Toute la matière
absorbée par les étudiants dans les cours théoriques
a une valeur incontestable, mais l'écart avec la réalité
dans le milieu de travail peut parfois être troublant. De
là est née la méthode des cas, que l'École
des Hautes Études Commerciales s'emploie à mieux
faire connaître grâce à une vidéocassette.
Ce nouvel outil, élaboré conjointement avec le Service
d'aide à l'enseignement de l'Université de Montréal,
comble une lacune dans les documents disponibles sur le sujet
en illustrant de façon concrète le fonctionnement
de cette méthode dans une situation réelle d'enseignement.
Un guide a été édité pour compléter
l'information contenue dans la cassette vidéo de 83 minutes.
Conçue en 1914 à la Business School de l'Université
Harvard, la méthode permet à des étudiants
d'élaborer un mode de réflexion les aidant à
aborder, analyser et tenter de résoudre des problèmes
existant en entreprise. «En fait, elle permet d'appliquer
dans le réel la théorie acquise durant sa formation»,
explique Jean-Marc Leclerc, du Bureau d'aide à l'enseignement
et coproducteur de la vidéocassette.
Pour susciter la réflexion, on expose aux participants
un problème réel survenu dans une entreprise et
on leur demande ce qu'ils auraient fait à la place de la
personne devant le régler. Les étudiants se font
leur propre opinion, puis débattent de leurs idées
en petits groupes avant de se retrouver en classe.
Ce genre d'approche engage les participants dans une réflexion
on ne peut plus profonde. Le professeur intervient peu. Les opinions
s'aiguisent. Les esprits forts croisent le fer. Tous y gagnent.
La méthode des cas peut tout aussi bien être employée
en administration qu'en droit, en médecine et dans tout
autre domaine où l'on souhaite acquérir des habiletés
pour analyser une situation conflictuelle ou problématique.
La vidéocassette réalisée par les HEC expose
un cas classique, celui de la société Perkins où
le directeur de l'usine doit décider s'il va aller voir
ou non le président de l'entreprise pour lui faire part
d'un conflit entre les deux vice-présidents.
Les différentes séquences nous montrent tantôt
des simulations du conflit, tantôt les échanges entre
étudiants, plus particulièrement un groupe de quatre.
Ces derniers, des dirigeants d'entreprise, et le professeur du
cours Habiletés de direction, Laurent Lapierre, sont aussi
interviewés, qui pour dire ce qu'il pense de cette méthode
d'enseignement, qui pour expliquer sa préparation de cours.
«La fin de la rencontre ne signifie pas celle de la réflexion,
dit M. Lapierre en entrevue à Forum. En fait, la réflexion
n'est jamais terminée. On peut se servir de cette méthode
pour réfléchir sur toutes sortes de situations réelles.
Elle favorise un plus grand réalisme et aide à se
préparer à l'action.»
Dans la vidéocassette, M. Lapierre insiste sur le rôle
important du professeur, même si ses interventions sont
réduites au minimum. Il doit être un metteur en scène,
essayer de se mettre dans la peau de chaque étudiant qui
prend la parole, créer un climat de confiance pour susciter
les échanges, quitte à voir ses propres réflexions
contestées.
C'est ce qu'on voit d'ailleurs dans le document lorsqu'un étudiant
le contredit. M. Lapierre ne s'en offusque pas, au contraire.
«Les étudiants doivent pouvoir prendre des risques»,
dit-il.
«C'est une méthode très socratique. Les étudiants
constatent qu'ils font face à un problème complexe»,
ajoute Jean-Marc Leclerc.
Bien qu'il utilise cette méthode depuis une vingtaine d'années,
M. Lapierre en tire toujours un enrichissement pour sa propre
pédagogie. «Je réapprends sans cesse, dit-il.
Les étudiants qui ont 20 ans en 1997 ne sont pas les mêmes
que ceux qui avaient 20 ans en 1987. Chaque fois, je m'enrichis
sur le plan pédagogique.»
Le document, comprenant le guide et la vidéocassette, est
vendu 45 $ à la coopérative des HEC, 3000, chemin
de la Côte-Sainte-Catherine; tél.: 340-6400.
André Duchesne
Jean-Marc Leclerc,
Laurent Lapierre et Alice Reboh-Razan, La méthode des
cas, Guide d'accompagnement, Montréal, École
des Hautes Études Commerciales, 1996, 147 pages.