Volume 35 numéro 21
19 février
2001


 


Santé et mouvements de populations en Afrique
Le Département de démographie décroche des subventions de cinq millions de dollars pour élaborer des programmes d’intervention en Afrique subsaharienne.

Victor Piché, directeur du Département de démographie (à droite), et Thomas Legrand, professeur-chercheur au même département

La vingtaine de pays qui composent l’Afrique subsaharienne affichent le plus faible taux d’urbanisation au monde, soit 35%. Mais d’importants mouvements de populations vers les villes devraient faire grimper ce taux à 55% d’ici 2030. Le phénomène est accentué par une croissance démographique considérable et amplifié par une instabilité politique chronique.

Le Département de démographie, qui jouit déjà d’une expertise reconnue internationalement au sujet de cette région du globe, ainsi que le Centre interuniversitaire d’études démographiques dont il fait partie viennent de recevoir trois importantes subventions destinées à former des chercheurs spécialisés dans les enjeux démographiques de la région.


Santé de la reproduction

«En Afrique de l’Ouest, les populations peuvent circuler librement d’un pays à l’autre, indique Victor Piché, directeur du Département de démographie. Il est très difficile de gérer les frontières à la façon des pays du Nord et, dans plusieurs cas, mouvement de populations signifie mobilité sexuelle plus grande et risques accrus pour la santé.»

L’une des subventions, de l’ordre de 1,3 M$ accordée par la fondation Rockefeller pour un projet du professeur Barthélémy Kuate Defo, permettra de financer notamment une recherche de grande envergure sur la santé et la sexualité des adolescents camerounais. «L’objectif est d’aider le gouvernement du Cameroun à élaborer un programme national de santé de la reproduction», précise Thomas Legrand, professeur au Département.

Un second volet du programme porte sur la mortalité infantile en lien avec les comportements de reproduction dans plusieurs pays de l’Afrique subsaharienne, en particulier au Zimbabwe et au Sénégal. Au Zimbabwe, environ le tiers de la population adulte est porteur du virus du sida et l’on craint que seulement 10% des femmes dépassent l’âge de 50 ans.


Fondation Mellon
La réputation du Département de démographie a également valu à ce dernier une autre subvention de 1,3 M$ de la fondation Mellon, la seule accordée par cet organisme à une université à l’extérieur des États-Unis pour des études sur les pays en développement. Parmi les 21 universités ayant soumis leur candidature à ce programme, seulement 9 ont été retenues.

Au cours des trois prochaines années, la subvention de la fondation Mellon servira à offrir une quinzaine de bourses doctorales et postdoctorales pour la formation, à l’UdeM, de chercheurs africains et québécois spécialisés dans les problèmes de migration et d’urbanisation des pays francophones de l’Afrique de l’Ouest. Une autre partie permettra de financer des études de terrain et de favoriser l’utilisation des nouvelles technologies de l’information dans les centres de recherche démographique africains.

«En collaboration avec l’Université Johns Hopkins, la subvention Mellon servira aussi à accueillir chez nous un spécialiste de la démographie africaine ainsi que deux ou trois chercheurs américains travaillant sur l’Afrique francophone et qui désireraient parfaire leur formation en contexte francophone», ajoute Thomas Legrand.

Les subventions des fondations Mellon et Rockefeller s’ajoutent à une troisième subvention encore plus importante des Fonds des Nations Unies pour la population et dépassant les 2,3 M$ pour les trois prochaines années.

«En collaboration avec le Département de médecine sociale et préventive et l’Unité de santé internationale de la Faculté de médecine, ces fonds serviront à former, à Dakar, une vingtaine d’intervenants par année sur les questions de santé de la reproduction», indique Victor Piché.

Ces intervenants s’ajouteront à ceux déjà formés par des programmes antérieurs du Département et permettront de constituer sur place un réseau de spécialistes qui devrait assurer l’autonomie du pays en matière de ressources humaines.

«L’un des éléments originaux qui font notre réputation est notre approche axée sur la résolution de problèmes, souligne le directeur. La formation va de la conception d’un projet jusqu’à sa mise en oeuvre et son évaluation: les étudiants doivent décortiquer le problème, en comprendre les processus et élaborer des stratégies d’intervention.»

Daniel Baril