Le
lupus pourrait se transmettre du chien à lhumain
Il
existe une grande similitude entre le lupus canin et le lupus humain,
explique le Dr Rocky Di Fruscia.
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«Le
lupus érythémateux systémique (LES),
qui affecte les humains
et les chiens, est une maladie auto-immune qui survient
quand lorganisme attaque ses propres tissus, explique
le Dr Rocky Di Fruscia, professeur au Département
de sciences cliniques de la Faculté de
médecine vétérinaire. Le LES canin
ressemble en de nombreux points
au lupus humain.» |
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Triste nouvelle
pour Max. Ce berger allemand âgé de quatre ans souffre
dune affection cutanée et dune anémie. Le
diagnostic tombe: lupus érythémateux systémique.
Cest la catastrophe pour la famille, car Max nen a plus
que pour deux ans. Pire encore. Cette maladie auto-immune pourrait
se transmettre à lhumain par les fluides canins.
«Cela est théoriquement possible, mais reste à
confirmer. Il y a cependant une plus grande possibilité que
lhumain et le chien partagent la même cause de la maladie,
affirme le Dr Rocky Di Fruscia, professeur au Département de
sciences cliniques de la Faculté de médecine vétérinaire.
Des chercheurs ont administré des fluides acellulaires de chiens
affectés par le lupus à des souris de laboratoire nouveau-nées.
Ces dernières ont développé des tumeurs et leur
organisme a produit des anticorps antinucléaires, révèle-t-il.
De plus, des virus ont été isolés de ces tumeurs.
Cela a permis de déceler la présence des mêmes
particules virales sur des tissus humains atteints de lupus.»
Bonne nouvelle cependant: les résultats dune autre étude,
publiés récemment dans la revue britannique Lancet,
rapportent des progrès dans le traitement de cette maladie
rare chez lhumain: une chimiothérapie associée
à une greffe de cellules souches sanguines favoriserait la
rémission. Cette découverte pourrait conduire à
des percées dans dautres maladies qui attaquent le système
immunitaire, notamment la sclérose en plaques, larthrite
rhumatoïde et la polymyosite.
Pour Max, cela ne change rien. On ne connaît pas lorigine
du lupus, indique le vétérinaire. Cependant, des recherches
ont démontré une grande similitude entre le lupus canin
et la maladie humaine: lésions cutanées, problèmes
articulaires, anémie, destruction des plaquettes sanguines,
perte de protéines dans les urines, photosensibilité
et ulcérations buccales et nasales.
«Pour établir le diagnostic, on doit retrouver au moins
deux de ces manifestations chez lanimal ou chez lhumain
lupique, indique le médecin. Il faut aussi confirmer, par des
tests sanguins particuliers, quil y a présence danticorps
antinucléaires.»
Comme à la guerre
Afin dexpliquer pourquoi le système ne reconnaît
pas ses propres cellules, le professeur Di Fruscia propose dimaginer
le corps comme un terrain de combat et la lutte contre la maladie
comme une attaque armée. Lune des fonctions du système
immunitaire est de protéger lorganisme des corps étrangers
tels les virus et les bactéries, explique-t-il. Ces éléments
perturbateurs portent des antigènes qui déclenchent
le mécanisme de défense: lorganisme se met alors
à produire des anticorps et des globules blancs nommés
«phagocytes» et «lymphocytes».
«Ces principaux agents de défense du système immunitaire
jouent chacun un rôle particulier: la cellule phagocyte attaque
les corps étrangers à laide denzymes puissants.
Elle agit comme un soldat sous les ordres du lymphocyte, quon
peut considérer comme le général du système
de défense: sa tâche est de circuler dans lorganisme,
de repérer les antigènes et de former les anticorps
spécifiques. Une fois tous les éléments étrangers
éliminés, le système immunitaire cesse de synthétiser
des anticorps. Mais il conserve quand même une mémoire
immunologique au cas où le même agent infectieux se présenterait
ultérieurement. Cest le principe du vaccin.»
Voilà ce qui se passe en temps normal. Toutefois, dans certains
cas, les agents de défense ne différencient pas les
antigènes des cellules des divers tissus et organes du corps,
ajoute Rocky Di Fruscia. Pour des raisons quon ne comprend pas
encore très bien, il arrive donc que le système immunitaire
attaque ses propres cellules. Ce dérèglement peut engendrer
lapparition dune maladie auto-immune.
On croit que certaines personnes sont génétiquement
plus enclines à développer ce type de maladie. On pense
également quun désordre hormonal pourraient être
en cause dans les aberrations du mécanisme de défense.
Le lupus (qui signifie «loup» en latin) touche plus souvent
les femmes; seulement 20% des personnes affectées sont des
hommes. Chez les chiens, cette maladie chronique est davantage présente
chez les races telles que le setter irlandais, le caniche, le lévrier
afghan et les bergers allemand et shetland.
«Un animal de race est plus fragile, signale le vétérinaire.
Car, à lorigine, il est issu de manipulations génétiques
propices à lapparition dun gène récessif
et de maladies particulières.»
Un virus nommé «imposteur»
Au Moyen âge, le lupus, qui doit son nom aux lésions
cutanées caractéristiques quil provoque, était
associé aux loups-garous. En plus des plaies sur la peau qui
rappellent la lèpre, les lupiques présentent un teint
pâle souvent causé par une anémie. Par ailleurs,
leur photosensibilité les oblige à se protéger
des rayons du soleil, leur pire ennemi. Cette sensibilité est
à lorigine de toute une mythologie, car les lupiques
avaient lhabitude de ne vivre que la nuit. De là à
les associer aux loups-garous, il ny avait quun pas.
Une étude récente menée à lHôpital
général de Montréal indique que le stress (mesuré
en nombre de tracas quotidiens) et le manque destime de soi
influent sur la santé mentale et physique des patients lupiques.
«Les voies psychologiques qui font le pont entre les facteurs
psychosociaux et lapparition ou laggravation du lupus
érythémateux systémique demeurent un mystère»,
affirment les chercheurs dans un article paru dans le journal Le
Lien.
On estime quenviron 15% des personnes atteintes de lupus font
au cours de leur maladie des dépressions. Un pourcentage légèrement
plus faible souffrent de psychose. Généralement, ces
problèmes se règlent en traitant le lupus sous-jacent
et à laide de médicaments. Mais encore faut-il
avoir diagnostiqué la maladie. Cela nest pas simple,
car le lupus, surnommé «imposteur», peut se manifester
de plusieurs façons, soutient le Dr Di Fruscia. On lappelle
aussi la «maladie du caméléon» à
cause de son évolution instable. Laffection, qui ne se
guérit pas mais peut être traitée notamment avec
des médicaments qui diminuent lactivité du système
immunitaire, est caractérisée par des rechutes fréquentes.
Et puis, il y a lexception. À 41 ans, le joueur de baseball
américain Tim Raines a remporté sa lutte contre le lupus.
Il a récemment été intronisé au Temple
de la renommée des Expos.
Dominique
Nancy