[page U de M][Accueil Forum][En bref][Calendrier][Vient de paraitre][Etudiants][Opinions]



Pierre Marc Johnson, écologiste international

L'ancien premier ministre a du succès chez les étudiants en droit.


Quand Pierre Marc Johnson a entrepris des négociations en vue de la signature d'un traité international sur la désertification, il connaissait déjà l'issue de l'entente. "Quand on s'engage dans un processus de négociation internationale, il faut avoir un consensus le plus large possible avant de commencer. Ce n'est pas par hasard si, dans une grande conférence comme celle de Rio, on assiste à des séances de signatures. Une armée de négociateurs ont travaillé dans ce but précis pendant des années."

L'ancien premier ministre du Québec, de passage à l'Université de Montréal à l'invitation de l'Association des étudiants en droit le 12 mars dernier, a pu constater qu'il était encore fort populaire dans son alma mater. Accueilli par une longue salve d'applaudissements, il a entamé sa conférence par des souvenirs de son passage au gouvernement provincial. "L'ultime rôle d'un député ou d'un ministre, c'est d'avoir un effet sur le cours des événements. En l'occurrence de faire adopter des lois. J'avoue que ça m'a manqué quand j'ai quitté la politique."

Le professeur de droit à l'Université McGill (également diplômé en médecine) se souvient notamment de la "séance du scotch", alors que les ministres, le greffier et quelques personnes triées sur le volet allaient faire signer un projet de loi chez le lieutenant-gouverneur après sa troisième lecture à l'Assemblée nationale. Formalité hautement rituelle, cette séance était toujours arrosée d'un petit verre..., sauf quand il s'agissait d'une loi d'urgence forçant le retour au travail d'un groupe de grévistes. Le représentant de la reine était alors tiré du lit en catastrophe et le groupe repartait aussi vite.

 

Un consensus méconnu

Au Québec, le système parlementaire a des atouts méconnus au chapitre de l'adoption de lois. "Le rôle de l'opposition est de critiquer le gouvernement. Or, dans les faits, l'immense majorité des lois sont votées à l'unanimité. Quand il s'agit de législation, le bien public l'emporte. C'est différent aux États-Unis, où le Sénat pratique carrément le troc: je vote pour ton projet d'amendement, mais tu votes pour ma réforme..."

Le conférencier a tenu à donner cet exemple pour dire que le principe du consensus existait aussi dans les négociations internationales. À une différence près: le temps d'exécution. "Au lieu de prendre six mois pour être adoptée, l'entente sur la désertification a pris cinq ans", dit M. Johnson, qui reconnaît être un peu plus impatient que ses collègues en matière de négociations.

Mais il faut dire que la désertification est un phénomène climatique très complexe qui touche plus de 900 millions d'habitants, principalement en Afrique, et qui met en scène plusieurs gros joueurs. Et comme le signale M. Johnson, les bons sentiments n'existent pas en politique. Quand un pays adhère à un traité, c'est qu'il a quelque chose à gagner. "Il y a toujours un intérêt national derrière la signature d'une entente internationale."

 

Passionné de politique internationale

Se disant passionné par son travail, M. Johnson apprécie particulièrement les rapports humains qu'il a tissés au fil des années. "J'ai des amis en Asie, en Afrique et en Europe. C'est très important d'aller voir ailleurs. Vous êtes la première génération à avoir le monde dans votre cour. Profitez-en."

Cela dit, il a laissé entendre que la diplomatie internationale n'était pas le secteur le plus payant pour les avocats. On réussit à faire rembourser ses dépenses, mais ce n'est pas avec ça qu'on paie le loyer.

À la courte séance de questions qui a suivi, les étudiants ont voulu connaître le rôle de M. Johnson dans le groupe de Lisbonne, dont il est l'un des membres fondateurs. Un autre a voulu savoir si la "séance du scotch" précédait ou suivait la signature des projets de loi.

Malheureusement, on n'a pas pu profiter de la présence de ce spécialiste de la mondialisation pour avoir l'heure juste sur l'Accord multinational sur l'investissement, qui menace des milliers d'emplois et risque d'écraser la souveraineté culturelle de plusieurs États. On aurait pu lui demander également si sa fameuse entente sur la désertification a donné des résultats concrets ou si les parties n'ont pas signé une coquille vide.

Il faudra réinviter M. Johnson.

Mathieu-Robert Sauvé


[page U de M][Accueil Forum][En bref][Calendrier][Vient de paraitre][Etudiants][Opinions]