Des
radiologistes qui opèrent
Le
CHUM devient le plus important centre dangiographie au Canada.
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Les
Drs Gilles Soulez et Guy Breton, du Département de
radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire
de la Faculté de médecine, ont obtenu près
de 11 M$ pour acheter de léquipement radiologique
qui fera du CHUM le centre dangiographie le mieux
outillé au Canada. |
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La nouvelle génération
de radiologistes ne se contentera plus de fournir des images aux chirurgiens;
elle prendra une part active aux opérations au point de remplacer
le spécialiste du bistouri. «Depuis une quinzaine dannées,
explique le directeur du Département de radiologie, radio-oncologie
et médecine nucléaire de la Faculté de médecine,
Guy Breton, les radiologistes procèdent eux-mêmes à
certaines opérations. Cest la nouvelle branche de notre
spécialité.»
Un patient qui souffre dun anévrisme de laorte
abdominale par exemple une maladie qui touche cinq pour cent
de la population et qui peut entraîner la mort peut ainsi
éviter lopération à cur ouvert. Lintervention
consiste en linstallation dune prothèse à
lintérieur de lanévrisme. À laide
dun cathéter inséré dans laine et
qui suit les voies naturelles jusquà lemplacement
de lanévrisme, le médecin crée en quelque
sorte une nouvelle canalisation pour lécoulement sanguin.
«La cicatrice est comparable à celle qui résulte
dune piqûre de mouche à chevreuil», dit le
Dr Breton.
En plus déviter les risques inhérents à
toute opération majeure, le patient demeure hospitalisé
quelques jours à peine comparativement à plusieurs semaines
pour la chirurgie traditionnelle. «Nous croyons que cette technique
permettra de diminuer la mortalité et la morbidité relatives
aux opérations sur les anévrismes», signale le
Dr Gilles Soulez, directeur de la recherche en radiologie au CHUM
et qui mène lui-même un projet de recherche sur ce nouveau
type dintervention expérimentale. Mais il reste beaucoup
de choses à préciser avant détendre ce
traitement à une large échelle. Le coût est un
facteur important: la prothèse à elle seule vaut jusquà
8000 $.
Pour les Drs Breton et Soulez, il ne fait pas de doute que les interventions
«minimalement invasives» sont la voie de lavenir.
Ils viennent dailleurs dêtre encouragés dans
leurs convictions par des organismes subventionnaires fédéraux
et provinciaux.
Un centre denvergure
Grâce à un financement totalisant près de 11 M$,
consenti notamment par la Fondation canadienne pour linnovation
(FCI), les hôpitaux Notre-Dame, Saint-Luc et Hôtel-Dieu
du CHUM deviendront le réseau canadien le mieux outillé
pour combattre, grâce à la radiologie, les maladies endovasculaires.
La livraison des nouveaux appareils (un appareil dimagerie à
résonance magnétique ou IRM, un scanner, une sonde déchographie
Doppler et un appareil dangiographie) séchelonnera
sur environ 18 mois. La pièce de résistance, lIRM,
coûte 5 M$.
«Le but de la subvention est dacquérir des appareils
visant non seulement à guider les chirurgiens au cours des
interventions, mais aussi à procéder à des opérations
comme linstallation de prothèses», explique le
directeur du Département. Deux secteurs dintervention
seront privilégiés: les maladies neurovasculaires dune
part et dautre part les anévrismes de laorte et
les maladies rénales.
Mais le Dr Breton souligne que les appareils seront dabord et
avant tout consacrés à la recherche; seule une partie
du montant total (2,5 M$) servira au travail clinique. Il ne faut
donc pas sattendre à ce que ce budget fasse diminuer
les listes dattente en radio-oncologie au CHUM. Certaines personnes
attendent leur tour depuis un an et demi.
Le CHUM, qui devait renouveler en 2001 son matériel de radiologie,
a profité des budgets spéciaux de la FCI pour effectuer
ce virage. «La Fondation a permis de tripler notre budget. Nous
allons pouvoir faire démarrer des projets qui nauraient
jamais vu le jour autrement. Cest une très bonne nouvelle
pour nous», reprend le Dr Breton. Ce dernier signale que lentreprise
privée sest montrée intéressée par
les projets et quelle participera à leur financement
à raison de quelque deux millions de dollars.
Une spécialité coûteuse
Avec des termes comme «biomatériaux», «chirurgie
virtuelle», «reconstruction de vaisseaux», «intervention
minimalement invasive», les nouveaux radiologistes entrent plus
que jamais dans lère de lhomme bionique. Mais cette
spécialité au carrefour de linformatique, de la
médecine et de lingénierie est extrêmement
coûteuse. Les médecins admettent dailleurs que
leur matériel de pointe sera désuet au moment de déménager
au nouveau centre hospitalier, vers 2008.
Des voix sélèvent contre cet argent dépensé
dans la technologie alors que des programmes de prévention
pourraient sattaquer au problème à la source.
«Nous ne nous opposons pas aux programmes de prévention.
Mais 10 M$, cest ce que ça coûte pour une seule
campagne antitabac, dit le Dr Soulez. De largent qui part en
fumée.»
Puis, reprend son collègue, essayez dexpliquer à
un patient souffrant quon ne peut pas lopérer,
car le budget disponible a été consacré, cette
année, à une campagne de prévention visant à
contrer le tabagisme chez les jeunes de lâge de sa petite-fille
Toutefois, les chercheurs reconnaissent que laspect social de
la santé doit être pris en considération. Cest
pourquoi ils comptent parmi leurs collaborateurs le Dr Raynald Pineault,
directeur du Groupe de recherche interdisciplinaire en santé.
Il doit étudier les impacts socioéconomiques des interventions.
Cela dit, le Dr Breton réfute les critiques sur le coût
excessif de sa discipline. «Nous ne coûtons pas plus cher
quautrefois. Il y a 20 ans, à lhôpital Saint-Luc,
notre budget était de cinq pour cent du total. Aujourdhui,
le rapport est le même pour lensemble du CHUM. Nous faisons
beaucoup plus sans avoir un budget supérieur, toutes proportions
gardées.»
Mathieu-Robert
Sauvé
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