Volume 35 numéro 26
2 avril
2001


 


Le prix Gérard-Parizeau remis à l’historien Gérard Bouchard

Gérard Bouchard
«Nous avons au moins un point en commun: nous avons tous les deux un frère qui a été premier ministre du Québec», soulignait à la blague l’historien Gérard Bouchard, professeur à l’Université du Québec à Chicoutimi, en recevant des mains de Robert Parizeau le prix Gérard-Parizeau 2001.

Ce prix, d’une valeur de 30 000 $, lui a été remis le 20 mars dernier à l’occasion de la conférence Gérard-Parizeau, organisée par le Département d’histoire.

Le jury, dont faisaient entre autres partie Louis Maheux, doyen de la Faculté des études supérieures, et Claude Morin, directeur du Département d’histoire, a voulu honorer M. Bouchard pour l’originalité de sa méthode qui permet d’analyser une population sous les angles démographique, social, culturel, médical et génétique. Rappelons que ses travaux sur la communauté saguenayenne et le fichier Balzac qu’il a élaboré ont pu être étendus à tout le Québec et lui ont valu une reconnaissance internationale.

La méthode scientifique en histoire a par contre pour effet de tenir les historiens à l’écart des débats sociaux, soulignait-il au cours d’une rencontre de presse. «Dans les années 60, les historiens étaient les porte-parole de la nation. Aujourd’hui, l’histoire nationale ou sociale est perçue comme moins scientifique et suscite des réticences. Les historiens ont par ailleurs de la difficulté à éclairer les préoccupations contemporaines à partir de leurs observations sur le passé», déplore M. Bouchard.


Crise de l’État-nation

Le conférencier invité pour l’occasion, l’historien Gérard Noiriel, directeur à l’École des hautes études en sciences sociales de Paris, a abondé dans le même sens que son homologue en soulignant l’importance, pour les historiens, de «restaurer les débats anciens afin qu’on n’oublie pas ce que les vaincus avaient à dire puisqu’ils n’avaient pas nécessairement tort».

Gérard Noiriel

Les propos de M. Noiriel ont porté sur le sujet très actuel de la crise des États-nations dans le contexte de la mondialisation. «Chacune des étapes qui ont conduit à la mondialisation des échanges a provoqué des conflits virulents entre ceux qui ont tiré profit de ces mutations et ceux qui en ont été les victimes, a-t-il rappelé. L’une des fonctions premières de l’État-nation a été de protéger la communauté nationale contre les menaces de l’internationalisation. Aujourd’hui, ces tensions sont d’autant plus vives que l’État-nation reste le cadre fondamental de l’organisation des citoyens, alors que le marché est structuré sur une base mondiale.»

Robert Parizeau

Cette nouvelle phase dans l’histoire de la mondialisation des échanges marque le début d’un processus dont nul ne peut prévoir aujourd’hui l’issue, estime l’historien.
Les thèmes du prix et de la conférence Gérard-Parizeau alternent chaque année entre l’histoire et la finance, deux disciplines dans lesquelles M. Parizeau, ancien professeur de l’École des Hautes Études Commerciales, a laissé sa marque. Le fonds qui porte son nom a été créé à sa demande afin de récompenser des contributions majeures dans ces deux champs d’études.

Daniel Baril