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Athlète et étudiant

Malgré les revers, la combinaison est toujours gagnante, selon Anne Montminy et Alexandre Émond.

On voyait cette plongeuse sur le podium olympique. Elle récolte une 24e position. Il semblait parti pour la gloire, cet ailier de l'équipe de volley-ball des Carabins, mais il se blesse. Que font les athlètes après avoir subi un échec ou une blessure qui risque de compromettre leur carrière? "Ce n'est pas la fin du monde, répond Anne Montminy. On analyse la situation avec son entraîneur et l'on fait des ajustements. Puis, on recommence à pousser la machine à fond." Alexandre Émond partage cet avis: "On ne doit pas se laisser abattre. Il importe d'apprendre à tirer des leçons de ses expériences."

Pour la plongeuse et l'ancien de l'équipe de volley-ball, perdre une bataille ne signifie pas perdre la guerre. Ayant eu chacun leur part d'épreuves à surmonter, ils en savent quelque chose.

Actuellement étudiante en droit, Anne Montminy analyse son parcours trois ans après sa décevante performance aux jeux d'Atlanta, en 1996, où elle était arrivée toute confiante compte tenu de sa quatrième place aux Championnats mondiaux. "Aux Jeux olympiques, le déroulement de la compétition est très différent, fait-elle remarquer. On doit attendre une heure entre chaque plongeon au lieu des 15 minutes habituelles. Je me sentais prête à performer et j'étais même très peu stressée." Trop peu? Peut-être bien. "En général la pression a un effet positif sur ma performance. Mais peut-être que je n'étais tout simplement pas bien préparée pour ce style de compétition", admet-elle.

Apprivoiser la déception
À peine deux ou trois jours après cette contre-performance, elle reprend son programme d'entraînement et tel que prévu entame sa première année d'études universitaires. "La meilleure façon de combattre son anxiété, c'est de la dissiper dans l'action. Les études m'ont toujours aidée à mettre le sport en perspective et à apprivoiser ma déception", révèle la jeune femme qui pratique le plongeon depuis l'âge de six ans.

"Il faut apprendre à accepter l'erreur et à vaincre le sentiment d'échec", soutient Alexandre Émond. À son avis, les athlètes universitaires possèdent des qualités leur permettant de mieux tirer profit des expériences difficiles. Mais cela ne va pas toujours de soi.

Alors qu'il venait d'être présélectionné pour faire partie de l'équipe nationale B (réunion des 12 meilleurs joueurs universitaires canadiens), l'ailier se blesse à l'épaule pendant le camp d'entraînement. "Cette année-là a été marquante et très pénible, confie-t-il. L'Université venait de retirer aux Carabins son financement et vlan... une blessure. J'avais l'impression qu'un mauvais sort s'acharnait sur moi."

Malgré les traitements de physiothérapie, son épaule ne guérit pas parfaitement, le muscle étant gravement atrophié. Il doit se rendre à l'évidence: une décision concernant sa carrière s'impose. "Si j'ai opté pour les études aux cycles supérieurs en génie aérospatial, ce n'est pas seulement à cause de ma blessure, précise-t-il. Ma petite taille s'avérait une autre entrave à mes ambitions, mentionne ce passionné de sciences pures qui mesure 6 pi 2 po! Mon excellente condition physique avant l'accident compensait un peu cette lacune."

N'empêche que son potentiel de haut calibre n'était pas pour autant remis en question. L'entraîneur des Rouge et Or de l'Université Laval l'avait d'ailleurs recruté aussitôt après le référendum étudiant de 1994, qui avait entraîné le retrait du soutien financier des activités des Carabins. Un an plus tard, la direction de l'Université de Montréal remettait sur pied le programme de sport d'excellence et l'étudiant revenait à l'École Polytechnique pour reprendre son entraînement avec les Carabins.

Une combinaison gagnante
Tous les athlètes ne se relèvent pas avec autant de courage après une épreuve. "Ceux qui réussissent à jumeler le sport et les études sont avantagés, assure la plongeuse. Les autres, pour qui le sport est l'unique intérêt dans leur vie, s'infligent une pression supplémentaire. Si ça va mal, ils n'ont plus rien." Évidemment, renchérit l'ingénieur, s'il arrive une bad luck on a moins tendance à déprimer étant donné qu'on n'a pas mis tous ses oeufs dans le même panier.

"Ce cheminement en parallèle est aussi très apprécié par les employeurs parce que les étudiants athlètes démontrent de la détermination et de la rigueur", note Alexandre Émond qui, l'année dernière, figurait parmi les 10 meilleurs athlètes universitaires canadiens, selon l'Union sportive interuniversitaire canadienne, et recevait en 1997-1998 le titre d'athlète de l'année de l'Université pour l'excellence de son dossier scolaire et sa performance sportive. Au-delà du dépassement de soi, il y a dans le sport un amalgame d'aptitudes à développer: la discipline, le leadership, la gestion du stress et l'adaptation au changement. Et c'est justement cette capacité à s'adapter au changement qui lui a permis de renverser la vapeur lorsque le ciel lui est tombé sur la tête.

Pour sa part, Anne Montminy a toujours su concilier l'école et l'entraînement sportif. Pourtant, après son premier trimestre à l'Université, elle a ressenti une grande fatigue. "J'ai eu tort, constate-t-elle, de ne pas relaxer après les jeux d'Atlanta. J'aurais du m'accorder un peu de répit." Comme il n'est jamais trop tard pour bien faire, elle décide de cesser momentanément l'entraînement et de se consacrer uniquement à ses études pendant quelques mois.

Sydney 2000
"Avec le temps libre dont je disposais enfin, j'en ai profité pour aller au cinéma et dans les cafés avec des amis. Ça m'a fait beaucoup de bien d'avoir une vie sociale plus active", observe-t-elle. Résultat: en 1997, la plongeuse québécoise se hissait de nouveau au quatrième rang mondial et, l'automne dernier, elle remportait une médaille de bronze aux jeux du Commonwealth. Lorsque Forum l'a rencontrée, elle revenait de la Nouvelle-Zélande et préparait une autre compétition, en Allemagne cette fois. La preuve qu'il s'avère possible de s'entraîner intensivement et d'étudier tout à la fois. Elle croit même que le fait de combiner le sport avec les études améliore ses performances athlétiques.

Et les Jeux olympiques de Sydney en l'an 2000? "Je mentirais en disant que je n'y pense pas, dit la plongeuse de 24 ans. La médaille olympique représente l'ultime récompense pour un athlète amateur, souligne-t-elle. Mais pour l'instant, je me fixe des objectifs à court terme."

Quant à Alexandre Émond, il se dit très satisfait de sa nouvelle aventure. L'étudiant au deuxième cycle à l'École Polytechnique déposera au printemps prochain son projet de mémoire réalisé grâce à la collaboration de l'Agence spatiale canadienne. L'entraîneur de l'équipe de volley-ball des Carabins, Georges Laplante, lui a même proposé un poste d'entraîneur adjoint. Le jeune homme, âgé de 24 ans, y songe sérieusement, car il aimerait bien transmettre son expérience à d'autres athlètes.

En attendant, il maintient sa forme en jouant bien sûr au volley-ball et en faisant du vélo de route, du golf, du tennis... Mais a-t-il des regrets? "Le volley-ball a complété ma formation scolaire et je me considère comme chanceux d'avoir pu vivre une telle expérience. Aujourd'hui, j'ai cependant la certitude d'avoir choisi l'avenue la plus sûre pour moi", conclut-il.

Dominique Nancy
Collaboration spéciale


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