L’utilisation
du téléphone mobile peut doubler le risque d’accident
L’étude
du Laboratoire sur la sécurité des transports a montré
une association entre la fréquence des appels et le risque
d’accident.
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L’étude
de Claire Laberge-Nadeau et Urs Maag est la première
à comparer la fréquence des accidents de la
route entre utilisateurs et non-utilisateurs de téléphone
mobile. Un troisième coauteur, François Bellavance,
du Service de l’enseignement et des méthodes
quantitatives de gestion des HEC, n’apparaît
pas sur la photo. |
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Si vous utilisez
votre téléphone mobile tout en conduisant, vous augmentez
de 38% (1,35) vos risques d’accident de la route. Si vous faites
une grande utilisation de votre appareil, soit plus de 135 appels
par mois, vous doublez le risque d’accident par rapport à
ceux qui ne possèdent pas de téléphone mobile
ou qui font moins de 10 appels par mois.
C’est ce que vient de montrer une étude du Laboratoire
sur la sécurité des transports du Centre de recherche
sur les transports, effectuée auprès de 12 700 utilisateurs
et utilisatrices de téléphones cellulaires qui ont été
suivis pendant deux ans.
Le problème pourrait prendre des proportions considérables
puisque le nombre d’utilisateurs de cellulaires — soit 28%
des automobilistes canadiens — a presque doublé en quatre
ans et que la fréquence d’utilisation de ces appareils
augmente avec la durée de leur possession.
Pour déterminer si l’usage du cellulaire comportait un
risque d’accident, les chercheurs ont croisé les dossiers
de conduite du groupe d’utilisateurs avec le nombre et la durée
de leurs appels téléphoniques, et comparé ces
dossiers avec ceux de 23 300 conducteurs non utilisateurs de cellulaire.
Ils ont aussi pondéré les données selon le groupe
d’âge, le sexe, le kilométrage, le nombre d’années
d’expérience et la conduite de jour ou de soir. C’est
la première fois qu’une étude aussi poussée
cherche à établir une association entre l’usage
du téléphone au volant et le risque d’accident.
Une relation de dose-réponse
Ce type de croisement ne permet évidemment pas d’établir
un lien causal direct entre un appel téléphonique et
un accident précis, mais l’association entre les deux
ne fait pas de doute aux yeux des chercheurs. «Après
avoir tenu compte de tous les facteurs, nous avons trouvé une
relation de dose-réponse, c’est-à-dire une
association entre la fréquence d’utilisation du téléphone
et le nombre d’accidents», affirme Claire Laberge-Nadeau,
directrice du Laboratoire et professeure au Département de
médecine sociale et préventive. «En termes épidémiologiques,
c’est ce qui se rapproche le plus du rapport de causalité.»
Les résultats d’ensemble vont d’ailleurs dans le
sens d’autres travaux effectués sur des simulateurs de
conduite. «Ces travaux ont montré que l’usage du
téléphone mobile entraîne des déviations
dans la conduite, un ralentissement de la vitesse, une diminution
de l’attention et un allongement du temps de réaction»,
indique Urs Maag, professeur au Département de mathématiques
et de statistique et coauteur de l’étude.
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Plus
de 28% des automobilistes utilisent un cellulaire, une proportion
en croissance rapide. |
Téléphone mobile et sexe
Le facteur de risque observé dans cette étude s’avère
le même chez les hommes et chez les femmes. «Ce fut pour
nous une surprise, mais le fait d’avoir considéré
séparément les hommes et les femmes et d’être
arrivés aux mêmes résultats consolide l’association
observée», souligne Mme Laberge-Nadeau.
Plusieurs seront toutefois étonnés d’apprendre
que les hommes, toute proportion gardée, sont de plus grands
utilisateurs du téléphone mobile que les femmes: 51%
d’entre eux sont dans la catégorie «grands utilisateurs»
contre 27% des femmes. De plus, seulement 5% des hommes disent ne
jamais utiliser leur téléphone mobile en conduisant,
contre 12% des femmes.
La durée des appels — deux minutes en moyenne — ne
varie pas en fonction du sexe mais diminue avec leur nombre.
L’étude a également départagé les
appels reçus et les appels faits par les automobilistes: dans
la catégorie «grands utilisateurs», le nombre d’appels
faits est associé de façon plus importante au risque
d’accident chez les hommes, alors que, chez les femmes, ce sont
les appels reçus. Près de 69% des utilisateurs et 78%
des utilisatrices reconnaissent par ailleurs que le fait de composer
un numéro nuit beaucoup à la conduite. Tous les répondants
considèrent que ce geste entraîne plus de distraction
que d’avoir à s’occuper des enfants ou de chercher
un poste de radio.
Finalement, le facteur global de risque augmenté de 38% par
rapport aux non-utilisateurs se maintient lorsque l’on considère
séparément les accidents n’ayant causé que
des dommages matériels et ceux ayant occasionné des
blessures ou des pertes de vie; ce rapport demeure le même à
la fois chez les hommes et chez les femmes.
«L’association observée s’avère donc
très forte», conclut Claire Laberge-Nadeau.
Daniel
Baril
Téléphone
mobile et sécurité routière
Faudrait-il réglementer
l’utilisation du téléphone mobile pendant la conduite?
Les chercheurs du Laboratoire sur la sécurité des transports
ne sont pas allés jusque-là, mais ils ont formulé
quelques recommandations relatives à la sécurité
routière à l’intention des automobilistes.
Les conducteurs devraient éviter les conversations animées
et celles non nécessaires, limiter le nombre et la durée
des appels et s’abstenir d’utiliser leur téléphone
lorsque les conditions demandent une attention soutenue. Ils devraient
également garder une bonne distance avec les autres véhicules
et rouler à vitesse modérée.
Les appareils à main libre et à commande vocale sont
préférables et l’usage de l’option «mémoire»
devrait se faire sans avoir à consulter de liste. Si la composition
manuelle est nécessaire, le conducteur devrait s’immobiliser
le long de la route. Finalement, l’appareil devrait être
bien fixé et se situer dans le champ visuel de l’automobiliste
pour lui éviter d’avoir à le chercher.
La Colombie-Britannique, l’Alberta et l’Ontario s’apprêtent
à réglementer l’usage du téléphone
mobile; vraisemblablement, ils attendaient les résultats de
l’étude du laboratoire du Centre de recherche sur les
transports.
D.B.
