Elle relèvera dorénavant des commissions scolaires.
Devant le souhait exprimé
par les commissions scolaires de favoriser une participation accrue
du personnel à l'encadrement des futurs professeurs, la
formation des formateurs de stagiaires est en voie de se décentraliser.
Ce projet, offert uniquement à l'Université de Montréal
et à l'Université du Québec à Trois-Rivières,
en est à sa première année. À l'U
de M, il regroupe 49 représentants d'une dizaine de commissions
scolaires de la grande région montréalaise et de
quelques écoles privées.
Les futurs enseignants aux niveaux primaire et secondaire et en
orthopédagogie doivent faire un baccalauréat de
quatre ans durant lequel ils réalisent 700 heures de stage.
Jusqu'à maintenant, les titulaires des classes (les formateurs
de stagiaires) venaient à l'Université sur une base
volontaire et recevaient une formation leur permettant de mieux
encadrer les stagiaires.
Selon la nouvelle formule mise en place, ce sont des enseignants
désignés par les commissions scolaires qui viennent
acquérir une formation un peu plus poussée à
l'Université et qui retournent dans leur milieu afin de
former les formateurs de stagiaires.
En d'autres mots, l'Université forme des gens qui vont
former des enseignants qui accueillent et encadrent un stagiaire
dans leur classe.
Est-ce à dire que les représentants des commissions
scolaires sont mieux placés que ceux de l'Université
pour donner cette formation? Nicole Morency, Nicole Fortin et
Colette Gervais rigolent. «Avec 1300 étudiants inscrits
dans nos cours et le désir manifesté par les commissions
scolaires pour être davantage engagées dans la formation,
cette formule satisfait aux besoins», répond Nicole
Morency.
Cette dernière, comme Nicole Fortin, est coordonnatrice
des stages. Colette Gervais ainsi que Lorraine Lamoureux sont
professeures à la Faculté des sciences de l'éducation.
Ce sont ces quatre femmes qui ont structuré la nouvelle
formule et qui donnent la formation à l'Université.
Le contenu de la formation est varié: comment animer un
groupe, quel genre de questions il faut poser, comment préparer
les programmes, etc. À leur tour, les professeurs doivent
savoir comment accueillir les stagiaires, comment les encadrer,
les évaluer, leur donner une appréciation (feed-back)
sur leur rendement dans la classe.
La formule est construite de façon à dynamiser la
formation. Les 49 personnes envoyées par les commissions
scolaires sont formées à l'Université et
commencent en même temps à former leurs propres groupes.
Nos trois interlocutrices reconnaissent que leurs 49 «étudiants»
devront établir leur crédibilité auprès
des formateurs de stagiaires. Certains enseignants accueillent
des stagiaires depuis plusieurs années déjà
et peuvent voir d'un mauvais oeil qu'un collègue vienne
leur expliquer comment peaufiner leur encadrement.
La formation des formateurs est d'une durée de 14 jours
complets répartis sur deux ans. Ces rencontres représentent
un lieu d'échanges privilégié. Les participants
peuvent y partager leur interprétation d'un problème
qu'ils ont eu à résoudre en cours de route. Comme
il n'y a pas de méthode unique de résolution, ces
échanges ouvrent des horizons nouveaux, pour ne pas dire
insoupçonnés.
Ce projet ajoute un échelon au processus de formation des
enseignants qui accueillent des stagiaires dans leur classe. Comme
la structure s'alourdit, les responsables sont conscientes qu'elles
devront en évaluer la portée.
Il y a cependant des avanta-ges. «C'est en appliquant cette
formule qu'on va réussir à mieux faire comprendre
que la formation des formateurs de stagiaires doit nécessairement
passer par les commissions scolaires», dit Colette Gervais.
De plus, les enseignants encadrant un stagiaire qui ont un problème
à résoudre pourront s'adresser directement à
une personne-ressource dans leur école ou dans leur commission
scolaire.
André Duchesne
Décentraliser la formation des formateurs de stagiaires
suscite un grand intérêt chez les professeurs d'école.
Ces derniers se sentent plus engagés dans le processus
et peuvent échanger leurs idées sur les méthodes
d'encadrement.
C'est ce qu'indique Jean-Bertrand Beaudry, superviseur de stages
à l'U de M et professeur à l'école secondaire
Jacques-Rousseau de Longueuil, où il dirige un groupe de
14 enseignants qui reçoivent des stagiaires dans leur classe.
«Ces enseignants me disent qu'ils sont heureux du processus,
car pour une fois ils ont l'occasion de s'arrêter et de
discuter de leurs pratiques. Ils ont tout intérêt
à offrir le meilleur encadrement possible à des
stagiaires qui, dans deux ans, seront leurs collègues de
travail», explique ce dernier.
M. Beaudry n'a pas noté de réticence chez les pairs
qu'il doit encadrer. Au contraire, il note «une participation
plus grande» de leur part. «Certains ont même
modifié leurs pratiques», dit-il.
Les professeurs apprécient le fait d'interagir directement
avec un formateur qui se trouve à l'intérieur de
leur établissement. «S'ils ont à donner une
appréciation négative à un stagiaire et se
demandent comment s'y prendre, ils savent où s'adresser
et peuvent aussi en discuter entre eux, ajoute M. Beaudry. Cette
formation permet de briser l'isolement que vivait autrefois le
professeur avec son stagiaire.»