La boule de cristal du Bureau du recrutement
Un modèle statistique prédit les demandes
d'admission jusqu'en 2002.
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Dans l'ordre habituel, Francis Marin, Gilles
Carrier. Ils veulent suivre l'évolution de la clientèle
jusqu'en 2002. |
Les demandes d'admission en musique, histoire
de l'art, études cinématographiques, psychoéducation,
relations industrielles et études est-asiatiques connaîtront
des hausses significatives d'ici trois ans, alors que plusieurs
programmes d'études dont les programmes d'architecture,
d'urbanisme, le certificat en droit et d'autres verront ces demandes
diminuer.
C'est ce qu'on peut comprendre d'une étude
effectuée pour le compte du Bureau du recrutement par
la firme Score, spécialisée dans l'analyse des
fluctuations de clientèles dans les établissements
d'enseignement. Cette étude, qui sera remise le 25 novembre
prochain aux directeurs de département et aux doyens de
faculté, a pris en considération un certain nombre
de variables afin d'estimer les variations de clientèles.
Évidemment, le nombre de demandes d'admission n'est pas
un indicateur précis du nombre d'étudiants qui
seront autorisés à s'inscrire en 2002, mais cet
indicateur donne une bonne idée du comportement des futurs
candidats.
"Pour le recrutement, ce modèle
présente un intérêt multiple sur le plan
de la gestion et de l'intervention, commente Francis Marin, directeur
du Bureau du recrutement. Dans les cas où une baisse des
demandes d'admission est envisagée par exemple, on peut
entreprendre dès maintenant une campagne de promotion
très ciblée afin de contrer la diminution appréhendée.
Il s'agit d'un outil sans équivalent dans les autres universités
québécoises."
Plus de 80 programmes d'études ont
été regroupés à l'intérieur
d'une cinquantaine d'unités. La plupart ont donné
lieu à une projection détaillée, mais on
a dû renoncer à le faire pour une douzaine d'autres.
Les inscriptions au programme d'histoire, par exemple, sont en
dents de scie depuis 1992, de sorte qu'il est impossible d'en
déduire une tendance pour les années qui viennent.
Méthode sophistiquée
Gilles Carrier, qui a mis sur pied l'an dernier ce projet sans
précédent, s'est déclaré très
satisfait des résultats. Il faut dire que l'auteur de
l'étude et président de Score, Denis Savard, a
pu utiliser des bases de données à accès
limité pour compléter son portrait de la situation.
Dans ses logiciels, il a intégré des variables
complexes comme l'évolution démographique, le taux
de chômage et les "foyers de provenance" des
étudiants. Ce dernier élément, non le moindre,
est le fruit d'une analyse exhaustive des cohortes passées,
dont on connaît le lieu de résidence, l'âge
moyen, le collège ou l'université d'origine, etc.
Évidemment, il ne s'agit pas d'une
science exacte. Le taux de chômage, calculé d'après
les projections de la Confédération des caisses
populaires et d'économie Desjardins et de Statistique
Canada, est bel et bien passé de 12,8% en 1992 à
10,6% en 1998, mais on ne peut pas être certain qu'il continuera
de décroître jusqu'à 8,9% en 2002, comme
l'indique l'étude. On ne peut que l'estimer valable.
Mais M. Savard est convaincu de l'efficacité
de ses méthodes quantitatives de prévision, qui
ont pris en considération quelque 350 000 demandes d'admission
et intégré près de 2000 séries de
données traitant de recrutement. Il signale au passage
que les mêmes méthodes sont utilisées les
soirs d'élections quand l'animateur annonce, après
tout juste quelques minutes: "Si la tendance se maintient,
le prochain gouvernement sera formé de..."
Il faut dire que la variation du taux de chômage
a un impact direct sur l'évolution des clientèles
universitaires. "Cette amélioration pressentie de
la situation du marché du travail devrait normalement
créer une pression à la baisse des demandes d'admission
dans la plupart des domaines d'études", mentionne
l'auteur.
Arts et lettres en hausse
Pour compléter l'analyse purement mathématique,
un groupe d'experts en orientation a été réuni
pour discuter du sujet. On lui a demandé d'examiner le
comportement des candidats futurs. Leur conclusion comporte une
surprise de taille: les sciences pures et appliquées connaîtront
une baisse générale, alors que les lettres et les
arts seront en hausse.
"Quand le chômage augmente, on
assiste habituellement à une baisse des demandes d'admission
dans les secteurs comme les lettres et les arts pour des disciplines
plus 'utilitaires', signale M. Savard. L'inverse est aussi vrai.
Le domaine des arts et lettres est en hausse quand le chômage
diminue."
Cette étude de prévision a été
rendue possible grâce à un budget spécial
du Fonds de relance.
Mathieu-Robert Sauvé
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