Volume 35 numéro 16
15 janvier 2001


 


Effervescence en aménagement
La Faculté vit un nouveau départ, selon la doyenne Irène Cinq-Mars.

«Les projets fusent de partout», déclare Irène Cinq-Mars, qui a pris les rênes de la Faculté il y a un an.

De 1994-1995 à 1998-1999, la Faculté de l’aménagement a vu sa population étudiante augmenter de 12 %. Pendant la même période, sous l’effet des compressions budgétaires, elle perdait 13 % de son corps professoral tandis que le nombre de chargés de cours demeurait à peu près stable.

«Mais nous commençons à sentir les effets du réinvestissement», se réjouit Mme Cinq-Mars. En 1998-1999, la charge moyenne d’enseignement était l’une des plus lourdes du campus, soit 18,4. Une telle charge est énorme pour une faculté professionnelle où il y a beaucoup de travaux pratiques et d’encadrement. En 1999-2000, elle était de 17,1. Chacune des professions qui composent la Faculté de l’aménagement (architecture, architecture de paysage, urbanisme, design industriel et design d’intérieur) est autonome, les exigences des organismes professionnels étant propres à chacune.

«Dans cette faculté, il y a donc des complémentarités à chercher», constate Irène Cinq-Mars, qui fut nommée doyenne il y a un an. Cette architecte de paysage venait alors tout juste de réintégrer son unité après avoir passé huit ans au rectorat.

Mais qu’est-ce qui unit des professions et des disciplines aussi disparates? «Je crois que c’est le projet, qui est pour nous un mode de travail, parce que nous sommes des designers et des bâtisseurs», répond la doyenne en citant le préambule de l’entente de planification que la Faculté vient d’acheminer à la Direction de l’Université. Celui-ci a été élaboré en collégialité avec les responsables de chacune des unités, insiste-t-elle.


Un atout pour la société

Unique en son genre en Amérique du Nord, la Faculté de l’aménagement regroupe «toutes les disciplines et les champs de pratique qui affectent le cadre de vie des citoyens et concentre tous ses enseignements et ses recherches dans l’environnement particulier des projets», peut-on lire. La Faculté «contribue au développement d’un secteur novateur de la culture et de l’économie québécoise, le design entendu au sens large». Étudiants et chercheurs utilisent leur créativité et leur savoir dans un environnement de projets où «le “problème” se définit au fur et à mesure de la recherche de solutions».

Mme Cinq-Mars a le sentiment que la force et le potentiel de sa faculté ont longtemps été sous-estimés. «Peut-être parce que la Faculté, dont certaines disciplines sont encore embryonnaires, était à la recherche d’une définition d’elle-même, observe-t-elle. Mais je crois que la conjoncture nous favorise», ajoute celle qui possède une longue expérience d’administratrice comme vice-rectrice aux études, vice-doyenne et directrice de département.

La Faculté, qui a été créée en 1968, a maintenant atteint la maturité, pense la doyenne. «Nous sommes à présent à un tournant. Beaucoup de professeurs fondateurs ont défriché le terrain tant en recherche qu’en enseignement. Parmi les programmes qu’offre la Faculté, certains, comme ceux touchant le patrimoine bâti, le paysage, le design industriel et le design d’intérieur, ont été les premiers à apparaître dans une université québécoise. Maintenant, nous devons poursuivre notre évolution en tenant compte de nouvelles réalités environnementales, sociales et technologiques.»


Équilibre et synergie

Pour y parvenir, la Faculté s’est donné comme objectif, pour les cinq prochaines années, de réaffirmer le rôle de chacune de ses unités, qui doivent aussi se repositionner par rapport à l’évolution de la pratique dans leur discipline. Elle veut aussi rétablir l’équilibre entre les quatre départements dont les admissions et les ressources professorales fluctuent au gré des conjonctures liées principalement au marché du travail et aux compressions budgétaires.

«S’il avait fallu fermer l’École de design lorsque nous avons connu des difficultés il y a 12 ans, nous le regretterions aujourd’hui, remarque Irène Cinq-Mars. De même, Urbanisme, qui sort d’une période difficile, remonte la pente. La discipline évolue d’un urbanisme normatif vers la gestion, l’urbanité comme culture et le design urbain, qui constitue aussi un secteur multidisciplinaire.»

D’ailleurs, la Faculté veut encourager les expériences pédagogiques multidisciplinaires comme le projet Valcourt, où professeurs et étudiants des quatre disciplines de la Faculté se penchent sur la revitalisation de cette ville des Cantons-de-l’Est, d’où a essaimé la multinationale Bombardier.


Nouvelles valeurs
Dans le cadre de la présente campagne de financement, la Faculté de l’aménagement a présenté quelques projets, dont celui d’un laboratoire en écodesign pour favoriser le développement de produits en tenant compte de l’environnement. En effet, les designers et les entreprises doivent revoir les modes de conception et de fabrication actuels afin de réduire le rythme de consommation des ressources naturelles.

Enfin, la Faculté mettra prochainement sur pied un laboratoire de prototypage rapide. Cette nouvelle technologie, qui est en train de révolutionner le design tridimensionnel, permet à un concepteur d’obtenir en quelques minutes une maquette en trois dimensions d’un objet qu’il vient de créer à l’aide d’un logiciel de CAO. La maîtrise de ces techniques est en voie de devenir une compétence incontournable pour les étudiants et les designers.

La Faculté a aussi présenté deux projets de chaires. La création d’une chaire en montage et gestion de projets d’aménagement permettrait de garantir la pérennité du programme de maîtrise en la matière que la Faculté offre déjà en partenariat avec les HEC et qui accueille chaque année un nombre croissant d’étudiants. Cette approche multidisciplinaire (architecture, gestion et urbanisme) se fonde sur l’importance de monter et de gérer des projets de construction et d’aménagement dans une perspective de développement durable.


Ville intérieure
Aussi la Chaire en aménagement de la ville intérieure, dont Montréal est un bel exemple avec sa ville souterraine, permettrait à la métropole de se placer à l’avant-scène de l’analyse et de la conception de solutions originales quant aux défis que pose l’aménagement de tels espaces et de donner un rayonnement international au milieu montréalais de l’immobilier.

Ces projets s’ajouteraient à la Chaire en paysage et environnement, au Groupe de recherche Industrialisation Forum (sciences de l’information appliquées aux problèmes du bâtiment) et au Groupe de recherche en conception assistée par ordinateur (modélisation informatique de l’environnement), qui ont déjà plusieurs réalisations à leur actif.

En collaboration avec l’Institut de gériatrie, la Faculté veut aussi explorer une piste en aménagement et santé pour réaliser la conception de lieux de vie et de soins adaptés au vieillissement de la population.

Enfin, la Faculté de l’aménagement est aussi bien engagée sur la voie de l’informatisation et de l’internationalisation tant en ce qui a trait aux échanges d’étudiants qu’à la coopération internationale.

«À mon retour à la Faculté, j’étais bien sûr heureuse de retrouver des gens que j’aimais, mais j’ai aussi été frappée par l’effervescence qui s’y manifestait tant en recherche et en réflexion qu’en création, signale Irène Cinq-Mars. Les projets fusent de partout. Nous sommes très novateurs. Les compressions ont été très sévères, mais nous avons contribué à la relance de l’Université. Désormais, nous devons œuvrer à notre valorisation et à notre promotion.»

Françoise Lachance