Volume 35 numéro 10
6 novembre 2000


 


Une bibliothèque bien particulière
La matériauthèque de la Faculté de l’aménagement comprend plus de 8000 échantillons de matériaux.

Devant un nuancier de couleurs, le professeur Collin Davidson, de l’École d’architecture, et la documentaliste Katia Mayer montrent un des 1000 échantillons de céramiques entreposés à la matériauthèque de la Faculté de l’aménagement.

Une maison anglaise, un stade en Norvège, une école en Autriche, une chapelle américaine... Ces différentes constructions ont en commun le bois, un matériau traditionnel qui, grâce aux innovations technologiques, a acquis plus de souplesse dans les formes et une résistance accrue à la charge. Le lamellé-collé, par exemple, un contreplaqué d’épaisseurs variées, est reconnu pour ces avantages.

Un échantillon de ce type de bois se trouve à la matériauthèque de la Faculté de l’aménagement, où plus de 8000 spécimens de matériaux sont entreposés. Des centaines de fournisseurs renouvellent régulièrement les échantillons de tissus, marbres, céramiques, revêtements vinyliques, membranes de toit et isolants afin que les étudiants soient à l’affût des nouveautés sur le marché.

«C’est une bibliothèque bien particulière, dit la documentaliste Katia Mayer. Ici, il n’y a pas de livres, mais des sections de cloisons, des cadres de fenêtres, des briques et du béton. Cela permet aux étudiants de voir en trois dimensions les divers matériaux illustrés dans les catalogues et de mieux comprendre leurs propriétés physiques.»

Mais l’intérêt de la matériauthèque ne s’arrête pas là. Elle fournit aussi une foule de renseignements d’ordre pratique, souligne Collin Davidson, professeur depuis 1968 à l’École d’architecture et responsable de la matériauthèque. Par exemple, l’étudiant a accès à de l’information et à des devis qui lui indiquent le détail des travaux, la nature des matériaux et les délais d’exécution. «La matériauthèque est un outil d’aide à l’enseignement et à la recherche», affirme M. Davidson.


Un complément à l’information théorique

D’où vient l’idée d’une bibliothèque de matériaux? «Antérieurement, chaque département de la Faculté avait sa propre matériauthèque, raconte le professeur Davidson, mais faute de ressources aucune n’était vraiment fonctionnelle. Il devenait urgent de trouver une solution qui permette d’améliorer l’efficacité de ces centres de documentation.» En 1998, le doyen de la Faculté de l’aménagement, Michel Gariépy, l’a approché pour mener une étude à ce sujet. Après une visite de la cartothèque du Département de géographie et de plusieurs matériauthèques, dont celles du Cégep du Vieux-Montréal et de l’École d’architecture en France, M. Davidson recommande entre autres de regrouper les quatre bibliothèques de matériaux dans un seul et même lieu.

Celui qu’on nomme le «loup blanc» dans le milieu admet qu’un formidable concours de circonstances a favorisé la réalisation du projet: le bâtiment de la Faculté, qui fête cette année ses 30 ans, était alors en rénovation. De plus, la proposition appuyait le plan d’abolition des cloisons entre les départements, une préoccupation commune à MM. Gariépy et Davidson. À force de travail et de persuasion pour rallier les plus réticents, la matériauthèque prend forme un an plus tard et soulève un enthousiasme unanime.

Pour M. Davidson, qui rêve d’ouvrir le centre à un public plus large, notamment les professionnels, la structure actuelle a donné raison à cet engouement. Les étudiants des différentes écoles de la Faculté utilisent assidûment la matériauthèque comme complément à l’information théorique. Avec ses 279 m2, incluant deux bureaux et deux salles d’entreposage, la bibliothèque de matériaux accueille même des étudiants d’autres départements et établissements.

«L’an dernier, la matériauthèque a été le clou de la visite de cégépiens à la Faculté», affirme Katia Mayer.


Le défi du classement

Pourtant, une ombre se profile à un moment sur le projet: comment instaurer un classement des matériaux qui profite à tous? Voilà la question que se posent M. Davidson et Mme Mayer. C’est que les architectes ont recours à un système connu sous le nom de «répertoire normatif» (qui désigne les 16 divisions de la construction: plomberie, électricité, isolation, etc.), alors que les designers industriels utilisent un classement basé selon les différents types de matériaux: bois, plastique, verre, pierre…

«Une fenêtre d’aluminium intéresse les architectes parce que c’est une fenêtre, mais les designers s’y intéressent parce qu’elle est faite en aluminium, illustre le directeur. D’où le problème d’élaborer un seul classement pour les deux disciplines.» Le professeur se montre toutefois confiant: avec l’installation du programme informatique Access, il sera bientôt possible d’établir le passage entre les deux méthodes de classement.

Mais un vrai travail de bénédictin attend Mme Mayer puisque, après avoir répertorié les 8000 échantillons, toute une phase de travail restera à accomplir, dont le maintien à jour des données et l’informatisation des catalogues. Un boulot que la documentaliste connaît bien. Avant d’être engagée par la Faculté de l’aménagement, elle a travaillé pendant 20 ans au centre de documentation du Département de sociologie.

«Le gros du travail devrait être terminé d’ici l’automne prochain, assure-t-elle. À la matériauthèque, deux terminaux seront à la disposition des étudiants. Grâce à Internet, ils pourront même consulter de chez eux les données des catalogues et, éventuellement, avoir accès à des images numérisées des échantillons.»

Dominique Nancy