une université." Avec des idées comme les siennes, il n'aura pas de mal à se faire aimer de ses étudiants!

Christophe Bergeron
Collaboration spéciale