Ouverture du Centre d'exposition |
L'exposition inaugurale met en valeur les collections de l'Université. |
La coordonnatrice du Centre d'exposition, Andrée Lemieux, est également responsable de la Collection des oeuvres d'art, d'où est tiré Le quêteux, du sculpteur Alfred Laliberté. |
Après 20 ans au service de l'Université de Montréal, l'historienne de l'art et muséologue Andrée Lemieux a l'impression d'entamer une nouvelle carrière. Elle doit cet enthousiasme au tout nouveau centre d'exposition de l'Université, construit au coût de un million de dollars et entièrement payé par le ministère de l'Éducation du Québec. Ce centre, qui répond aux normes muséologiques les plus récentes pour ce qui est de l'aération, du contrôle de la température et de l'humidité, de la sécurité, de l'éclairage, etc., a une superficie de 747 m2 dont près de la moitié en aire d'exposition.
"C'est pour moi un nouveau départ", a déclaré à Forum la coordonnatrice de ce centre le jour de son inauguration, le 25 août dernier. On célébrait du même coup le vernissage de l'exposition Regards croisés (voir le texte et les photos en pages 6 et 7). Loin de renier ses années à la Galerie du SAC, au Pavillon J.-A.-DeSève, Mme Lemieux affirme que les possibilités de cette salle sont ici décuplées. "Il s'agit d'un centre d'exposition professionnel qui fera désormais partie du circuit obligé des amateurs d'art", dit Mme Lemieux.
Le Centre d'exposition de l'Université de Montréal aura pour mission fondamentale de "créer une synergie" entre les arts et les sciences, trop souvent mis en opposition. Il mettra en outre l'accent sur les collections de l'Université, qui sont restées jusqu'ici réservées aux happy-fews.
La salle d'exposition de 400 m2 donne sur un hall d'entrée et un jardin pouvant être exploités lors d'expositions. Les amphithéâtres du Pavillon de la Faculté de l'aménagement pourront également servir pour des conférences. |
En effet, le grand public a eu très peu accès à la collection permanente d'art (essentiellement québécois), qui compte quelque 450 oeuvres de Riopelle, Borduas, Pellan, Ferron, Leduc, Lemieux, Fortin et Laliberté, notamment. Une collection évaluée à trois millions de dollars et qui est appelée à s'enrichir encore.
Certains départements possèdent des collections dont la valeur historique, scientifique ou patrimoniale est tout aussi importante. La Collection entomologique Ouellet-Robert, du Département de sciences biologiques, compte par exemple un million de spécimens de 20000 espèces. Le musée Eudore-Dubeau possède, quant à lui, un millier d'artefacts témoignant de l'évolution de la médecine dentaire. C'est la plus grande collection de ce type au pays. Il y a aussi l'herbier Marie-Victorin, la collection d'objets ethnographiques, la collection du Laboratoire de recherche sur les musiques du monde, la collection de l'École de design industriel, la collection des livres rares et, bien sûr, la Division des archives de l'Université de Montréal. Toutes ces collections feront, en temps et lieu, l'objet d'une exposition. On peut d'ailleurs en avoir une idée en visitant l'exposition en cours. Mme Lemieux a demandé à 11 artistes professionnels de s'inspirer de ces collections pour créer une oeuvre.
De plus, dès la mi-septembre, le Centre d'exposition sera véritablement "branché". Sur le site http://www.expo.umontreal.ca, on pourra obtenir de l'information générale (horaires, expositions en cours, etc.), avoir accès aux catalogues des expositions, à des données sur les différentes collections et à une "veille thématique" sur les nouvelles technologies en muséologie.
Le conseil d'administration de ce centre est composé de la présidente Gisèle Painchaud (Sciences de l'éducation) et des membres suivants: Monique Desroches (Musique), Yves Deschamps (Histoire de l'art, FAS), Richard Bodéüs (Philosophie, FAS, et FES), Luc Courchesne (Design industriel et Aménagement) et Louise Vernier-Blouin (représentante de l'extérieur). Deux représentants étudiants et deux membres de l'extérieur devront encore être désignés.
Mathieu-Robert Sauvé
"Cette exposition pose le défi de montrer et d'actualiser dans une interprétation contemporaine divers objets de collection chargés d'histoire et de sens", écrivent les conservateurs invités de l'exposition Regards croisés, Yolande Racine et Gaston Saint-Pierre.
Le défi de cette exposition, actuellement présentée au Centre d'exposition de l'Université de Montréal, est assurément relevé, car l'oeuvre inédite de chacun de ces artistes, dont plusieurs sont professeurs à l'Université, émeut ou secoue, fait rire ou dérange, ce qui est certainement l'un des buts recherchés.
Cela dit, l'art contemporain exige des spectateurs un effort soutenu pour comprendre le message. Mais comme tous les visiteurs n'ont pas l'occasion de passer une heure devant chaque installation, rien ne vaut une bonne vieille visite commentée des lieux. Ainsi, la coordonnatrice du Centre d'exposition, Andrée Lemieux, a permis à Forum de saisir les liens parfois ténus qui existent entre les artistes et les éléments des 11 collections qui les ont inspirés.
Cette oeuvre de Serge Tousignant, professeur à la section d'arts plastiques (Histoire de l'art), est un cinglant pied de nez à l'anthropométrie telle qu'elle est définie dans le Nouveau Larousse illustré (1898-1904), déniché au Service des livres rares et des collections spéciales. L'anthropométrie parle notamment de "sous-subdivision de bizygomatique"! |
Susan Vachon, qui est connue pour ses travaux d'intégration à l'architecture (le "1%"), s'est inspirée d'un appareil optique pour créer cette sculpture lumineuse. Sur le troisième anneau est gravé le mot "luciole". Cet insecte ne produit-il pas sa propre lumière? |
Une vitrine est consacrée à la collection de l'École d'optométrie. On aperçoit à l'avant-plan l'appareil optique qui a inspiré Susan Vachon. |
Pas évident, non plus, le rapport entre la structure métallique rectiligne productrice d'ombre et de lumière (Susan Vachon) et cet instrument d'optométrie de petite dimension. Mais les conservateurs ont refusé de "faire didactique" en plaçant côte à côte l'objet inspirant et l'objet d'art. "C'est au spectateur, explique Mme Lemieux, qu'il appartient de faire les analogies qui lui plaisent."
Peter Krausz, professeur à la section d'arts plastiques, a imaginé une installation d'après le thème de la collection. Sur une étagère, on trouve des fragments d'oeuvres picturales numérotés et classés, qui renvoient tant aux arts visuels qu'à la bibliothéconomie ou à l'archivistique. |
Parfois, les liens avec les collections sont encore plus diffus. Peter Krausz n'a retenu que l'idée de la collection pour créer une petite étagère où une quantité de fragments d'oeuvres sont classés dans un ordre apparent, qui rappelle les rayons d'une bibliothèque.
La maquette du Pavillon principal en bronze, de Jacek Jarnuszkiewicz, juxtaposée à la maquette en plexiglas du Musée d'art contemporain, ne surprend qu'au second regard. On comprend vite - quand on nous l'explique - que ce diptyque symbolise les éléments masculin et féminin du patrimoine bâti de Montréal - le phallus de l'Université et les lèvres féminines du Musée.
Connue pour ses motifs floraux, Monique Mongeau est allée spontanément vers l'herbier Marie-Victorin, d'où elle a tiré une plante significative: la dernière herborisation du célèbre frère des écoles chrétiennes. |
Un autre artiste, Alain Laframboise, a choisi de détourner le sens d'une pièce qu'il a dénichée dans la collection de la Faculté de médecine dentaire. Cela donne l'oeuvre la plus bouleversante de cette exposition: un triptyque sur le thème de la mort avec, au centre, le moulage d'un "écorché", tête humaine sans peau ni mâchoire utilisée en anatomie pour bien comprendre le système musculaire.
Cette exposition inaugurale a été dédiée à l'artiste Pierre Granche, décédé il y a un an. On le voit ici (à droite) avec ses deux collègues de la section d'arts plastiques, Peter Krausz et Serge Tousignant, sur une photo prise en 1996. |
Selon les conservateurs, tous deux diplômés du Département d'histoire de l'art, il fallait rendre hommage à ces gens souvent inconnus qui amassent des artefacts significatifs au fil du temps, lesquels souvent s'empoussièrent au fond des placards. Avec ces collections, on aurait pu faire une exposition virtuelle contenue sur un banal cédérom. "Au contraire, expliquent-ils dans le catalogue, l'exposition Regards croisés propose plutôt une actualisation, une recontextualisation ou bien tout simplement une appropriation de ces collections d'objets, dispersées à travers les départements de l'Université."
Seul impair: une exposition portant le même titre s'est tenue au Musée du Québec durant l'été. Elle mettait l'accent sur les influences de quatre peintres québécois du 19e siècle. Que les amateurs d'art soient prévenus.
Mathieu-Robert Sauvé
Regards croisés, Centre d'exposition de l'Université de Montréal, 2940, chemin de la Côte-Sainte-Catherine, entrée libre. Jusqu'au 27 septembre, du mardi au jeudi et le dimanche, de 12 h à 18 h.
À l'ouverture, le 25 août, le vice-recteur Patrick Robert a fait le tour de l'exposition avec Marjorie Bronfman, à qui l'Université de Montréal doit les 400 croquis de costumes de théâtre de Stratford, qui font maintenant partie de sa collection. Ceux-ci seront d'ailleurs exposés au Centre en septembre 1999. M. Robert et Mme Bronfman examinent ici quelques instruments de la collection du Laboratoire de recherche sur les musiques du monde en compagnie de la coordonnatrice Andrée Lemieux. |
Le Centre d'exposition mettra en valeur les collections de l'Université. En voici la liste.
La Collection des oeuvres d'art est composée de 450 peintures, sculptures, installations extérieures et gravures d'artistes tels que Marc-Aurèle Fortin, Alfred Pellan, Jean-Paul Riopelle, Jean-Paul Lemieux, Alfred Laliberté, Ozias Leduc et Marcelle Ferron. Elle comprend également quelques tableaux de maîtres anciens, dont deux Solimenas, et une collection de 350 dessins de costumes du Festival de théâtre de Stratford.
Le Laboratoire de recherche sur les musiques du monde, de la Faculté de musique, comptait en 1997 plus de 500 instruments provenant des cinq continents et près de 1000 documents sonores inédits. L'UdeM est la seule université canadienne à posséder une telle collection.
Le musée Eudore-Dubeau, du Département de médecine dentaire, compte plus de 1000 artefacts qui tracent l'itinéraire de la profession dentaire et illustrent les nouvelles pratiques de dentisterie. On y trouve des manuels anciens, des instruments de travail et du mobilier. Cette collection est unique au Québec et la plus importante au Canada.
L'École de design industriel compte plus de 50 objets originaux de designers québecois, canadiens et européens.
La Collection entomologique Ouellet-Robert, du Département de sciences biologiques, avec son million de spécimens représentant plus de 20000 espèces, dont 12000 québécoises, témoigne de la biodiversité de la faune entomologique passée et présente du Québec et d'ailleurs. Cette collection est la seconde en importance au Québec.
L'herbier Marie-Victorin, du Département de sciences biologiques, est entreposé à l'Institut botanique du Jardin botanique. Il regroupe plus de 750000 spécimens de plantes indigènes et exotiques.
La Collection d'objets ethnographiques, du Département d'anthropologie, compte 2500 artefacts rapportés de différents voyages d'études. On en voit quelques-uns ici. |
Le Service des livres rares et des collections spéciales, du Service des bibliothèques, comprend plus de 74 000 documents, dont des manuscrits, des incunables le plus ancien date de 1470 , quelques centaines de documents iconographiques et des livres d'artistes. Le fonds couvre tous les domaines depuis les débuts de l'imprimerie jusqu'à aujourd'hui. Il s'agit du troisième fonds universitaire en importance de ce type au Canada.
La Division des archives s'occupe de l'acquisition, du traitement et de la conservation de 627 fonds institutionnels et de 277 fonds privés spécialisés autant dans les arts que dans les sciences.
Pour plus d'information: http://www.expo.umontreal.ca/
1998-1999:
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