Volume 35 numéro 4
18 septembre
2000


 


La cryochirurgie contre le cancer des poumons
Une technique prometteuse implantée au CHUM par la Dre Rita Jean-François.

La cryochirurgie permet d’aller plus loin dans les bronches sans risquer de perforer les parois, explique la Dre Rita Jean-François.

Le traitement habituel pour le cancer du poumon consiste en l’ablation des lobes atteints. Ce type de chirurgie pourrait bientôt être détrôné par une nouvelle technique d’intervention, la cryochirurgie.

Peu coûteuse, peu invasive et, dans la plupart des cas, ne nécessitant pas d’hospitalisation, la cryochirurgie consiste à introduire, par la trachée, une sonde dans la bronche affectée afin de détruire la tumeur à l’aide de protoxyde d’azote atteignant une température de –30 °Celsius.

Cette technique prometteuse a été introduite ici par la Dre Rita Jean-François, adjointe de clinique à la Faculté de médecine et pneumologue au CHUM–Notre-Dame. «La technique n’est pas vraiment nouvelle puisqu’elle a été mise au point au début des années 1970, précise-t-elle. Toutefois, avec l’arrivée des instruments au laser, elle a été abandonnée en Amérique du Nord alors que son développement s’est poursuivi en Europe.»

La chirurgie par le froid est utilisée dans le traitement d’autres types de cancer, notamment celui du sein, mais à sa connaissance la Dre Jean-François serait la seule au Canada à recourir à cette technique pour le cancer des poumons.


Sans danger

L’utilisation du laser pour détruire des tumeurs obstruant les bronches est limitée aux régions rectilignes des plus grosses bronches à cause du danger de perforation des parois et même de celles de l’aorte. La cryochirurgie ne présente pas de tels risques parce que les tissus fibreux et les cartilages qui entourent les bronches ne sont pas détruits par le froid; le chirurgien peut donc travailler de façon plus sécuritaire, aller beaucoup plus près des parois et beaucoup plus loin dans les ramifications bronchiques. Selon la Dre Jean-François, il n’y aurait pas de contre-indications.

La cryochirurgie peut également compléter les interventions effectuées à l’aide de l’électrocautère ou bistouri électrique qui est lui aussi plus sécuritaire que le laser, ou encore servir à nettoyer de mauvaises cicatrisations de chirurgies traditionnelles. Elle peut permettre de fragiliser les tumeurs avant des traitements de chimiothérapie et, si le cancer était découvert assez tôt, elle pourrait remplacer la chimiothérapie.

Pour l’instant, il ne s’agit pas d’une technique à laquelle les pneumologues recourent systématiquement. «On l’utilise surtout en soins palliatifs ou lorsque le traitement chirurgical traditionnel n’est pas possible, précise-t-elle. Il reste beaucoup de recherche à faire pour raffiner la technique, élaborer des méthodes de dépistage précoce et disposer de données comparatives qui permettraient d’en étendre l’utilisation. Mais le potentiel de la technique est très grand et nous donne de l’espoir.»

Pour pousser les recherches dans ce secteur, Rita Jean-François souhaite établir, au CHUM–Notre-Dame, un centre de bronchoscopie d’intervention, où tout un éventail de techniques serait disponible.

Daniel Baril