Volume 35 numéro 20
12 février 2001


 


Suspension des contrats de performance. «Nous nous sentons trahis!»
La communauté universitaire réclame du gouvernement qu’il respecte ses engagements financiers.

Les membres de l’Assemblée universitaire étaient unanimes à déplorer la suspension des contrats de performance.

C’est une assemblée universitaire consternée et estomaquée par la décision du gouvernement de suspendre les contrats de performance qui s’est réunie le 5 février pour sa première séance de l’année 2001. On s’en souvient, deux mois plus tôt, le 5 décembre exactement, le recteur Robert Lacroix signait avec le ministre Legault le contrat de performance de l’Université sous le feu des caméras. L’Université de Montréal devenait ainsi le premier établissement universitaire à signer un tel contrat après de longs mois de travail et de discussions avec les fonctionnaires du ministère de l’Éducation (MEQ).

M. Lacroix a reçu le vendredi 2 février un appel téléphonique du MEQ l’informant que le ministère n’aurait pas les moyens de respecter tous les éléments du contrat de performance, ce qui venait confirmer les rumeurs qui circulaient depuis quelques heures.

«Cela remet donc tout en cause et constitue un bris de confiance entre les universités et le gouvernement», a dit le recteur. Pour lui, cette décision vient également saper tout le travail qui a été fait pour permettre aux universités de planifier leur développement et le déploiement de leurs ressources sur trois ans.

L’Université collaborera avec la Conférence des recteurs et la Fédération des étudiants des universités du Québec pour forcer le gouvernement à respecter ses engagements, a dit le recteur, qui a ajouté avoir aussi l’appui du milieu des affaires et du patronat.

«Le caractère invraisemblable d’une telle décision tient au fait que rien n’a changé depuis décembre dans la conjoncture économique qui puisse la justifier, a-t-il indiqué. De plus, ce n’est pas la décision d’un ministère mais plutôt le résultat de l’arbitrage d’un gouvernement, du Conseil des ministres, ce qui est encore plus grave.»

Prenant ensuite la parole, le secrétaire général de la FAECUM, Patrice Lebel, a déclaré que non seulement les étudiants mais aussi tous les jeunes se sentaient trahis par cette remise en cause des décisions prises au sommet de la jeunesse, qui s’est tenu il y a à peine un an.

Il faut faire savoir au gouvernement que toute la communauté universitaire est derrière le recteur, a dit M. Lebel. Il a présenté une proposition qui a été approuvée à l’unanimité. Celle-ci se lit comme suit: «L’Assemblée universitaire déplore la rupture du lien de confiance avec le gouvernement du Québec. Elle exige le respect a) des engagements financiers inclus dans le contrat de performance intervenu entre le gouvernement et l’Université, b) des paramètres de la nouvelle formule de financement et c) du financement des coûts de système.»

Presque tous les membres de l’Assemblée universitaire qui sont intervenus avant le vote ont parlé de trahison, certains réclamant la démission du ministre, d’autres s’y opposant, alléguant qu’il s’agissait d’une décision du cabinet des ministres.

«C’est scandaleux que, deux mois après sa signature, on remette en cause ce contrat, a lancé Luc Granger. C’est un mauvais exemple pour la population. Nous nous en souviendrons aux prochaines élections.»

Deux jours plus tard, le ministre François Legault confirmait, à un point de presse, qu’il avait décidé de suspendre les contrats de performance parce qu’il ne croyait pas que le prochain budget lui permettrait de verser un milliard de dollars dans le réseau de l’éducation comme il avait été entendu au sommet de la jeunesse. Pour les universités, cet investissement devait se traduire par 600M$ d’argent neuf sur trois ans, dont 300M$ de façon récurrente. Pour l’Université de Montréal, ce réinvestissement, qui a fait l’objet du contrat de performance signé le 5 décembre, signifie 124M$ de plus.

«J’ai suspendu les contrats de performance parce qu’avec les derniers chiffres sur la table, il est impossible de répondre aux engagements sur trois ans», a dit le ministre.

Au moment de mettre sous presse, l’Université de Montréal publiait une déclaration dans laquelle tous les présidents des groupes et associations formant la communauté universitaire joignaient leur voix à celle du recteur pour exiger du gouvernement le respect de ses engagements.

Françoise Lachance