Le programme de départ volontaire viserait
à fermer 186 postes de professeurs.
En recommandant l'abolition
de 174 postes de professeurs réguliers pour économiser
13 millions de dollars, le Groupe de réflexion sur les
priorités institutionnelles (GRÉPI) a fait grimper
à 362 le nombre de professeurs dont l'Université
doit se départir d'ici l'exercice financier de 1998-1999
(le document «Balises» prévoyait déjà
l'abolition de 188 postes).
Mais cela ne veut pas dire qu'il faudra remercier 362 professeurs.
Selon les calculs et projections que le vice-recteur aux ressources
humaines, Michel Trahan, a présenté à l'Assemblée
universitaire, un peu moins de la moitié de cet objectif,
soit 166 retraits, sera atteint par attrition. Si bien qu'il reste
186 départs à susciter.
«Déjà 87 postes ont été supprimés
par des retraites et des départs volontaires depuis l'exercice
1995-1996, explique le vice-recteur. Quarante-neuf autres ont
pour leur part annoncé leur retraite d'ici deux ans. De
plus, une vingtaine de professeurs quittent l'Université
chaque année pour des raisons autres que la retraite, ce
qui signifie 40 départs volontaires pour les deux prochaines
années.»
En additionnant le tout, on arrive à 166 départs
escomptés d'ici la fin de l'exercice financier 1998-1999.
Au terme de l'opération, le nombre de professeurs réguliers
à l'Université de Montréal sera de 1324.
Il s'agit d'une diminution de 19 % par rapport aux effectifs de
1994-1995. «Mais, ajoute M. Trahan, si l'on compare la situation
avec celle d'avant les ententes de planification de 1986, il s'agit
de 47 postes de moins. Ces ententes, rappelle-t-il, visaient à
renouveler le corps professoral en devançant les départs
pour cause de retraite.»
Comme mesure compensatoire, une centaine de postes de chargés
de cours seraient créés à partir des économies
engendrées par la diminution de l'offre de cours. Cela
fera passer de 38 % à 46 % le taux de chargés de
cours dans l'ensemble du personnel enseignant.
Toujours selon le vice-recteur, l'objectif de 186 départs
à susciter peut être atteint par un programme de
préretraite volontaire. «En nous basant sur des programmes
semblables ailleurs, nous estimons qu'un taux réaliste
d'acceptation d'un tel programme serait de 35 % à 40 %.
Il a été de 51 % à Concordia et de 22 % à
Polytechnique», précise-t-il.
Pour que ce taux d'acceptation se traduise par 186 départs,
le programme devra être offert aux 500 professeurs âgés
de 55 ans et plus.
L'objectif de réduction du corps professoral apparaît
donc comme «globalement faisable» aux yeux de Michel
Trahan. Toutefois, des difficultés pourront surgir dans
certaines unités, où le nombre de professeurs demeurera
trop élevé ou passera sous le seuil minimal souhaité.
«Ces cas seront traités comme des exceptions»,
s'est limité à dire le vice-recteur. Sans donner
de chiffres, il estime à partir de son scénario
que ces cas exceptionnels demeureront très limités.
Académie de vacataires
Si l'objectif fixé par le GRÉPI est réalisable
en termes comptables, les membres de l'Assemblée universitaire
(AU) n'ont pas pour autant abondé dans le sens du rapport.
Paul Bernard, qui a présenté le rapport au nom du
Groupe, a reconnu qu'une réduction de près de 20
% du corps professoral risquait d'être «néfaste
pour l'U de M, pour le réseau universitaire québécois
et pour l'ensemble de la société» et qu'il
ne s'attendait dons pas à en tirer gloire et honneur.
André Tremblay, président du syndicat des professeurs,
a déploré que les membres de l'AU n'aient qu'un
rôle de figurants limités à faire du lipsing.
À son avis, la charte de l'Université n'a pas été
respectée puisque le mandat accordé au GRÉPI
aurait dû revenir au Comité de la planification.
«Un grand nombre de professeurs sont en colère parce
qu'ils n'acceptent pas le modèle entrepreneurial qui ne
valorise que la recherche lourdement subventionnée. Les
professeurs de premier cycle se sentent outrés et méprisés
par ce modèle. La philosophie du GRÉPI est celle
d'une académie de vacataires, a-t-il encore ajouté.
Un choix que l'on risque de regretter plus tard.»
Denise Couture, du Département de sociologie, s'est elle
aussi inquiétée de l'avenir de la profession d'enseignant.
Elle dit craindre la disparition de la classe comme lieu d'apprentissage
et sa transformation en téléuniversité si
la tâche pédagogique est confiée à
des vacataires.
Jean-Guy Loranger, du Département de sciences économiques,
a déploré pour sa part la vision comptable qui ne
tient pas compte du capital humain et des coût sociaux inacceptables
qu'entraîneront ces mesures «précipitées».
«Doit-on toujours céder aux contraintes financières?
s'est-il demandé. Pourquoi se mettre nous-mêmes la
tête sur le billot?» Il suggère même
d'examiner l'option de l'endettement comme solution aux réductions
de personnel. «Est-on si sûr que cette voie serait
rejetée par le gouvernement?»
Étant donné l'importance du dossier, les membres
de l'Assemblée poursuivront son étude au cours d'une
session extraordinaire le 7 octobre prochain.
Daniel Baril