L'analyse quantitative à l'heure de l'interdisciplinarité

Il est devenu pratiquement impossible de faire des études de deuxième et de troisième cycle sans une bonne formation en méthodes quantitatives puisque toute recherche comporte des statistiques ou des données quantitatives à analyser.

Cet aspect incontournable a fait que diverses méthodes quantitatives se sont développées en fonction des besoins particuliers de chaque discipline. Le problème, c'est que ce développement s'est fait de façon plutôt cloisonné. La Faculté des études supérieures cherche à briser ce cloisonnement en offrant depuis une dizaine d'années un séminaire d'intégration interdisciplinaire en méthodes quantitatives.

"Le but du séminaire est de sensibiliser les étudiants à des approches peu connues dans leur domaine, explique Jean Lambert, l'un des deux responsables du séminaire et professeur au Département de médecine sociale et préventive. Il y a trois grandes méthodes d'analyse quantitative, soit la biométrie, la psychométrie et l'économétrie, qui sont devenues des milieux fermés. En recherche, le plan d'analyse et l'approche sont établis en fonction du modèle et de l'outil que l'on connaît. L'échange de cultures statistiques permet alors aux étudiants d'enrichir leur bagage, de découvrir ce qui se fait ailleurs et d'élargir leurs horizons."

Contrer l'effet tunnel

Le cloisonnement des disciplines peut avoir un effet retardateur sur le développement des recherches puisqu'une méthode plus appropriée que celle connue pourrait être d'un grand secours.

"Certaines disciplines découvrent des méthodes qu'elles considèrent comme d'avant-garde alors qu'elles ont été élaborées il y a 20 ou 30 ans, fait valoir Clément Dassa, également de Médecine sociale et préventive et coresponsable du séminaire. Comme il est impossible d'acquérir tout ce qui se fait ailleurs - ce qui tuerait d'ailleurs le caractère particulier d'une discipline -, la transdisciplinarité du séminaire permet de contrer l'effet tunnel de la discipline."

Le séminaire de trois crédits, destiné à tout étudiant à la maîtrise ou au doctorat qui veut enrichir son arsenal de connaissances en analyse statistique, se présente sous forme de conférences données par une dizaine de spécialistes de chacune des méthodes présentées. Chaque année, le contenu est remis à jour et inclut même l'opposé des méthodes quantitatives, soit l'approche qualitative.

"Mais il ne s'agit pas d'un cours fourre-tout ni d'une initiation aux statistiques, précise Clément Dassa. Le séminaire est un cours-vitrine de niveau élevé qui vise à atténuer les craintes des étudiants à l'égard de ces méthodes quantitatives en leur offrant des outils abordables et en les incitant à utiliser les méthodes d'une autre discipline."

En ce sens, il s'agit d'un complément à la formation de base déjà offerte par chaque département.

Ce séminaire interdisciplinaire a vu le jour en 1988 à la suite des recommandations de trois comités, dirigés successivement par Jacques Henripin, Michel Trahan et Pierre Legendre, et mis sur pied pour examiner les façons de combler les besoins de formation intégrée en approche quantitative.

Les sujets abordés par les conférenciers prévus cette année couvrent un éventail très large: les méthodes linéaires, le plan et les effets d'échantillon, avec Jean Lambert; les régressions logistique et polytomique, avec Claire Durand (Sociologie); la méta-analyse, avec Michèle Rivard (Médecine sociale et préventive); l'analyse de survie, avec Jean Renaud (Sociologie); les séries chronologiques, avec Alain Latour (UQAM, Mathématiques); l'analyse des correspondances et les classifications, avec Robert Latour (HEC); la modélisation par équations structurales, l'analyse en composantes principales et l'analyse factorielle, avec Clément Dassa; l'analyse canonique et l'analyse spatiale, avec Pierre Legendre (Biologie); la recherche qualitative, avec Jean-Marie Van der Maren (Éducation).

Le séminaire se déroule du 5 mai au 23 juin, à raison de deux rencontres par semaine, les mardis et jeudis après-midi. Même les professeurs sont invités à assister aux conférences de leurs collègues.

Daniel Baril