FORUM - 5 JUIN 2000Jacques Bougie reçoit la médaille de l'Ordre du mériteLe président d'Alcan vante les vertus de l'éducation.
"Il faut que les gouvernements comprennent que nos universités ne sont pas superflues. Chez Alcan, nous ne recherchons pas que de bons chimistes et de bons ingénieurs. Nous avons surtout besoin de jeunes qui ont appris à apprendre." Jacques Bougie, président et chef de la direction d'Alcan, s'est exprimé ainsi le 11 mai dernier alors qu'il recevait la médaille de l'Ordre du mérite de l'Association des diplômés de l'Université de Montréal. M. Bougie, diplômé de la Faculté de droit en 1973 puis de l'École des Hautes Études Commerciales en 1980, a profité de la tribune qui lui était offerte, devant quelque 200 convives, pour affirmer sa foi dans l'enseignement supérieur. Les universités offrent une formation qui "permet de survivre dans un monde de plus en plus complexe", a-t-il dit. Aussi les gouvernements doivent-ils assurer convenablement leur financement. Prenant la parole après la remise de la médaille, le recteur Robert Lacroix a rappelé que l'Université de Montréal et ses deux écoles affiliées avaient été créées pour permettre aux francophones d'accéder aux études supérieures. La liste des lauréats de l'Ordre du mérite, de Pierre Dansereau à André Caillé, de Jean-Marc Léger à Robert Bourassa, de Pierre Péladeau à Antonio Lamer, démontre bien qu'elles y sont parvenues. Les francophones accèdent aux plus hauts postes de pouvoir. En outre, 38% des médecins, 53% des dentistes et près de 100% des vétérinaires actifs au Québec ont fait leurs études à l'Université de Montréal. Les diplômés de l'UdeM sont présents dans toutes les grandes entreprises, a continué M. Lacroix. On en a compté 1350 chez Hydro-Québec... On n'a pas fait le compte pour Alcan, mais il est clair que cette multinationale présente sur cinq continents emploie beaucoup d'anciens. En tout cas, Jacques Bougie a tenu à dire que ses filles étudient ou ont étudié sur le campus, l'une en relations industrielles et l'autre aux HEC. Un trou d'un coup Pour André Caillé, président et directeur général d'Hydro-Québec, qui a lui-même reçu la décoration en 1997, le lauréat de l'Ordre du mérite 1999 a de remarquables qualités d'administrateur. "L'industrie de l'aluminium devait changer, a dit M. Caillé. Il fallait préparer Alcan au contexte de la mondialisation, ce qui impliquait une bonne rationalisation. Jacques Bougie s'est bien acquitté de cette tâche." Un avis que partage Paul Tellier, président du Canadien National. Claude Fabien, doyen de la Faculté de droit, a déclaré que M. Bougie avait "un lourd passé juridique", faisant référence à ses études de droit dans les années 1970, puis à sa fonction de directeur de la Société québécoise d'information juridique de 1976 à 1979. D'autres, comme Michèle Thibaudeau de Guire, présidente et directrice générale de Centraide, ont souligné son humanisme et son souci de l'éducation. Mais ce qui a surtout amusé la salle, c'est le fait que M. Bougie a réalisé un trou d'un coup, au golf, sous les yeux de Jean Monty. Un miracle, semble-t-il, car M. Bougie ne s'est pas rendu célèbre grâce à ce sport. "Ton swing n'est peut-être pas très élégant, mais il est efficace", a résumé M. Caillé. Homme d'affaires et père de famille À cela, Jacques Bougie a répondu qu'il avait eu beaucoup de chance, tant en affaires qu'en amour, et il a tenu à remercier sa femme, Anne-Marie. Mais le jeune patron (âgé de 53 ans, il est à la tête d'Alcan depuis sept ans) a admis que l'année 1999 avait été "cruciale". L'entreprise a procédé à des acquisitions en Asie et a investi plus de trois milliards de dollars dans divers projets, en plus d'achever la rationalisation de ses effectifs, qui comptent 36 000 personnes. Mathieu-Robert Sauvé |