Volume 35 numéro 31
4 juin
200
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TÉMOIGNAGES

Décès de Gabrielle Cantin
Professeure à la Faculté des sciences de l’éducation pendant plus de 15 ans, Gabrielle Cantin a terminé récemment ses pérégrinations et seule la mémoire, en l’occurrence, permet de nous la rendre présente.

Un diplômé au doctorat affirme qu’elle a su insuffler «une âme, durant toute sa carrière d’éducatrice tant dans la formation des maîtres que dans la recherche universitaire. Il ajoute qu’elle réussissait par son exemple à interpeller tous ceux et celles qui firent leurs armes à ses côtés pour mieux saisir le sens profond du métier d’enseignant, de formateur, d’éducateur, d’administrateur scolaire, voire de «politicien» de l’éducation.

Déjà à 16 ans, elle obtient un brevet d’enseignement pour l’élémentaire. Elle travaille successivement à la CECM, à l’École normale Notre-Dame, à l’École normale Ville-Marie et à l’UQAM. En 1972, l’Université de Montréal retient ses services comme professeure aux cycles supérieurs en andragogie. Personne fort discrète, elle sait écouter très attentivement et donner des avis qui dénouent des situations difficiles. En filigrane, au cours de sa carrière, tout converge vers l’importance de l’individualisation de l’apprentissage et de l’enseignement. Ses recherches gravitent autour de ces pôles puisqu’elle investit dans les secteurs de l’intégration des apprentissages, de la reconnaissance des acquis et de la formation à distance. Les très nombreux projets de mémoire et de thèse qu’elle dirige demeurent pour la plupart dans ces champs d’études.

Collaboratrice infatigable, elle est une collègue sur laquelle on peut compter au sein de la Faculté des sciences de l’éducation. Sa participation à plusieurs dizaines de comités en fait foi.

Quant à la reconnaissance de son expertise, Gabrielle Cantin est appelée en consultation par la plupart des universités du Québec, par un certain nombre d’autres en Ontario, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, au Venezuela, en France et en Allemagne, concernant l’évaluation de programmes et de projets de recherche ou encore la mise en place de séances de formation.

En 1984, plusieurs anciens étudiants décident de créer la fondation Gabrielle-Cantin en vue de remettre annuellement un prix d’excellence à l’auteur du meilleur travail de recherche en andragogie à la maîtrise ou au doctorat. Un tel geste est évocateur de la haute appréciation de cette professeure.

Son dévouement incessant et ses multiples contributions méritent amplement le respect et la reconnaissance à bien des égards.

Jean Louis Bernard
Professeur honoraire


Hommage au professeur John Low Brebner
John Low Brebner est décédé le 29 janvier dernier, à peine quelques semaines après avoir pris sa retraite en tant que professeur titulaire au Département de physique. Avec son décès, l’Université de Montréal perd un de ses pionniers dans le domaine de la recherche sur les matériaux de pointe, comme en fait foi le témoignage suivant.

Après six ans comme chercheur dans l’industrie à Genève, M. Brebner est nommé en 1968 professeur agrégé au Département de physique de l’Université de Montréal. Il a implanté, dès son arrivée, un programme de recherche sur les propriétés optiques et électroniques de plusieurs classes de matériaux, comme les semi-conducteurs lamellaires, les perovskytes et les matériaux amorphes et — plus tard — modifiés par faisceaux ioniques de haute énergie. En parallèle avec ses propres recherches, il a su constituer au fil des ans un solide noyau de chercheurs sur les matériaux, faisant alors de ce domaine un des grands axes de recherche du Département et donnant ainsi naissance au Groupe de recherche en physique et technologie des couches minces (GCM), qui occupe aujourd’hui une place de choix dans le plan stratégique de l’Université. En effet, le développement du GCM, qui regroupe une vingtaine de chercheurs et une centaine de personnes à l’Université de Montréal et à l’École Polytechnique, est dans une très large mesure le fruit du leadership de John Low Brebner. Dès la reconnaissance officielle du GCM en 1984 et jusqu’en 1990, il y a servi comme directeur adjoint en étroite collaboration avec le directeur Arthur Yelon, de l’École Polytechnique, et il en fut par la suite directeur jusqu’en 1996.

De plus, l’excellent jugement scientifique, la vision et les capacités organisationnelles du professeur Brebner ont joué un rôle déterminant, à l’Université de Montréal, dans la mise en place et l’amélioration des techniques de modification de matériaux par faisceaux d’ions énergétiques, redonnant ainsi un nouveau souffle aux installations du Laboratoire de physique nucléaire (connu depuis sous le nom de laboratoire René-J.-A.-Lévesque). Tout en faisant campagne pour faire valoir l’utilité des accélérateurs du laboratoire dans l’analyse et la modification des matériaux à des échelles nanométrique et micrométrique, il menait la bataille pour l’installation d’un appareil plus moderne. En 1995, le CRSNG attribuait les fonds pour un nouvel accélérateur et, récemment, la Fondation canadienne pour l’innovation accordait des fonds pour la mise à neuf du Tandem original. Cette modernisation de son infrastructure fait que le laboratoire René-J.-A.-Lévesque est aujourd’hui reconnu comme un important centre national de traitement et d’analyse de matériaux.

Chercheur de réputation internationale, John Low Brebner fut tout autant un enseignant du plus haut calibre, dévoué et très engagé à tous les échelons dans cette tâche qu’il chérissait. Au cours de sa carrière à l’Université de Montréal, il a dirigé et codirigé une trentaine d’étudiants au doctorat et près d’une dizaine à la maîtrise, et ses anciens étudiants occupent tous des emplois enviables aujourd’hui. Il a donné, à tous les cycles et à des groupes de toutes les tailles, un très large éventail de cours magistraux et de laboratoires et il a toujours été très apprécié des étudiants. Là encore, il a constamment joué un rôle de maître d’œuvre dans la mise sur pied et l’amélioration des laboratoires de travaux pratiques. Il a clairement été, au cours des deux dernières décennies, l’artisan principal de l’évolution des travaux pratiques au Département de physique. Soulignons que la valorisation de l’encadrement des étudiants aux cycles supérieurs était un aspect qui préoccupait beaucoup le professeur Brebner. Il privilégiait la création d’un environnement accueillant qui leur rende accessible une vaste gamme de techniques et de technologies en science et en génie. Il s’agit sans doute là de la réalisation qui lui aura donné la plus grande satisfaction.

À ses talents éminents de scientifique et d’enseignant, M. Brebner alliait d’incomparables qualités personnelles qui l’ont amené à jouer le rôle de directeur adjoint sous plusieurs directeurs. Estimé de tous ses pairs, il a fait partie d’à peu près tous les comités départementaux, dont le très imposant Comité des laboratoires, qu’il a présidé jusqu’à la fin de l’année dernière. Il a aussi fait partie de comités du CRSNG et du fonds FCAR ainsi que du Comité de la recherche de la FAS et du Sous-comité du développement physique de l’Université.

En résumé, John Low Brebner a connu une carrière exemplaire d’enseignant-chercheur à l’Université de Montréal et il a été un leader scientifique tant sur la scène internationale que sur le campus. Il a exercé une grande influence sur ses étudiants et sur ses jeunes collègues, qu’il a entraînés à sa suite sur le sentier de la rigueur. Sa chaleur humaine, sa patience et son humour resteront gravés dans le cœur de tous ceux qui l’ont côtoyé. Et bien qu’atteint d’un mal qui ne laisse point de quartier, il a continué d’encadrer ses étudiants jusqu’à la toute fin de sa vie, donnant là l’exemple d’un dévouement sans borne.

En reconnaissance exceptionnelle de ses nombreuses contributions, le Conseil de l’Université de Montréal a nommé le regretté professeur John Low Brebner au rang de professeur émérite à la collation solennelle des grades du 25 mai dernier.

Robert Cochrane
Professeur au Département de physique