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Géomatique: nouveau laboratoire de recherche

De l'industrie forestière à l'urbanisme, la modélisation a fait naître une nouvelle branche en géographie.

Le Département de géographie vient de se doter d'un deuxième laboratoire de géomatique. Après l'ouverture d'un premier laboratoire consacré à l'enseignement de cette discipline en 1994, les responsables du Département convenaient qu'il en fallait maintenant un second consacré à la recherche.

"La géomatique est l'analyse des phénomènes liés à la géographie physique et humaine à l'aide de la technologie numérique", explique la professeure Danielle Marceau, codirectrice du Laboratoire de géomatique et d'analyse spatiale avec Marie-Josée Fortin.

"Le mot 'géomatique' est un néologisme québécois créé il y a une dizaine d'années, mais la discipline a vu le jour dans les années 1970 avec le début de la télédétection. Elle est en plein essor grâce notamment à l'arrivée d'ordinateurs puissants et de logiciels très performants. À l'Université de Montréal, on l'enseigne depuis quatre ans."

Les outils privilégiés des "géomaticiens" sont les photos aériennes ou satellites, mais ils peuvent aussi recourir, selon les besoins, à des plans de villes, des cadastres, des données démographiques, etc. La numérisation de ces documents à l'aide de logiciels spécialement conçus pour cette discipline permet d'obtenir une foule de renseignements qui autrement demeuraient difficilement accessibles, voire complètement inaccessibles.

Une photo satellite d'une région peut par exemple contenir plusieurs niveaux spectraux d'observation. Chaque niveau livre de l'information différente sur la région observée qui peut être réduite à un immeuble ou à un arbre précis.

Industrie forestière et urbanisme

Pour comprendre l'information contenue dans de telles photos, il faut dans bien des cas produire ses propres logiciels d'analyse. C'est d'ailleurs l'une des tâches des chercheurs en géomatique. On veut par exemple en arriver à pouvoir reconnaître, par photo aérienne ou satellite, les essences précises d'arbres couvrant une région ou encore déterminer précisément la biomasse. "Les instruments actuels qui permettent de distinguer les feuillus des conifères ne sont pas suffisamment performants pour aller plus loin", signale Mme Marceau.

De tels outils seraient très utiles pour l'industrie forestière et les municipalités ou même pour la gestion des parcs et de la faune.

La technologie avance rapidement de ce côté, comme on a pu le voir l'automne dernier avec le reportage sur la fameuse caméra de la Sûreté du Québec capable de déceler quelques plans de "pot" au coeur d'un champ de maïs. Cette caméra est d'ailleurs l'oeuvre d'un ancien étudiant du Département de géographie.

Le Département a également conçu, pour un projet pilote avec la ville de Saint-Eustache, un logiciel d'analyse de l'évolution de l'utilisation du territoire de la municipalité. Les données cadastrales, celles sur les zonages et le développement de l'urbanisation ont été numérisées dans un logiciel permettant de poser des questions sur un endroit précis du territoire et d'observer l'évolution de l'occupation du sol.

Cette application connaît présentement un nouveau développement dans le cadre d'un second projet de même nature sur la rive nord de Montréal. "À partir de photos prises à intervalles de 10 ans et couvrant les 40 dernières années, nous voulons mettre au point un logiciel d'analyse spatiale pouvant produire des scénarios illustrant le développement entre deux intervalles", explique Danielle Marceau.

Grâce à différents repères, comme les données concernant la construction d'une autoroute, le logiciel devrait pouvoir illustrer le changement produit dans la trame urbaine par l'arrivée de ce nouvel élément. "Cet outil permettra non seulement d'observer où et comment se sont faites les modifications, mais aussi d'obtenir de l'information sur la dynamique même du changement. Éventuellement, nous serons en mesure de prédire les changements dans des conditions similaires."

Hydro-Québec

Sur le plan de la recherche appliquée, un projet actuellement en cours au Laboratoire de géomatique porte sur le contrôle de la végétation sous les lignes de transport d'électricité, en collaboration avec Hydro-Québec.

"À l'aide de photos prises aux cours des 20 dernières années, on pourra observer et mesurer l'impact de la coupe et du recours aux défoliants pour contrôler cette végétation, précise Mme Marceau. On pourra répertorier les essences végétales qui se sont développées au cours de ces années et préparer le passage à des méthodes plus économiques et plus écologiques, comme l'utilisation de plantes ralentissant le reboisement. Nous produirons également des cartes désignant les zones sensibles, comme celles près des cours d'eau ou des terres d'élevage."

Des procédés semblables peuvent également être utilisés pour observer la régénération d'une forêt après un incendie, ce sur quoi travaille d'ailleurs un étudiant à la maîtrise qui cherche à déterminer l'impact, sur le reboisement, des îlots d'arbres ayant survécu au sinistre.

Présentement, le Laboratoire de géomatique et d'analyse spatiale accueille une douzaine de chercheurs, incluant les étudiants des deuxième et troisième cycles, les assistants de recherche et les chercheurs postdoctoraux. Certains étudiants proviennent d'autres secteurs que la géographie, notamment la biologie et l'aménagement.

Un chercheur de l'Université Victoria, Geoffrey Hay, est également du nombre, profitant d'un projet de collaboration entre les deux universités sur les méthodes de télédétection spécialisées pour la forêt.

Un colloque international sur le thème de la modélisation forestière aura d'ailleurs lieu les 19 et 21 mars prochains sous les auspices du Département de géographie. De 75 à 100 spécialistes provenant du Canada, de la France et des États-Unis y sont attendus.

Daniel Baril


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