Le Service des archives traque les documents, partout où
ils se trouvent...
C'est le monde à l'envers
au Service des archives. Le personnel est parti en safari-paperasse
dans tout le campus. Résultat, la collecte et le traitement
des données se portent bien et l'on a constaté que
les unités conservent en moyenne 53 % de documents en trop.
«C'est un chiffre qui ne nous surprend pas, indique d'entrée
de jeu Jean-Yves Rousseau, directeur du Service. Notre but, en
accroissant notre présence dans les unités, c'est
d'aider le personnel et de lui donner des indications sur ce qui
doit et ne doit pas être conservé dans l'avenir.
Si cela a fait augmenter notre besoin d'espace, nous avons contribué
à libérer et à récupérer des
locaux dans les départements.»
Ce déplacement du Service des archives vers les départements
a démarré dans le cadre de l'opération MARC
(Mise en application des règles de conservation), un plan
quinquennal qui prévoit un ratissage complet de l'Université
pour traquer le moindre document à conserver et pour mieux
coordonner les échanges. On en est à l'an II du
plan.
«Certains départements sont très ouverts,
d'autres plus réticents et d'autres encore ne veulent même
pas nous recevoir, dit M. Rousseau, qui n'entend pas jouer au
policier archiviste. Et pourtant, nous avons retracé des
documents importants jusque dans des baignoires!»
L'initiative répond également à la volonté
du Service de privilégier avant tout les archives propres
à la communauté de l'Université de Montréal.
Sans négliger les dons extérieurs, qui constituent
un élément majeur du fonds (pensons à la
collection Baby), le directeur Rousseau estime qu'il est temps
de se tourner «vers l'interne» où, d'ailleurs,
dorment quelques trésors.
Dans la foulée du programme MARC, on a instauré
des services de gestion (conseils, conservation et consultations)
pour les professeurs et les chercheurs. Au lieu d'attendre qu'ils
prennent leur retraite pour les solliciter, on intervient tout
de suite, ce qui a le grand avantage de faire pleinement participer
au tri de leurs documents personnels les personnes intéressées.
C'est par l'instauration de cette politique que le Service a constitué
le fonds des archives de Maryvonne Kendergi, musicologue et professeure
émérite à la Faculté de musique. Pour
l'Université de Montréal, il s'agit là d'une
précieuse acquisition compte tenu de la réputation
internationale de Mme Kendergi.
Mieux, cette enseignante a conservé une masse inimaginable
de documents, tant écrits que sonores ou iconographiques.
Sa maison, paraît-il, est un Klondike pour archivistes.
«Mme Kendergi vit dans ses archives, dit Jean-Yves Rousseau.
Nous avons signé avec elle une entente selon laquelle elle
cède ses documents. Elle commence à nous les envoyer
et nous travaillons ensemble pour tracer les grandes lignes de
ce qui doit être conservé.»
Ce fonds, occupant 4,17 mètres de rayonnage, est appelé
à être consulté par des chercheurs tant du
Québec que du monde entier, prévoit le directeur
Rousseau, qui ajoute qu'une quinzaine de professeurs et de chercheurs
ont signé des accords avec le Service des archives depuis
le début du programme.
Actuellement, le Service des archives gère 25 kilomètres
de documents de toutes sortes dont 1,2 kilomètre sont destinés
à la conservation permanente. Ils sont répartis
dans 600 fonds institutionnels et 260 fonds et collections privés.
L'an dernier, 632 demandes de recherche ont été
faites et leur nombre va en s'accroissant.
M. Rousseau rêve du jour où disparaîtra le
cliché faisant uniquement des archives de vieux papiers
sur lesquels s'accumule la poussière, dans des endroits
sombres et mal aérés.
«Les archives constituent l'ensemble des documents produits
par une personne physique ou morale dans sa vie. Il y a une progression
dans ces papiers qui forment une banque d'informations authentiques
et uniques servant à toutes les sauces», dit-il.
L'an dernier par exemple, les archives de l'Université
ont été consultées pour l'émission
d'un timbre-poste sur Édouard Montpetit, la reconstitution
de l'histoire de la Faculté de théologie, la rédaction
d'une demi-douzaine de livres, le tournage d'une émission
biographique sur Maryvonne Kendergi par TV5, une exposition du
Centre de la montagne qui a lieu cet automne, etc.
Le souhait de M. Rousseau se réalisera-t-il? Probablement
pas. Ce n'est pas par malice mais, règle générale,
quand on leur parle d'archives, les gens ont... la mémoire
courte!
André Duchesne
Loin d'être constamment en compétition, les services
d'archives des différents établissements savent
reconnaître leurs spécialités et échangent
ou se cèdent à l'occasion de précieux documents.
C'est ainsi que le Service des archives de l'Université
de Montréal est en voie de récupérer une
partie des archives de la romancière et professeure de
criminologie Alice Parizeau par le biais des Archives nationales.
«Jacques Parizeau a convenu avec les Archives nationales
qu'il leur céderait ses papiers personnels. Or, on s'est
aperçu que des documents de sa femme étaient mélangés
aux siens», explique Jean-Yves Rousseau, directeur du Service
des archives de l'Université.
Comme les copies corrigées de cinq des romans de l'auteure
des Lilas fleurissent à Varsovie et de La charge des sangliers
se trouvent déjà dans le fonds Famille Parizeau
à l'U de M, les Archives nationales ont jugé adéquat
de lui céder leurs documents.
Jacques Parizeau aidera le Service des archives à faire
le tri dans les papiers de sa première femme, maintenant
décédée.
Dans le même esprit, M. Rousseau mentionne que, s'il recevait
une proposition pour la cession d'archives musicales se rapportant
au jazz, il dirigerait la personne vers le service des archives
de l'Université Concordia, spécialisé dans
ce domaine.
Tous les chercheurs profitent de cette collaboration puisque les
archives d'un domaine commun se retrouvent ainsi concentrées
au même endroit.
A.D.