Volume 35 numéro 13
27 novembre
2000


 


Repérage de trois disques protoplanétaires
On pourra observer ces planètes dans à peine un million d’années!

Anthony Moffat et Anita Mücke discutent des résultats de leurs observations devant de splendides images de supernovae prises par le télescope spatial Chandra.

Une chercheuse postdoctorale du Département de physique, Anita Mücke, est parvenue à détecter trois importants nuages de matière où des planètes sont possiblement en formation autour d’étoiles centrales.

Les disques protoplanétaires en question se trouvent près d’un amas extrêmement dense d’étoiles jeunes et massives (NGC 3603) situé dans la constellation de la Carène, visible uniquement de l’hémisphère Sud. Il s’agit de la plus importante région de formation d’étoiles observable dans notre galaxie et certaines étoiles de l’amas central font jusqu’à 100 fois la masse du Soleil.

«Nos observations visaient d’abord à étudier l’effet des vents stellaires en provenance de cet amas central comptant quelque 10000 étoiles», explique Anthony Moffat, professeur au Département de physique et collaborateur à cette recherche. Les observations ont été faites en ondes radio (trois et six centimètres) à l’aide du radiotélescope australien ATNF Compact Array.

L’analyse des images a montré que l’émission radio détectée provenait d’une multitude de petites structures dans les nuages de gaz entourant le NGC 3603 et dont l’âge est à peine de un million d’années. Les chercheurs ont dirigé leurs observations vers trois de ces formations périphériques déjà repérées par le télescope Hubble.

«Ces disques sont probablement 100 fois plus étendus que notre système solaire, mais ils sont encore trop denses pour qu’on observe l’étoile centrale en formation, poursuit Anthony Moffat. C’est la première fois qu’on effectue des observations en ondes radio de disques protoplanétaires aussi massifs.»

Ces images ont révélé l’existence d’émissions radio de 10 à 20 fois supérieures à ce que prédisaient les modèles. «Contrairement au Soleil, ce flux radio n’est pas d’origine exclusivement thermique; il semble qu’un champ magnétique assez fort soit à l’oeuvre dans le nuage. On ne soupçonnait pas son existence et il s’agit d’un indice supplémentaire montrant que les champs magnétiques accompagnent la formation d’étoiles et de planètes.»

Pour ces raisons, les disques en question seraient de bons candidats dans la recherche de pouponnières de planètes, estime Anthony Moffat. Toutefois, si des planètes sont en formation dans ces nuages, elles ne prendront véritablement forme que dans un million d’années environ, ce qui est un peu long pour observer le processus!

«Mais nous savons maintenant où chercher, souligne le professeur. On peut diriger nos observations vers des formations semblables mais plus âgées.»

Cette image radio montre l’amas stellaire NGC 3603 (au centre de la photo) entouré d’un immense nuage de gaz dans lequel se trouvent les trois disques protoplanétaires, indiqués par les flèches. Les étranges formes bleues indiquent la présence de flux radio.

Une autre première avec Chandra
Anthony Moffat et Anita Mücke, avec l’assistance de Serguei Martchenko et de Gwen Skalkowski, ont également pris la première photographie en rayons X de ce même amas stellaire de la Carène à l’aide du tout nouveau télescope spatial Chandra. Ce télescope orbital, l’un des cinq grands télescopes spatiaux de la NASA actuellement en activité, est spécialisé dans les observations aux rayons X.

La photo, considérée comme spectaculaire par les astrophysiciens, a révélé pour la première fois un lien entre les sources de rayons X et les nombreuses étoiles massives de l’amas NGC 3603. «L’émission des rayons X provient de la collision de particules dans les vents solaires chauds et forts entourant ces étoiles, indique Anthony Moffat. Dans certains cas, les vents qui s’entrechoquent semblent aussi provenir d’étoiles doubles.»

L’équipe de chercheurs effectuera une autre série d’observations à l’aide du même télescope mais dans une zone beaucoup moins dense située dans le Petit Nuage de Magellan. Dans cette galaxie naine qui gravite autour de la nôtre, la teneur en éléments lourds provenant de la fusion nucléaire est 10 fois moindre que dans notre galaxie, ce qui devrait avoir un effet sur les vents stellaires de même que sur le flux de rayons X et permettre d’établir des comparaisons avec ce qui a été observé dans l’amas NGC 3603.
Daniel Baril

Daniel Baril