Notre-Dame
et Sainte-Justine auront un système révolutionnaire
dimagerie médicale à basse dose
Limage
dune colonne vertébrale sera créée à
partir de deux rayons X.
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Depuis
12 ans, Jacques de Guise sintéresse à
la conception assistée par ordinateur dans le domaine
biomédical. Son groupe vient dobtenir deux
millions de dollars pour lacquisition des deux premiers
prototypes de radiographie à basse dose. |
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Dès juin
prochain, des chercheurs des hôpitaux Notre-Dame et Sainte-Justine
inaugureront un système novateur dimagerie en trois dimensions
qui utilise de 10 à 20 fois moins de radiations que les systèmes
actuels.
«Le système qui a été construit pour nous
par une firme française permet une grande précision
en utilisant simplement une vue frontale et une vue latérale
de la colonne vertébrale. Limage est obtenue par simple
triangulation», explique lingénieur Jacques de
Guise, chercheur à lÉcole de technologie supérieure
et responsable du Laboratoire de recherche en imagerie orthopédique
du CHUM.
Il sagit dune percée technologique importante,
car le procédé a lavantage de fonctionner à
partir de radiographies à très basse dose mises au point
par le physicien français Georges Charpak (Prix Nobel de physique
1992). Pour produire une image complète de la colonne vertébrale,
par exemple, ce système naura besoin que de deux images
obtenues par rayons X à basse dose. Actuellement, les radiologistes
doivent utiliser jusquà 300 clichés réalisés
par rayons X pour reconstituer une image complète de la colonne.
De plus, le fait dobtenir les images presque instantanément
rend lutilisation du système plus intéressante
que lemploi de la tomodensitométrie, plus lente à
donner des résultats. «Actuellement, signale le chercheur,
des médecins évitent dutiliser limagerie
en trois dimensions, trop longue à produire. La nouvelle technologie
est plus rapide et la qualité de limage finale est dune
précision millimétrique.»
Acquis grâce à un financement de la Fondation canadienne
pour linnovation, du ministère de lÉducation
du Québec, de Valorisation-recherche Québec et de lentreprise
privée totalisant quelque deux millions de dollars sur quatre
ans, le premier prototype en milieu clinique est le fruit de plus
de 12 ans de travail de Jacques de Guise et dune équipe
composée de chercheurs de lÉcole Polytechnique,
de lhôpital Sainte-Justine et du CHUM. Mais cette percée
est principalement due à un voyage détudes que
le professeur de Guise a effectué en France en 1997. «À
lhôpital Saint-Vincent-de-Paul, à Paris, jai
eu la chance de travailler avec M. Charpak, qui a mis au point le
système. Lui-même a lancé une entreprise, Biospace
France, qui collabore avec nous depuis.»
Soulager la
scoliose
En plus de servir au diagnostic, le système permettra de seconder
les chirurgiens orthopédiques qui doivent traiter la scoliose,
un problème de déformation de la colonne vertébrale.
On doit parfois installer dans les vertèbres des agrafes et
des crochets afin de permettre le redressement de la colonne. Limagerie
guidera les gestes du chirurgien, qui doit insérer des instruments
dans des cavités osseuses très étroites.
«Les gens qui souffrent de scoliose doivent passer des dizaines
de radiographies par année, signale M. de Guise. On ne connaît
pas leffet cumulatif dune telle dose de radiations. Les
nouveaux appareils permettent de diviser par 10 et même par
20 la puissance des radiations sans nuire à la qualité
des images obtenues.»
On prévoit également dautres usages sur le plan
clinique. Le genou, par exemple, répond à des forces
cinétiques complexes quil nest pas aisé
détudier. Limagerie en trois dimensions pourrait
aider à trouver les meilleurs points dancrage pour fixer
les prothèses ligamentaires.
Lorsque le premier prototype sera livré à lhôpital
Notre-Dame, en juin 2001 (un autre suivra à lhôpital
Sainte-Justine un an plus tard), lappareil de radiographie,
qui coulisse sur une rampe verticale, transmettra ses données
à un ordinateur. Lutilisateur appliquera une technique
de conception assistée par ordinateur semblable à celle
quon emploie en aérospatiale pour la construction géométrique
de modèles. «Ce sont les mêmes modèles mathématiques
qui entrent dans la construction des ponts et des aéronefs»,
explique lingénieur.
Recherches en radiographie de basse dose
Linstallation du système biplan (en raison des deux sources
dinformation) permettra la création dune plateforme
de recherche en radiographie de basse dose unique au monde. Dailleurs,
lÉcole de technologie supérieure recevra, dès
le mois prochain, un «banc dessai» basé sur
le même principe. Il pourra accomplir les mêmes opérations
que le système installé en milieu hospitalier mais avec
des mannequins et différents objets.
«Dautres applications de la radiographie permettent dinspecter
de façon non destructive le contenu des bagages dans les aéroports
et de repérer par exemple les explosifs qui sy dissimuleraient.
Certaines techniques sont si précises quelles permettent
de distinguer un sac de sel dun sac de sucre. On a encore beaucoup
dapplications à tirer de la radiographie, et particulièrement
de la radiographie à basse dose dont nous serons à lavant-garde
mondiale», signale Jacques de Guise.
Plusieurs étudiants aux cycles supérieurs ont des projets
de recherche dans le Laboratoire de recherche en imagerie orthopédique,
qui occupe une aile récemment rénovée du Pavillon
J.-A.-DeSève de lhôpital Notre-Dame. Léquipe
que le chercheur a réunie compte des ingénieurs, des
informaticiens, des physiciens, des radiologistes, des chirurgiens
orthopédiques et des physiatres. «La multidisciplinarité,
jaime ça», dit-il.
Lui-même est «multicasquette», comme il le dit:
en plus dêtre ingénieur et de travailler dans un
hôpital, il est professeur titulaire à lÉcole
de technologie supérieure et professeur associé à
lÉcole nationale supérieure des arts et métiers,
à Paris.
Mathieu-Robert
Sauvé