La
guerre biologique
Les
pesticides chimiques sont condamnés: le réseau Biocontrôle
cherchera à les remplacer par des guerriers naturels.
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Le
réseau de 42 chercheurs que dirigent les professeurs
Raynald Laprade et Jean-Louis Schwartz dispose dune
subvention de 6,6 M$ du CRSNG pour élaborer
une approche intégrée en contrôle biologique. |
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Chaque année,
de nouveaux pesticides chimiques sont retirés du marché
à cause de leurs effets néfastes sur lenvironnement.
Bientôt, on naura plus de produits pour lutter contre
les ravageurs. Il faut une solution de remplacement et la seule voie
viable est celle du biocontrôle», estime Raynald Laprade,
professeur au Département de physique.
Lui et son collègue Jean-Louis Schwartz, du Département
de physiologie, sont codirecteurs scientifiques du réseau Biocontrôle,
un nouveau réseau de chercheurs qui vient dêtre
mis sur pied grâce à une subvention de 6,6 M$ du
CRSNG. Lobjectif de ce réseau est délaborer
une approche intégrée recourant à tous les agents
biologiques possibles insectes, invertébrés,
bactéries, virus, champignons pour contrôler de
façon naturelle les ravageurs des cultures.
Cette approche cherche à utiliser plusieurs ressources biologiques
en même temps en évitant de miser sur un seul produit
comme on le fait avec le chimique. «Lapproche intégrée
exige de connaître les interactions entre les éléments
pathogènes, les ravageurs, les plantes, les animaux et toutes
les composantes des écosystèmes, précise M. Schwartz.
Notre réseau sera le premier au monde à travailler dans
cette direction.»
Une autre caractéristique de lapproche biologique est
quon ne cherche pas à éradiquer les ravageurs.
«Ce serait perdu davance, affirme Raynald Laprade. À
court terme, ce serait pire que le mal parce quon nuirait à
la biodiversité et que le terrain serait tout de suite occupé
par un autre ravageur. Ce quil faut, ce nest pas éliminer
mais contrôler en fonction des besoins.»
Un réseau de 15 universités
Le fait que lon connaisse si peu dennemis naturels aux
ravageurs, comparativement à tout ce qui a été
mis au point du côté des armes chimiques, serait une
conséquence du peu dénergie investie jusquici
dans le contrôle biologique. Pour relever le défi, le
réseau Biocontrôle mettra en collaboration 42 chercheurs
biologistes, biophysiciens, généticiens, écologistes,
biochimistes, bactériologistes établis dans 15 universités
et 7 organismes gouvernementaux. Le siège social du réseau
est situé à lUniversité de Montréal.
Le réseau formera également, au cours des cinq années
de la subvention du CRSNG, 80 chercheurs postdoctoraux. Les projets
de recherche seront centrés sur les cultures de serre (légumes
et fleurs ornementales) ainsi que sur les pépinières
vouées à la reforestation. Les cultures de serre représentent
une industrie de 1,5 milliard de dollars au Canada, alors que lindustrie
forestière, dont une part importante de lactivité
repose sur le reboisement, a une valeur de 60 milliards. Les
industries agricole et forestière dépensent chaque année
10milliards en pesticides.
«Les connaissances et les nouvelles méthodes de culture
qui seront acquises dans les milieux dexploitation abrités
et plus faciles à gérer que sont les serres pourront
également être appliquées aux cultures de plein
champ, à la foresterie et à lenvironnement en
général», souligne Raynald Laprade.
Et les OGM?
En misant sur les ennemis naturels des ravageurs, les deux directeurs
du réseau cherchent également à éviter
le recours aux organismes génétiquement modifiés
(OGM).
Un récent sondage des magazines Québec Science et
Protégez-vous vient dailleurs de montrer que la
population craint davantage les OGM que les pesticides et engrais
chimiques!
«Les objectifs du recours aux OGM sont louables, mais nous croyons
que cela nest pas nécessaire pour linstant, soutient
Jean-Louis Schwartz. Beaucoup détudes doivent encore
être menées. Le rôle du réseau sera de fournir
de la bonne science et détablir des outils de contrôle
environnemental afin de fournir des données fiables pour éclairer
le débat.»
«De nombreuses armes naturelles existent et restent à
découvrir, renchérit Raynald Laprade. Le chercheur estime
lui aussi que le public tout comme le législateur manquent
dinformation sur lenjeu des OGM.
Non seulement les membres du réseau comptent-ils contribuer
à alimenter cet épineux débat, mais leur contribution
pourrait également entraîner des changements de mentalité.
La solution biologique nécessite en effet que les producteurs
soient prêts à vivre avec des insectes et à assumer
certaines pertes, alors que les consommateurs doivent accepter que
leurs légumes naient pas toute la perfection du design
industriel.
Daniel
Baril