Les grands airs d'amour
de Mozart, Bizet, Ravel et Charpentier sont bien connus mais leurs
arias d'humour, beaucoup moins. Ils en ont pourtant écrit
plus que l'on pense. Un groupe d'étudiants de la Faculté
de musique, réunis sous l'appellation pleine d'espoir des
«Voix de demain», ont voulu remédier à
la chose. Ils ont monté eux-mêmes un spectacle de
près de trois heures qui a fait salle comble pendant cinq
soirs à la Butte Saint-Jacques. Salle comble et... comblée.
Digne des bons numéros du Festival de l'humour, «Le
chant et son humour» a conquis l'auditoire du 25 janvier,
parmi lequel se trouvait Forum. Ont été particulièrement
applaudies les apparitions des duos Martin Dagenais-Geneviève
Charest dans le délirant Duo de l'âne et René
Voyer-Christiane Jean dans L'amour est enfant de Bohème,
où l'homme était joué par la femme et inversement.
Pas triste, non plus, celui où Christiane Jean et Geneviève
Charest interprétaient Les voix rivales, de Luigi Bordès.
La rivalité des divas marque l'histoire lyrique. Cette
page met en scène une mezzo qui fait valoir les richesses
de son timbre, ô combien plus intéressantes que les
fioritures sans profondeur de la soprano.
«La musique classique, ça peut être léger,
fou, et nous aimons beaucoup cet aspect, explique Chantal Richard,
qui est à l'origine de cette initiative. Et c'était
important, pour nous, d'élargir l'auditoire traditionnel
de cette musique dite sérieuse.»
Andrée Cléroux, Christiane Jean et Bethzaïda
Thomas se sont immédiatement engagées dans le projet
qui, vraisemblablement, répondait à un besoin. «Le
spectacle s'est presque monté tout seul, confie Mme Richard.
Nous avons réuni quelques personnes sachant jouer la comédie
et chanter (deux qualités essentielles), et le pire était
fait. À partir de ce moment-là, chacun a suggéré
des pièces qu'il était intéressé à
interpréter. La mise en scène a été
une affaire collective.»
Signe de la polyvalence des musiciens, la sélection finale
offre un intéressant panorama des différents styles:
baroque (Charpentier), classique (Mozart), romantique (Rossini),
moderne (Ravel, Poulenc) et contemporain (Daunais), sans oublier
quelques incontournables de Jacques Offenbach. Il faut noter la
participation des deux pianistes joviales et compétentes
qui se relayaient pour accompagner les chanteurs: Nathalie Doucet
et Nancy Pelletier.
Pour Chantal Richard, qui a elle-même brillamment incarné
une vamp qui a un peu trop bu, l'expérience acquise dans
l'élaboration de ce spectacle a une valeur certaine. «C'est
important, je crois, pour les gens de notre génération
d'avoir la capacité de se produire eux-mêmes. Parce
que si l'on attend toujours les initiatives des autres, on peut
attendre longtemps.»
On espère que ce spectacle original trouvera maintenant
preneur dans de petites salles ou dans le réseau des maisons
de la culture. Des négociations sont en cours.
Outre les étudiants précités, Julien Patenaude,
Patrick Magny, Patrick Mallette, Suzanne Bouchard, Chantal Dionne,
Nicolas Lemieux et Dion Mazerolle complétaient la distribution.
Malheureusement, ce dernier a attrapé une vilaine grippe
qui l'a empêché de donner le dernier spectacle. Martin
Dagenais a dû le remplacer à pied levé.
L'animation a été confiée à Roger
Castonguay, qui a accompli un excellent travail.
Mathieu-Robert Sauvé