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Guide pour coopérants et Don Quichotte

Un étudiant en médecine, Alexandre Chouinard, lance un guide pour stagiaires
dans les pays en développement.


Si vous voulez partir pour sauver le monde, pour impressionner vos amis ou [pour] faire peur à votre mère, repensez bien à votre affaire ou bien donnez ce livre à quelqu'un d'autre.»

C'est l'un des premiers conseils que donne Alexandre Chouinard, dans son guide Stagiaires sans frontières, à ceux qui voudraient tenter l'aventure d'un stage au tiers monde. Étudiant à la Faculté de médecine, il a eu l'idée de produire ce guide pour financer un stage de formation en médecine familiale qu'il doit entreprendre l'été prochain à l'hôpital universitaire de Santiago du Chili.

Des centaines d'étudiants universitaires, dont plusieurs dizaines de l'Université de Montréal, partent comme lui chaque année pour vivre une expérience de coopération internationale ou un séjour d'études à l'étranger et ce guide fourmille de renseignements à leur intention.

Une riche expérience

«Je voulais écrire depuis longtemps sur mes expériences de coopération dans les pays du tiers monde et le besoin de financement de mon prochain stage m'en donnait l'occasion», déclare l'étudiant.

Il s'est intéressé à la coopération internationale dès l'école secondaire en participant à des projets de correspondance avec des élèves de l'Asie organisés par la fondation de médecins Parrainage international. Il a également à son actif trois séjours en Amérique latine. Un premier stage au Mexique l'a conduit au Chiapas en 1990 comme bénévole dans un hôpital autochtone. Il y est retourné l'année suivante pour participer à la construction d'un aqueduc dans un village. En 1994, il se rendait au Nicaragua, avec l'organisme Outils de paix, pour aider à la construction d'une école et tourner un vidéo destiné aux écoles primaires d'ici.

«Avant mes études en médecine, j'ai fait un bac en études hispaniques», précise-t-il, ce qui l'a grandement aidé pour ses stages dans ces pays latino-américains. Alexandre Chouinard a également séjourné deux mois à Povungnituk pour étudier l'histoire de la «médecine blanche» chez les Inuit.

C'est donc riche d'une solide expérience que l'étudiant s'est attaqué à la réalisation de ce guide très complet auquel il a consacré tous ses temps libres depuis janvier dernier. Bénéficiant au départ d'une subvention de l'Association des étudiants et étudiantes de médecine, il a réalisé lui-même toutes les étapes de la production: recherche, contact avec personnes-ressources, sollicitation de commanditaires, écriture, mise en pages, etc.

Étant destiné en premier lieu aux étudiants de l'Université de Montréal, ce guide renferme toutes les ressources que l'on peut trouver à l'U de M concernant le tiers monde: non seulement les groupes de recherche ou les unités comme le Bureau de la coopération internationale ou le Centre d'études de l'Asie de l'Est, mais également tous les professeurs qui s'intéressent au tiers monde - avec leurs champs d'intérêt - ainsi que tous les cours ou programmes offerts à l'Université en lien avec les questions internationales.

Ajoutez à cela les organismes extérieurs à l'Université, ce sont au total 125 personnes et organismes-ressources, 130 cours, autant d'adresses Internet et de suggestions de lecture, sans oublier les conseils, trucs pratiques, idées de financement et témoignages de stagiaires que l'on retrouve dans le guide.

Don Quichotte

L'intérêt du guide ne s'arrête pas à ces renseignements d'ordre pratique. Alexandre Chouinard a tenu à y inclure sa philosophie de la coopération en précisant, dans son introduction, la différence entre charité et solidarité.

«La charité n'est pas la meilleure façon d'aider puisqu'elle place les pays en développement en situation de dépendance, écrit-il. Une fois l'aide terminée, la misère revient en force. La solidarité, par contre, en visant la compréhension entre les peuples, l'appui mutuel et l'enrichissement de chacun, a pour but un développement durable et propose un échange, un dialogue, une écoute des besoins du milieu; une approche, somme toute, beaucoup plus respectueuse de l'autonomie des peuples.»

Le personnage de l'oeuvre de Cervantès, don Quichotte, sert à la fois de modèle et d'antihéros pour l'apprenti coopérant. Un modèle par l'idéalisme qui l'anime dans sa lutte contre l'injustice et la violence. Sans cet idéalisme, on est condamné à l'immobilisme, signale l'auteur.

Don Quichotte représente également les erreurs à éviter pour le coopérant. «L'utopie peut être dangereuse», prévient-il. Une des erreurs de don Quichotte est «de ne pas prendre le monde pour ce qu'il est. Il ne s'attaque pas aux bonnes cibles et son chemin ne mène nulle part.»

C'est pourquoi Alexandre Chouinard insiste sur la nécessité, pour le stagiaire, de prendre conscience de ses limites et de ses motivations, sinon l'aventure peut tourner au cauchemar. Pour cela, «il faut se préparer un an d'avance», affirme-t-il. «Le stagiaire doit s'informer sur le pays où il va, connaître son histoire, sa situation actuelle, sa langue et même rencontrer ici des ressortissants du pays afin de savoir à quoi s'attendre.»

Stagiaires sans frontières est donc tout autant un guide de réflexion qu'un guide pratique. Il est en vente aux librairies et au café étudiant «L'Intermed».

Daniel Baril

Alexandre Chouinard, Stagiaires sans frontières, Montréal, Éditions L'Hirondelle, 1996, 186 pages.


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