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Portrait de chercheur

32 ans, un labo tout neuf et déjà une réputation internationale

Pierre Moreau analyse la contraction et la dilatation des vaisseaux sanguins.

Pierre Moreau

Quand le rapide patineur des Boys de l'Université de Montréal s'élance vers lui à toute vitesse, au cours de son match de hockey hebdomadaire, le gardien de but Pierre Moreau sait qu'il peut faire face à un lancer frappé, un lancer du poignet ou une habile feinte. Pendant les deux secondes qui lui restent, il redresse les épaules, se cabre et prépare tout son corps à suivre la rondelle. Il doit être prêt à tout...

Le jeune chercheur n'a pas procédé autrement avant d'inaugurer l'an dernier son laboratoire de pharmacologie vasculaire, à la Faculté de pharmacie. Il était prêt à tout pour accéder aux ligues majeures et y demeurer. "Beaucoup de laboratoires sont lancés, mais ils disparaissent après quelques années, faute de fonds, explique-t-il. Dans le monde très compétitif de la recherche biomédicale, moi, j'ai voulu mettre toutes les chances de mon côté."

Ce n'est pas un mais deux diplômes d'études postdoctorales que le jeune homme a obtenus avant d'accepter l'offre de professeur adjoint à la Faculté de pharmacie. À 32 ans, son curriculum vitae fait mention de 36 articles publiés ou en préparation dans des revues savantes et de plusieurs prix. Le plus récent, le prix Jonathan-Ballon, lui a été décerné par la Fondation des maladies du coeur à titre de chercheur qui a reçu la plus haute cote pour un premier projet de recherche. Pierre Moreau, c'est déjà un nom connu à l'échelle internationale.

"C'est un chercheur extrêmement brillant qui sait faire des liens entre les différentes disciplines telles que la pharmacologie, la biochimie et la physiologie, commente le Dr Jacques de Champlain. De plus, c'est un excellent professeur. Cela en fait une étoile montante pour sa faculté et pour toute l'Université."

Selon le directeur du Groupe de recherche sur le système nerveux autonome et spécialiste de l'hypertension artérielle, les travaux du jeune homme sont voués à un bel avenir. "Si l'on connaît mieux les mécanismes qui régissent la dilatation et la contraction des vaisseaux sanguins, on ouvre la voie à de nouvelles médications", ajoute-t-il.

Remodelage de vaisseaux sanguins
Même s'il s'agit de recherche fondamentale, les travaux effectués dans ce laboratoire pourraient mener à la mise au point de nouveaux types de médicaments contre l'hypertension. "Les médicaments antihypertenseurs actuels parviennent à bien contrôler la pression dans les artères, explique Pierre Moreau, mais ils ne limitent pas toutes les complications. Par exemple, il reste une certaine prévalence d'accidents cérébro-vasculaires, infarctus, artériosclérose et insuffisance rénale malgré l'utilisation de ces médicaments sur une longue période."

L'hypertension ne tue pas. Mais elle force l'organisme à trouver des stratégies d'adaptation efficaces contre cette condition acquise. Dans le cas du système sanguin, la pression accrue force un remodelage des petits vaisseaux qui entraîne parfois une hypertrophie. "Nous ne savons pas si le remodelage hypertrophique est réversible, signale M. Moreau. Peu d'études portent là-dessus. Ce remodelage pourrait expliquer certaines complications de l'hypertension."

L'intérieur du vaisseau est tapissé d'une couche cellulaire appelée endothélium. Elle dégage de l'endothéline, un peptide responsable de la vasoconstriction, et de l'oxyde d'azote, qui produit la vasodilatation. On sait aussi que cette dernière molécule révèle des secrets qu'on commence à peine à exploiter. Entre autres, son rôle dans le remodelage vasculaire suscite l'attention des chercheurs.

"Par sa présence ubiquitaire et son influence marquée dans la physiologie vasculaire, l'oxyde d'azote possède un fort potentiel thérapeutique, écrit Pierre Moreau dans la présentation d'un projet de recherche. Mais il importe de mieux connaître son rôle physiologique et pharmacologique avant de pouvoir en exploiter les possibilités thérapeutiques maximales."

L'hypertension étant en expansion dans la population nord-américaine, vieillissante et sédentaire, les recherches du Laboratoire de pharmacologie vasculaire pourraient rendre de précieux services à la médecine. Mais comment ce laboratoire a-t-il vu le jour?

Créer un laboratoire aujourd'hui
Le laboratoire de Pierre Moreau, dans l'aile S du Pavillon principal, frappe d'abord par son aspect rutilant. Pas étonnant, tous les appareils, sauf un, ont été achetés en 1997. Mais le patron est aussi connu pour son sens de l'organisation et pour son inclination à la propreté. "Il faut dire que j'ai eu la chance de travailler dans deux laboratoires importants, en Suisse et ici même, et j'ai pu voir comment on s'y prenait pour diriger une équipe."

Cela dit, le chercheur s'est vite doublé d'un administrateur, même si aucun cours ne l'avait préparé à cette nouvelle fonction. Car diriger un laboratoire en 1998 signifie s'insérer dans une hiérarchie universitaire, gérer du personnel et administrer des sommes considérables. Plus de 100000$ par an.

La Faculté de pharmacie a octroyé au jeune chercheur une subvention de départ de 45000$ qui s'ajoutait à une bourse du Fonds pour les chercheurs et l'aide à la recherche totalisant 45000$ sur trois ans. Le Conseil de recherches médicales du Canada a aussi fait sa part en fournissant une somme de 60000$ pour l'achat de matériel ainsi qu'un montant annuel de 50000$ pour trois ans.

Puis, il a fallu trouver du personnel. "Je dois dire que j'ai été gâté de ce côté. Avant même d'obtenir la confirmation de mon financement, deux étudiants étaient prêts à me suivre. Ils me faisaient confiance."

À ces deux étudiants, Huy-Hao Dao et Christine Daigle, se sont ajoutés par la suite Chantal Chulak, Fabrice Martens et la technicienne Louise Grondin. Une nouvelle collaboratrice se joindra sous peu à l'équipe: Béatrice Demilliers, de l'Université de Montpellier.

Mathieu-Robert Sauvé


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