Un
médecin de famille pour chaque Québécois
Création
de la chaire Docteur-Sadok-Besrour pour favoriser la recherche en
médecine familiale.
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La
Dre Marie-Dominique Beaulieu défend la médecine
familiale depuis près dun quart de siècle.
Elle sest réjouie de voir la commission Clair
préconiser un médecin de famille pour chaque
Québécois. |
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Comment amener
les Québécois à avoir plus largement recours
à un médecin de famille? Les étudiants sortants
en médecine doivent-ils bénéficier de mesures
financières incitatives pour choisir la voie de la médecine
familiale? Comment faire en sorte que les médecins, infirmières
et autres intervenants de la santé travaillent dans la continuité
auprès des patients qui fréquentent lhôpital,
le cabinet et le CLSC?
Cest le genre de questions auxquelles la chaire Docteur-Sadok-Besrour
en médecine familiale, créée récemment
grâce à une mise de fonds de près de trois millions
de la fondation Bombardier, de la Fondation du CHUM et de la société
Power Corporation du Canada, tentera de répondre au cours des
prochaines années. «Nous ne mènerons pas de recherches
avec des rats et des éprouvettes. Nous allons faire de la recherche
appliquée et notre laboratoire se situera dans les CLSC, dans
les cabinets, partout où il y a des médecins de famille»,
explique la Dre Marie-Dominique Beaulieu, titulaire de cette chaire.
Professeure à lUniversité de Montréal depuis
1986, la Dre Beaulieu est lune des premières universitaires
québécoises à avoir cru en limportance
de la recherche en médecine familiale. Quand la commission
Clair a rendu public son rapport en janvier dernier, recommandant
un médecin de famille pour chaque Québécois,
cela a été pour elle une sorte de victoire. «Nous
y croyons depuis longtemps, à ce modèle, dit-elle. Dailleurs,
nous avions rédigé un mémoire pour cette commission.
Plusieurs de nos idées semblent avoir été retenues.»
Dans son allocution au lancement de la chaire qui porte son nom le
3 mai dernier, le Dr Sadok Besrour a rappelé que ce projet
a germé en 1997, alors que le directeur du Département
de médecine familiale, Bernard Millette, lui a parlé
de cette idée. «Nous avons alors formé une minicommission
Clair puisque nous avons consulté lUniversité
de Montréal, le CHUM, le ministère de la Recherche,
de la Science et de la Technologie et le ministère de la Santé
et des Services sociaux. Et tous ces intervenants ont partagé
notre diagnostic.» À savoir quun virage devait
être amorcé du côté de la médecine
familiale.
La titulaire de la chaire, elle-même médecin de famille
et épidémiologiste, reçoit des patients à
lhôpital Notre-Dame une douzaine dheures par semaine.
Elle estime que la création de cette chaire en médecine
familiale, en plus de marquer un point tournant dans sa carrière
personnelle, arrive à point nommé. «Cest
une belle continuité depuis 25 ans, déclare-t-elle.
Aujourdhui, le Québec compte quatre programmes de médecine
familiale et plus de 280 professeurs sont associés au Département
de lUniversité de Montréal. Investir dans ce secteur,
cest investir dans une formule gagnante.»
Groupes de médecins de famille
Dici 2006, si lon en croit la commission Clair, trois
Québécois sur quatre seront inscrits auprès de
groupes de médecins de famille qui leur assureront laccès
à des services complets 24 heures sur 24, sept jours sur sept.
Pour y parvenir, des équipes de 6 à 10 omnipraticiens
travailleront en collaboration avec des infirmières cliniciennes.
Chaque résidant sinscrira auprès du «groupe
de médecine familiale» de son choix pour une période
déterminée. Chaque groupe aura la responsabilité
de 1000 à 1800 patients.
Au Département de médecine familiale de la Faculté
de médecine, dont la Dre Beaulieu est directrice, on na
pas attendu la commission pour mettre sur pied de tels groupes. Un
projet pilote était en cours délaboration depuis
lété 2000 visant à expérimenter
cette approche.
La chaire Docteur-Sadok-Besrour en médecine familiale sattaquera
prioritairement au problème de la désaffection des jeunes
médecins pour la carrière du médecin de famille.
«Longtemps, la mode a été à la surspécialisation,
souligne la titulaire de la chaire. Les médecins ny ont
pas échappé. Nous en payons le prix aujourdhui,
car il y a un manque flagrant de médecins de famille.»
Un sondage mené lan dernier au Québec par le Conseil
des médecins de famille du Canada confirme cette réalité.
Plus de 43 % des répondants estiment que laccès
aux médecins de famille est problématique et 63 % croient
que le nombre de médecins de famille est insuffisant.
En plus de sattaquer à laccès aux médecins
et aux services de deuxième et de troisième ligne, deux
autres questions sont jugées prioritaires par la titulaire:
la coordination et la continuité des soins ainsi que la formation
de la relève.
La
chaire Docteur-Sadok-Besrour en médecine familiale a
été lancée le 3 mai en présence
(dans lordre habituel) de Laurent Beaudoin, président
du conseil dadministra-tion et du comité exécutif
de Bombardier inc.; Marie-Dominique Beaulieu, titulaire de la
chaire; Claude Benjamin, président du conseil dadministration
du CHUM; le Dr Sadok Besrour, initiateur du projet; Robert Lacroix,
recteur de lUniversité de Montréal; Janine
Bombardier, présidente de la fondation J.-Armand-Bombardier;
André Desmarais, président et cochef de la direction
de Power Corporation du Canada; et Robert E. Brown, coprésident
de la campagne Un monde de projets et président de Bombardier
inc.
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Rémy Trudel y croit
Quelques semaines après que la ministre de la Santé
et des Services sociaux Pauline Marois a donné son appui à
la recommandation no 4 de la commission Clair (un médecin de
famille pour chaque Québécois), elle a quitté
ses fonctions. Son successeur, Rémy Trudel, a laissé
entendre quà son tour il ferait sienne cette recommandation.
Tout laisse croire, donc, que la médecine familiale sera beaucoup
plus intégrée au système de santé des
prochaines années.
Marie-Dominique Beaulieu sen réjouit, car le médecin
de famille assure la qualité personnalisée des soins
sur une longue période, voire dune génération
à lautre. La mise en place dun tel système
coûtera bien des efforts et de largent, mais à
long terme Mme Beaulieu croit que les Québécois seront
gagnants. «En termes purement matériels, le coût
ne sera pas plus élevé. Quand on peut joindre son médecin
de famille, on désengorge les urgences, on diminue le double
emploi des ressources, on prévient les interactions médicamenteuses,
etc. Il faut investir dans cette voie. Cest une vision davenir.»
Mathieu-Robert
Sauvé