Une
lettre de Papineau et son mandat darrêt exposés
à la bibliothèque
Le
Service des livres rares et des collections spéciales met en
valeur quelques-uns de ses trésors.
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Historienne
et bibliothécaire, Hélène Simoneau
a préparé trois expositions pour mettre en
valeur les livres rares et les collections spéciales..
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Depuis quon
a lancé un mandat darrêt contre Louis-Joseph Papineau
et quil sest enfui aux États-Unis, il sennuie
de ses compagnons darmes et de sa chère patrie. Amer,
il se plaint du peu de lettres quil reçoit de ses proches.
«Je me suis consolé par la supposition que, de jour en
jour, vous pouviez arriver, écrit-il à son père
le 18 août 1838 [
], que cétait parce que
vous étiez en route que vous ne mécriviez pas.
Je ne dis pas vous en particulier. Je dis vous
pour quelques-uns des amis du Canada.»
En réalité, ni le père du leader des rebelles
de 1837 ni ses amis ne sont en route pour Saratoga Springs, et les
admirateurs de Papineau mourront avec un sentiment ambigu à
légard de leur chef: a-t-il trahi ses compatriotes en
choisissant lexil ou les a-t-il protégés?
Cette question demeure irrésolue un siècle et demi plus
tard, alors que le film de Pierre Falardeau, 15 février
1839, relatant les derniers jours dun héros de la
Rébellion, attire lattention. «Les documents sur
les événements de 1837 et 1838 conservés au Service
des livres rares et des collections spéciales de lUniversité
de Montréal suscitent un engouement constant chez les chercheurs»,
explique la bibliothécaire Hélène Simoneau. Jean-Pierre
Leclerc, technicien en documentation, confirme ces dires. Il se souvient,
par exemple, davoir accueilli pendant plusieurs semaines des
recherchistes de la série Le Canada, Une histoire populaire,
diffusée à Radio-Canada. La documentation sur les Patriotes
et les rébellions est parmi le matériel le plus consulté
du Service.
Exposition en deux temps
Elle-même historienne, Mme Simoneau a décidé dorganiser
une exposition sur les rébellions de 1837 et 1838 afin de mettre
en valeur certains documents pertinents des collections spéciales
de lUniversité. On peut voir cette exposition, gratuitement,
au quatrième étage du Pavillon Samuel-Bronfman, en tout
temps durant les heures douverture de la Bibliothèque
des lettres et des sciences humaines.
La première partie de lexposition, achevée récemment,
portait sur les événements qui ont précédé
lémergence du mouvement patriote, de la Conquête
à 1837. La seconde partie, en cours, comprenant une quarantaine
de documents, aborde les événements eux-mêmes
et sétend jusquen 1850, alors que les autorités
offrent une indemnité aux victimes. On y retrouve des pièces
uniques comme la lettre manuscrite de Louis-Joseph Papineau à
son père, citée plus haut, et le mandat darrêt
contre lui signé par les autorités anglaises. Des pages
du Vindicator et de La Minerve, deux journaux dépoque,
sont également présentées.
On peut aussi y admirer des reproductions de lithographies réalisées
par Charles Beauclerk (1818-1861), un militaire anglais qui a immortalisé
plusieurs scènes de linsurrection grâce à
ses talents de dessinateur. Le paradoxe pourrait choquer Papineau
lui-même: cest à un soldat anglais quon doit
les illustrations les plus remarquables des batailles de Saint-Charles
et de Saint-Eustache.
Les documents les plus intéressants de lexposition viennent
des collections Melzack et Baby, léguées à lUniversité
de Montréal. Collectionneurs avertis de «canadiana»,
ouvrages et manuscrits sur le Canada datant davant 1880, George
Baby (aujourdhui décédé) et Louis Melzack,
qui vit à Toronto, ont permis à un grand nombre de chercheurs
daccéder à des documents historiques précieux.
Deux salles du Pavillon principal (Z-205 et Z-209) sont mises à
leur disposition pour consulter les documents. La collection Melzack
compte à elle seule 3000 ouvrages et un millier de manuscrits,
sans compter les journaux dépoque. La collection Baby
est encore plus imposante.
La colonie de la rivière Rouge
Deux autres expositions organisées par le Service des livres
rares et des collections spéciales sont en cours. Lord Selkirk
et la colonie de la rivière Rouge, à la galerie
Melzack (salle Z-1 du Pavillon principal), relate létablissement
dune colonie éphémère (1811-1818) mais
déterminante pour le développement de lOuest canadien.
Thomas Douglas (1771-1820), qui deviendra lord Selkirk, obtient pour
la somme symbolique de 10 shillings une terre de 116 000 milles carrés,
soit léquivalent dune bonne partie du Manitoba,
de la Saskatchewan et de lOntario actuels, en plus dune
partie du Dakota et du Minnesota. Actionnaire de la Compagnie de la
baie dHudson, lord Selkirk a lintention de faire de bonnes
affaires sous le prétexte détendre lEmpire
britannique.
Malheureusement pour lui, la colonie est détruite par les Métis
en 1816 avec la collaboration dune société rivale,
la North West Company, faisant 21 morts chez les colons. Lord Selkirk
est en colère et occupera tout lhiver le fort William,
où il retient des fourrures dune grande valeur. Mis en
état darrestation, il refuse de se rendre. Il nacceptera
jamais de vendre ses actions de la Hudson Bay, ce qui aurait eu pour
effet de faciliter une fusion avec la North West. Cest pourtant
ce qui arrivera deux ans après sa mort.
Pour des raisons de sécurité, lexposition à
laile Z du Pavillon principal ne présente que des copies
doriginaux. Mais toute personne désireuse de consulter
ces derniers peut faire appel au Service des livres rares et des collections
spéciales.
Enfin, lexposition La reliure à travers les siècles
présente quelques volumes remarquables qui témoignent
de lart de la reliure depuis le Moyen Âge jusquà
nos jours. Elle est présentée au rez-de-chaussée
de la Bibliothèque des lettres et des sciences humaines.
Mathieu-Robert
Sauvé
