Mouvements 
            urbains et mondialisation 
             
            La 
            sociologie redécouvre laction concrète des mouvements 
            urbains.
          
             
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                    | Les 
                      groupes de pression auraient contribué à modifier 
                      la façon de gérer lespace public et 
                      le développement économique des quartiers, 
                      selon Pierre Hamel.  | 
                   
                 
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          Traditionnellement, 
            les mouvements urbains se sont concentrés sur laction 
            sociale locale. Mais voici quils sont à leur tour gagnés 
            par la mondialisation de léconomie, ce qui les amène 
            à repenser leurs analyses et à rediriger leur action. 
            Ce nouveau contexte politique, social et économique sert de 
            toile de fond à un ouvrage collectif publié récemment 
            chez Routledge, Urban Movements in a Globalising World.
            
            «Les textes que nous publions rompent avec lapproche trop 
            théorique qui a caractérisé lanalyse sociologique 
            des mouvements urbains dans les années 80 et 90, indique Pierre 
            Hamel, professeur au Département de sociologie et coéditeur 
            de louvrage. Ces analyses étaient centrées sur 
            des questions abstraites comme lidentité ou les rapports 
            de classe et elles ont perdu de vue la réalité complexe 
            du caractère social à la base des mouvements urbains. 
            Nos travaux abordent les actions concrètes que mènent 
            ces groupes sur le terrain et la façon dont ils transforment 
            notre perception par les solutions quils apportent.»
            
            Les mouvements sociaux urbains dont il est question sont par ailleurs 
            trop peu connus du grand public et lun des objectifs poursuivis 
            par les auteurs est justement de les faire mieux connaître. 
            «On parle des groupes qui interviennent dans les questions du 
            logement, de la gestion des services publics, de la qualité 
            de vie, de la démocratisation de la gestion urbaine ou encore 
            de la revitalisation économique de quartiers défavorisés, 
            précise Pierre Hamel, qui est également professeur à 
            lInstitut durbanisme. La sociologie a marginalisé 
            ces groupes par rapport à ceux qui sintéressent 
            aux conditions des femmes ou à lenvironnement, mais il 
            y a beaucoup de choses qui se passent dans la ville.»
          
            Changer les mentalités
            Ces groupes sont généralement engagés dans des 
            actions allant à lencontre des politiques de mondialisation 
            de léconomie ou du moins visent à en contrer les 
            effets locaux négatifs. Cette perspective na pas partout 
            les mêmes conséquences: les mouvements luttent contre 
            la ghettoïsation des groupes ethniques aux États-Unis, 
            réclament des HLM en France, sopposent aux mesures de 
            workfare en Angleterre et sengagent dans la relance économique 
            locale à Montréal.
            
            Selon le professeur, ces mouvements de pression auraient contribué 
            à modifier les mentalités en ce qui concerne la façon 
            de gérer lespace public et le développement économique 
            des quartiers. Dans le chapitre quil signe  «The 
            fragmentation of social movements and social justice» , 
            Pierre Hamel sintéresse plus particulièrement 
            au Regroupement pour la relance économique et sociale du Sud-Ouest 
            (RESO), qui permet dillustrer comment laction urbaine 
            a pu entraîner des transformations institutionnelles ainsi que 
            la création de programmes gouvernementaux.
            
            Au début des années 90, le RESO a réussi par 
            exemple à convaincre le gouvernement fédéral 
            de rajuster ses programmes de relance pour le sud-ouest de Montréal 
            afin de mieux répondre aux besoins de la population de ces 
            quartiers et a même créé un fonds de cinq millions 
            de dollars en capital de risque pour la création demplois.
            
            Pierre Hamel analyse des interventions de ce type en discutant de 
            deux approches qui ont cours à leur égard: celle voulant 
            quil sagisse dactions marginales alors que les décisions 
            sont prises à dautres échelons et celle voulant 
            que, dans le contexte dune société fragmentée, 
            il importe de donner la parole aux divers acteurs sociaux.
            
            «Ces deux approches sont valides en partie et doivent être 
            maintenues, dit-il. Les groupes urbains ont dailleurs conçu 
            leurs interventions en misant sur une certaine ambivalence, cherchant 
            à transformer les institutions de lintérieur et 
            de lextérieur.»
            
            À ses yeux, les mouvements urbains remplissent ainsi trois 
            rôles majeurs: ils sont le reflet des tensions sociales, ils 
            offrent un espace pour lexpérimentation des mesures sociales 
            et pour la formation des intervenants et ils transforment les mentalités.
            
            Louvrage, coédité par Henri Lustiger-Thaler, du 
            collège Ramapo au New Jersey, et par Margit Mayer, de lUniversité 
            libre de Berlin, analyse les divers enjeux urbains tels quils 
            se présentent au Québec, aux États-Unis, en France, 
            en Angleterre, en Allemagne et en Europe de lEst, toujours dans 
            la perspective de la mondialisation.
          Daniel 
            Baril
          Sous la direction 
            de Pierre Hamel, Henri Lustiger-Thaler et Margit Mayer, Urban Movements 
            in a Globalising World, Londres, Routledge, 2001.
           
          