Volume 35 numéro 7
16 octobre 200
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TÉMOIGNAGE

Décès du professeur Hugh Hood
Le professeur Hugh Hood nous a quittés au mois d’août dernier à la suite d’une longue maladie, laissant dans le deuil sa femme Noreen, peintre accomplie, et ses quatre enfants bien-aimés.

Il est arrivé au Département d’études anglaises en 1961 et y a enseigné durant plus de 30 ans. Né à Toronto d’un père qui était lui-même né en Nouvelle-Écosse et d’une mère franco-ontarienne, il a étudié dans la Ville reine, où il a rédigé une thèse de doctorat sur l’histoire des idées au 18e siècle. Il a ensuite enseigné aux États-Unis durant quelques années avant de venir s’installer au Québec, où il se trouva dans un milieu hautement évocateur de ses origines biculturelles. Il était un homme tout à fait remarquable aussi bien en tant qu’écrivain et professeur que dans les aspects plus personnels de son être.

Auteur inlassable, Hugh Hood a publié plus de 30 livres qui comprennent des romans, des nouvelles et des essais critiques. Son accomplissement créateur a sans doute atteint son apogée dans sa série de 12 romans intitulée The New Age/Le Nouveau Siècle. Le symbolisme épique du nombre 12 et le titre affiché dans les deux langues montrent l’envergure extraordinaire de cette entreprise, qu’il avait commencée au milieu des années 70. Le professeur Hood désirait faire paraître un roman tous les deux ans, publiant un livre de nouvelles ou un essai entre-temps. Selon ses plans, il voulait que la publication de son dernier roman coïncide avec l’an 2000 et, malgré sa maladie, il a réalisé son projet: Near Water paraîtra ce mois-ci. Hugh Hood s’astreignait à une discipline stricte et particulière: il avait décidé d’écrire ses nouvelles entre le mois de septembre et Noël, alors qu’entre janvier et juin il composait ses romans; durant l’été, il lisait et se reposait.

Hugh Hood était également un professeur exceptionnel. Il comptait certainement parmi les auteurs les plus prolifiques jamais engagés comme professeurs par l’Université de Montréal. Grâce à ses lectures incessantes et à sa mémoire photographique, il pouvait donner des cours et diriger des thèses dans tous les siècles et dans les littératures aussi bien anglaise qu’américaine et canadienne. Il était de loin le professeur qui a dirigé le plus grand nombre de thèses au Département d’études anglaises. De plus, dans son engagement professoral exemplaire, il a influé sur la carrière d’un nombre incalculable d’étudiants.

Comme personne, Hugh Hood se distinguait par sa foi inébranlable, son sens aigu de la justice, son enthousiasme et sa curiosité et, paradoxalement, sa naïveté. La religion catholique faisait partie intégrante de sa vie privée et professionnelle. Pour lui, un comportement juste — qu’il ne dissociait guère du geste charitable — était une démarche tellement raisonnable qu’il lui était difficile de comprendre le mal qui pouvait exister autour de lui. Sa passion pour la vie se manifestait aussi dans des activités sportives variées, soit comme participant, comme spectateur ou encore comme historien (ici nous rappelons une biographie de Jean Béliveau dont il fut l’auteur). Sa curiosité inassouvissable était évidente. Lorsqu’il ne discutait pas de littérature, d’écriture ou d’enseignement, on l’entendait émettre avec énergie et autorité ses opinions sur de nombreux sujets, que ce soit la musique, l’urbanisme, l’histoire, la philosophie, l’astronomie, la géologie, le cinéma, etc.

La présence de Hugh Hood manquera à ses proches et à ses amis, mais il est consolant de garder le souvenir d’une personne entière, d’une personne généreuse, authentique, honnête, dévouée, en somme d’une «belle personne» dans tous les sens du mot et à qui on voudrait dire: «Au revoir, Hugh.»

Patrick Mahony