Le
centre-ville de Montréal conserve les postes de contrôle
de léconomie
Le
développement de lemploi dans les banlieues se fait en
complémentarité avec le centre-ville.
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William
Coffey, Claude Manzagol et lagent de recherche Laurent
Terral observent la distribution de lemploi sur une
carte de la région métropolitaine. |
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De toutes les
grandes métropoles du Canada, Montréal est celle dont
le centre-ville a connu le déclin le plus faible au terme de
la restructuration économique qui a marqué les années
90. Les autres villes canadiennes ont par ailleurs elles-mêmes
mieux résisté que les grands centres urbains américains
au mouvement de décentralisation.
Cest ce qui ressort dune série détudes
effectuées par William Coffey et Claude Manzagol, professeurs
au Département de géographie, pour le compte du ministère
de la Métropole.
«Le centre-ville de Montréal a conservé sa fonction
classique, qui est de concentrer les emplois dans les secteurs de
contrôle de léconomie, soit les sièges sociaux,
les institutions financières et les assurances», précise
Claude Manzagol. Les données pour le centre-ville montrent
que les emplois dans ces secteurs ont augmenté de 5435 entre
1981 et 1996 pour atteindre un total denviron 20 000. Ceci
a permis au centre-ville de maintenir sa part relative de lemploi
dans ces domaines.
Dans la même période, le centre-ville a augmenté
de 5 % sa part relative demplois dans les communications, ce
qui représente un gain de 3500 emplois. Tous secteurs confondus,
le nombre demplois atteignait 203 000 en 1996, soit 14 545
emplois de plus quen 1981 (augmentation de 7,7 %) malgré
des pertes notables de lordre de 10 500 emplois dans le
secteur manufacturier.
La hausse nette cache toutefois une diminution de 15,5 à 14 %
de la part relative de lemploi métropolitain situé
au centre-ville: cest que le nombre demplois dans les
centres périphériques comme la Rive-Sud, Dorval et Laval
a augmenté davantage, notamment dans les secteurs manufacturier,
de lentreposage et des services aux entreprises, des secteurs
qui ne sont pas traditionnellement associés aux centres-villes.
Cette caractéristique fait dire aux chercheurs que le développement
de lemploi dans les différents pôles se fait de
façon complémentaire au rôle du centre-ville.
Économie polycentrique
«Il est normal que le mouvement de croissance se fasse du centre
vers lextérieur, souligne Claude Manzagol. Ce qui nest
pas normal, cest lampleur que ce mouvement a connue aux
États-Unis, où les entreprises ont fui les centres-villes
par répulsion.»
Le mouvement a été suffisamment important chez nos voisins
pour que voient le jour de nouveaux centres-villes périphériques
appelés edge cities. À Montréal, le mouvement
na pas pris la forme dune dispersion générale
mais dune concentration autour dune quinzaine de pôles:
aux yeux des chercheurs, la région métropolitaine présente
ainsi une structure économique polycentrique. Dans les métropoles
américaines, cette structure naurait été
quune transition vers la dispersion alors quà Montréal
elle présente des signes de consolidation.
Par ailleurs, «le mouvement vers la périphérie
reflète aussi la santé de léconomie, ajoute
pour sa part William Coffey. Les emplois se déplacent lorsquil
y a trop dactivités économiques pour quils
soient concentrés dans les centres-villes. La situation de
Montréal illustre que léconomie a stagné
pendant la période de restructuration.»
Toronto et Vancouver ont même dû appliquer des mesures
de décentralisation parce que les systèmes et réseaux
de transport de leur zone centrale étaient à la limite
de leur capacité.
Les deux professeurs estiment par ailleurs que la qualité de
vie à Montréal, où le centre-ville présente
moins de criminalité et de congestion que dans les grandes
villes américaines, a possiblement joué un rôle
dans le maintien de son activité économique. Le fait
que Montréal est une île naurait par contre pas
deffet de rétention sur lemploi.
Les données à partir desquelles ces analyses ont été
effectuées vont de 1981 à 1996, mais les chercheurs
sont convaincus, à la lumière des développements
survenus depuis, que des données plus récentes ne feraient
que confirmer leurs observations.
Une partie des résultats de ces travaux a été
publiée dans un numéro spécial des Cahiers
de géographie du Québec (décembre 2000) dirigé
par les professeurs Manzagol, Coffey et leur collègue Richard
Shearmur, de lINRS-Urbanisation.
Daniel
Baril