Trois partenaires s'associent à l'U de M pour créer
la première chaire du genre en Amérique du Nord.
Le paysage n'est pas
qu'un lieu bucolique et verdoyant. Il est autant composé
d'arbres que de pylônes, de sentiers que d'autoroutes. Et
c'est en fonction de cette globalité qu'il sera étudié
à la Chaire en paysage et environnement, inaugurée
le 12 novembre.
Il s'agit de la première structure de recherche universitaire
spécialisée dans le domaine du paysage en Amérique
du Nord; son inauguration a eu lieu en présence du recteur
René Simard, du doyen de la Faculté de l'aménagement,
Michel Gariépy, et du titulaire
Philippe Poullaouec-Gonidec, professeur à l'École
d'architecture de paysage. Il s'agit de la 15e chaire de l'Université
de Montréal, a souligné le recteur.
Le ministère des Transports, Hydro-Québec et la
société d'affichage Omni sont associés au
projet et y investiront un montant minimal de deux millions de
dollars au cours des cinq prochaines années.
«La mission de notre chaire est d'aider à construire
des paysages en fonction d'une identité locale, de mettre
en valeur les régions. Il faut voir le paysage avec ses
composantes culturelles, sociales et politiques», explique
Philippe Poullaouec-Gonidec.
Naturel, rural ou urbain, le paysage est associé à
une région et compte des éléments d'architecture.
Loin d'être statique, il est «un facteur essentiel
de développement pour les territoires urbains et ruraux
qu'il importe de reconnaître dans toutes les initiatives»,
poursuit le titulaire.
Dans cette perspective, le paysage est sujet à de constantes
mutations et soumis à toutes sortes de pressions: développement,
préservation du patrimoine et de l'environnement. Le rôle
de la chaire sera d'acquérir une expertise et d'élaborer
des modes d'intervention au regard de tous ces facteurs et de
l'aménagement du territoire.
Deux axes de recherche seront privilégiés. En premier
lieu, on effectuera des travaux exploratoires dans des domaines
aussi variés que la lecture et la classification des paysages
québécois, l'écologie des paysages, la notion
de projets d'aménagement et bien d'autres.
En second lieu, des
recherches permettront d'établir un savoir-faire répondant
aux préoccupations plus particulières des partenaires
de la Chaire. Un bon exemple est celui du projet de recherche
entrepris dès cette année pour aider Hydro-Québec
à se doter d'un réseau aérien s'harmonisant
mieux au paysage en milieu urbain.
De son côté, le ministère des Transports a
mandaté la Chaire pour qu'elle étudie et suggère
des solutions afin d'améliorer la qualité paysagère
des routes principales par lesquelles on entre au Québec.
Autre champ d'intervention de la Chaire: la sempiternelle question
de l'étalement urbain, phénomène qui donne
des boutons aux écologistes. Pour Philippe Poullaouec-Gonidec,
il faut considérer la banlieue comme une ville et la traiter
en conséquence.
«On ne voit que des défauts à la banlieue,
dit-il. Ce qu'il faut, c'est s'intéresser aux composantes
esthétiques irritantes, les étudier et passer aux
actes pour les transformer en espaces positifs.»
Le meilleur exemple pour illustrer son propos est sans doute venu
de la vice-rectrice aux affaires publiques de l'Université,
Claire McNicoll, qui, en animant la conférence de presse,
a évoqué la question du très chic boulevard
Taschereau, cette balafre dans le tissu urbain de la rive-sud
montréalaise.
Pour en arriver à des résultats tangibles, il faudra
donc, dans chaque cas, arrimer les intérêts de différents
partenaires et représentants de milieux concernés.
Il faudra également une bonne dose de volonté, tant
politique qu'économique.
Sur ce point, le titulaire n'est pas inquiet. Si des partenaires
tels Hydro-Québec, Omni et le ministère des Transports
s'associent à ce projet, c'est parce qu'ils sont prêts
à modifier leurs pratiques dans une perspective de développement
durable, croit-il.
Enfin, la Chaire poursuivra un volet de diffusion d'information.
On y créera un observatoire des paysages québécois,
soit un fonds documentaire iconographique et photographique. Une
banque de données, incluant des renseignements généraux
et des références sur le paysage, sera accessible
au grand public par le réseau Internet.
André Duchesne