Volume 35 numéro 23
12 mars
2001


 


La chaire de recherche sur le cancer du sein
«Un cadeau pour les femmes» – André Robidoux

Toutes les deux minutes, une femme meurt du cancer du sein.

Pour le Dr André Robidoux, titulaire de la chaire Banque Scotia en traitement et diagnostic du cancer du sein, cette nouvelle unité devrait permettre de coordonner tous les projets de recherche dans le domaine du cancer du sein à l’Université de Montréal.

Officiellement annoncée à l’occasion de la journée du 8 mars, la création récente de la chaire Banque Scotia en traitement et diagnostic du cancer du sein a été présentée par son titulaire comme «un cadeau que fait l’Université de Montréal aux femmes».

Un cadeau parce que, selon la vision des choses du Dr André Robidoux, professeur au Département de chirurgie, cette chaire devrait optimiser la recherche sur le cancer du sein en permettant de coordonner tout ce qui se fait dans ce domaine à l’Université de Montréal en plus de contribuer à l’éducation des femmes sur le sujet. Au Canada, une femme sur neuf est atteinte d’un cancer du sein et, en Amérique du Nord, une femme en meurt toutes les deux minutes.

«La création de cette chaire sera l’occasion de nous doter d’une véritable politique structurée d’intervention en matière de diagnostic et de traitement, déclare le titulaire. Elle devrait favoriser la coordination de l’ensemble des activités de recherche, ce qui permettra à chaque chercheur de prendre connaissance des autres protocoles et, au besoin, d’y diriger les candidates.»

Actuellement au Québec, seulement deux pour cent des femmes atteintes de ce cancer participent à des recherches, ce que le Dr Robidoux juge inacceptable. «Il est impensable que les femmes soient traitées en dehors d’un programme de recherche disposant des dernières connaissances et technologies de pointe», déclare-t-il. Son objectif serait que toutes les femmes soient incluses dans un protocole. Une éducation à la base est donc à faire pour livrer l’information scientifique à ces femmes et les sensibiliser à l’importance de la recherche, une mission que la chaire devrait favoriser.

André Robidoux se réjouit également de la pérennité déjà assurée à cette nouvelle unité de recherche. Elle a pu être créée grâce à un fonds capitalisé de un million de dollars investi par la Banque Scotia. «Ceci nous assure que les postes de chercheurs vont subsister jusqu’à ce que le cancer du sein soit éradiqué.»

La chaire bénéficie aussi d’une autre subvention de un million de dollars provenant du fonds Eli Lilly pour la recherche en cancer du sein, une entreprise pharmaceutique internationale. Finalement, la Fondation du CHUM y a investi une somme de 500000$.

«Sur cinq ans, il serait possible de doubler ces mises par l’effet d’attraction qu’elles peuvent avoir sur les autres subventionnaires», estime le titulaire.


Programme de prévention
Le programme scientifique de la chaire sera essentiellement axé sur le diagnostic et le traitement, notamment en phase précoce.

«Ce qui est repérable par masse palpable et par mammographie ne constitue que la pointe de l’iceberg des cancers du sein, note le chercheur. Il peut se passer de cinq à huit ans avant qu’une cellule maligne produise une masse détectable par mammographie, mais de telles cellules pourraient être observables au microscope. Il faut élaborer des méthodes de prévention qui agissent sur le non-visible, sous la ligne de flottaison.»

Le Dr Robidoux est l’un des rares Canadiens à être membre du National Surgical Adjuvant Breast and Bowel Project, un réseau coopératif en essais cliniques parrainé par le National Cancer Institute des États-Unis; cette affiliation permettra de lier les recherches de la chaire avec ce qui se fait sur la scène internationale.

Un des projets de recherche actuellement en cours et mettant à contribution 400 centres de recherche en Amérique du Nord vise à mesurer l’effet préventif d’anti-oestrogènes comme le tamoxifène (voir Forum du 19 février) et le raloxifène. Ce programme s’adresse à des candidates jugées à risque à la lumière de critères tels que l’âge aux premières menstruations et à la première grossesse vivante, le nombre de parentes de premier degré atteintes de cancer du sein ou encore la présence d’une hyperplasie atypique.

Un autre projet auquel participe André Robidoux porte sur la comparaison des avantages de la chimiothérapie administrée en période pré- ou postopératoire. «Lorsqu’on détecte une masse, la première réaction de la femme est de vouloir se la faire enlever au plus vite. L’ablation est ensuite complétée par la chimiothérapie. Mais les recherches montrent que la chimiothérapie administrée avant l’opération fait disparaître la masse chez 12% des femmes. Nous cherchons, par l’effet combiné de chimiothérapies diverses, à hausser ce taux à 20%.»

Les chercheurs de la chaire se pencheront également sur le problème de l’ablation des ganglions de l’aisselle, une pratique quasi systématique dans les cas de mammectomie. Ils chercheront en outre à mesurer la valeur du diagnostic effectué à l’aide du «ganglion sentinelle», un ganglion qui permet de déterminer si les autres sont également atteints par les métastases.

Finalement, la chaire aura comme mission de procéder à l’évaluation des nouvelles technologies de dépistage et de traitement en lien avec ses partenaires industriels.

Daniel Baril