Denise Couture critique la sociologie de la santé. |
Devant des pratiques comme l'excision, les Canadiens sont souvent désorientés: comment faire comprendre à des immigrants que cette mutilation est inacceptable chez eux?
"Au cours d'une conférence sur le sujet à laquelle j'assistais, explique Denise Couture, on en est venu à la conclusion que nul ne peut imposer à l'autre sa conception des relations hommes-femmes, du pouvoir ou de la culture. Mais on peut cependant dire que telle chose est mauvaise pour la santé! Il s'agit d'un concept culturellement neutre."
Pour la sociologue, qui révélait cette anecdote au cours d'une rencontre-midi au Groupe de recherche sur les aspects sociaux de la santé et de la prévention (GRASP) le 19 septembre dernier, il s'agit pourtant d'une fausse neutralité. "C'est qu'il est plus facile d'aborder le sujet sous cet angle que sous celui des relations hommes-femmes. Qui peut se dire "contre" la santé?"
Dans une société de plus en plus tournée vers ce que la conférencière nomme la PPE (petite petite entreprise, c'est-à-dire soi-même), on est passé d'un droit aux services de la santé à un "droit à la santé" qui soulève des interrogations. L'une de celles-ci est de considérer la médecine comme infaillible et le corps humain comme une machine qu'on doit pouvoir réparer au besoin.
Des auditrices ont réagi vivement à certains propos de la conférencière, notamment quand elle a laissé entendre que les chercheurs en sciences sociales se nuisent à eux-mêmes. "À vouloir prêcher les facteurs psychosociaux de la maladie, à vouloir les traduire sur le plan politique, on est en train de scier la branche sur laquelle on est assis", a dit Mme Couture.
Pour de nombreux chercheurs dans le domaine en question, a soutenu une auditrice, l'observation et l'analyse de certains phénomènes reliés à la santé ont peut-être une influence sur ces phénomènes, mais cela contribue à l'avancement des connaissances. "Oui, faisons des sciences sociales, a justifié la sociologue, mais réfléchissons en même temps à l'impact de nos recherches."
Une quarantaine de personnes (dont à peine sept hommes incluant le modérateur) assistaient à cette rencontre qui avait pour thème: la santé est-elle une illusion d'optique?
M.-R.S.