Comment
reconnaître un futur champion olympique?
Mario
Leone étudie le profil dadolescents qui sont des athlètes
délite.
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Un
simple test dADN permettra sans doute bientôt
de reconnaître les champions dès le berceau.
Mais dici là, la recherche de Mario Leone pourrait
être utile aux entraîneurs. |
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À 13 ans,
le tennisman québécois Sébastien Lareau démontrait
déjà des aptitudes exceptionnelles pour le sport. Mais
ce nest pas toujours évident de désigner dès
ladolescence les futurs athlètes délite.
Une étude menée par Mario Leone, étudiant au
doctorat en kinésiologie, pourrait permettre aux entraîneurs
de mieux repérer les individus taillés pour accéder
au podium.
«Chaque athlète présente des caractéristiques
morphologiques et biologiques qui le prédisposent à
la performance. Ma recherche a tenté de déterminer ces
facteurs afin de tracer un profil des adolescents athlètes.»
Les données recueillies entre 1989 et 1994 auprès de
213 garçons et filles âgés de 12 à 17 ans
et faisant partie des 15 meilleurs athlètes juniors au Québec
dans leur sport respectif mettent en évidence les différences
entre les adolescents sportifs et le reste de la population du même
âge. Selon Mario Leone, les athlètes de haut calibre
forment un groupe plus homogène même sils proviennent
de sept disciplines sportives: natation, judo, tennis, patinage artistique,
cyclisme, gymnastique et hockey sur glace. Ils présentent aussi
un avantage pour ce qui est du ratio poids-taille, des plis adipeux,
de la force, de lendurance et de la flexibilité.
La taille fait exception: les athlètes âgés de
12 à 14 ans sont souvent plus grands que la moyenne, mais cet
avantage nest que temporaire. Lentraînement intensif
ne fait pas grandir, signale Mario Leone. Des effets ont cependant
été constatés sur les structures osseuse, musculaire
et adipeuse. Elles semblent se développer plus rapidement chez
les jeunes qui sentraînent.
Le chercheur dorigine italienne a beaucoup étudié
les effets de lactivité sportive
intensive sur la croissance. Cette pratique a-t-elle une influence
notable sur certaines variables morphologiques et biomotrices comme
la puissance aérobie maximale, lamplitude musculo-articulaire,
la force et lendurance? «Ces changements sont la résultante
dadaptations physiques qui favorisent la performance, affirme-t-il.
Mais il est difficile de dire si les adolescents engagés dans
un programme dentraînement rigoureux sont, à la
base, plus grands, plus lourds, plus musclés et plus forts.
Les entraîneurs ont tendance, consciemment ou non, à
sélectionner les individus en fonction de ces critères.»
Même là, tout nest pas gagné davance.
On ne peut pas expliquer la performance en faisant abstraction de
limportance du contrôle de lintensité des
stimuli dentraînement, selon M. Leone. Afin dorienter
certains aspects de lentraînement des athlètes,
il a consacré une partie de sa recherche aux périodes
les plus propices au développement de la performance.
Quest-ce que les phases sensibles?
«Les phases sensibles, au cours du développement dun
jeune, sont les moments où lorganisme est particulièrement
sensible aux stimuli dentraînement, explique le chercheur.
De façon pratique, lévaluation des phases sensibles
signifie une plus grande efficacité dans lélaboration
et le suivi des programmes dentraînement.»
Lapplication de ce concept dabord analysé
au cours détudes portant sur les périodes les
plus propices à lapprentissage de la marche, de la parole
et de lécriture dans un contexte de performance
sportive est cependant critiquée par certains experts.
«La notion de phases sensibles est généralement
admise dans la communauté scientifique, mais tous ne sentendent
pas sur le mode dévaluation. Les rares méthodes
proposées ne semblent pas entièrement satisfaisantes
pour déterminer, quantifier et qualifier les phases sensibles
dont la source de stimulation principale est lentraînement.»
La récente étude de Mario Leone comble cette lacune.
Le chercheur propose un modèle qui permet de mesurer les variations
dintensité des phases sensibles et de situer ces périodes
dans le temps. «La méthode permet sur une base individuelle
de déterminer avec précision la présence réelle
de phases sensibles et les meilleurs moments pour entreprendre le
développement des qualités physiologiques. Lanalyse
des résultats démontre quune des périodes
déterminantes se situe surtout entre 12,5 ans et 15 ans. Les
sujets soumis à un entraînement intensif obtiennent de
meilleurs résultats.»
À 18 ans, il est en général trop tard
du
moins si lon veut devenir un athlète délite.
Avant lâge de 12 ans, il est cependant déconseillé
de soulever des charges lourdes de façon répétitive,
car la fracture dun os à la plaque de croissance peut
causer un arrêt du développement du membre blessé,
prévient le chercheur, qui est également entraîneur.
«Il ny a pas de moments contre-indiqués pour lentraînement.
Le programme dexercices dun athlète âgé
de 6 à 12 ans doit cependant être principalement axé
sur lapprentissage des habiletés motrices. Il peut y
avoir des modifications selon lâge chronologique de lindividu,
car souvent les athlètes sont plus matures physiquement.»
La thèse, acceptée officiellement lhiver dernier
au Département de kinésiologie, met également
en relief plusieurs particularités physiques et biomotrices
qui distinguent les athlètes selon le sport pratiqué
et le niveau de performance. Par exemple, les gymnastes, comparativement
aux autres athlètes, sont souvent plus petits et possèdent
une plus faible quantité de tissus adipeux sous-cutanés,
note M. Leone.
«Leur imposante musculature des bras est probablement une conséquence
de la grande sollicitation en force exigée pour les exercices
aux agrès: cheval darçons, anneaux, barre fixe,
barres parallèles. Ce type de sollicitation est moins prépondérant
en cyclisme et en patinage artistique alors quil est de nature
très différente au tennis. Le diamètre osseux
du coude des joueurs de tennis masculins est dailleurs un puissant
facteur de discrimination.»
Il semble en effet possible de deviner la discipline sportive dun
athlète juste à analyser son gabarit. Cest du
moins lavis du chercheur, qui parvient à classer, avec
un taux de succès qui sélève à 86%,
les athlètes à partir de leur profil anthropométrique
(taille, poids, circonférence musculaire, etc.) et biomoteur.
«La présence de caractéristiques propres à
la discipline pratiquée, dit-il, se manifeste dès lâge
de 12 ou 13 ans chez les athlètes soumis à un entraînement
sétalant sur 10 ou 11 mois par année.»
Malgré les différences dun sport à lautre,
les jeunes athlètes délite font partie dune
catégorie dindividus qui diffèrent du reste de
la population du même âge sur les plans morphologique
et physiologique, ajoute Mario Leone. Selon lui, on ne peut pas prendre
nimporte quel jeune, lui donner une vingtaine dheures
dentraînement par semaine et espérer en faire un
champion olympique.
«On a beau dire, ça paraît simple, mais un athlète
doit avoir un environnement social favorable et des prédispositions
génétiques pour progresser à léchelle
internationale.»
Dominique
Nancy