[page U de M][Accueil Forum][Calendrier][Etudiants]


Fettuccinis et vélo

Une recherche confirme que les pâtes, c'est bon pour les sportifs.

François Péronnet a acquis une expertise mondiale en physiologie de l'exercice. Cela lui a permis de gagner la confiance des producteurs français de pâtes alimentaires qui ont financé ses travaux. Pas plus de deux ou trois autres laboratoires dans le monde utilisent les pâtes au carbone 13.

Les pâtes alimentaires font peu engraisser et sont vite brûlées grâce à l'exercice. Voilà du moins la conclusion d'une étude de François Péronnet, directeur du Département de kinésiologie, menée auprès de trois groupes d'hommes et qui vient d'être rendue publique.

Après avoir mangé une bonne quantité de nouilles, les sujets du premier groupe devaient s'asseoir confortablement sur des chaises; les deuxièmes ont effectué des exercices de faible intensité et les troisièmes ont pédalé à bonne vitesse pendant 90 minutes sur des vélos stationnaires.

"Il y a eu un léger gain de poids chez les gens qui n'ont pas fait d'exercice, signale M. Péronnet. On peut donc confirmer que les pâtes font engraisser, bien que le gain soit très faible. Cependant, tous les autres sujets ont éliminé sans peine les lipides. Cela démontre que même l'exercice de faible intensité permet d'éliminer les graisses provenant des pâtes alimentaires."

C'est dans ces serres à atmosphère contrôlée, à Catarache, en Provence, qu'a été cultivé le blé dur enrichi de carbone 13 qui a servi à confectionner les pâtes du professeur Péronnet. Un plat de ces nouilles vaut quelques milliers de dollars.

Les chercheurs ont pu déboulonner au passage un autre mythe voulant que l'exercice de faible intensité sur une période étendue soit plus "rentable" pour la personne qui veut perdre du poids. Selon M. Péronnet, l'exercice plus intensif et plus bref sollicite l'organisme non seulement pendant l'effort mais aussi pendant les heures qui suivent la période d'entraînement. Résultat: le sujet tout feu tout flamme élimine autant de graisses que son voisin, plus économe.

Cette idée de "rentabilité" de l'exercice modéré est à ce point entrée dans les moeurs que le message "Fat burn" apparaît sur l'écran des vélos stationnaires (y compris dans la salle de musculation du CEPSUM) quand la personne pédale lentement. De plus, sur un graphique conçu en fonction du poids et de l'âge de l'utilisateur, il est indiqué "Niveau d'utilisation maximale des graisses comme sources d'énergie".

D'après les conclusions de l'étude de M. Péronnet, ces affirmations sont inexactes. "Ce qui se passe après l'exercice semble être aussi important que pendant", résume le chercheur.

Une recherche attendue
"Ça peut paraître surprenant, car les humains mangent de l'amidon depuis toujours, mais on n'avait jamais documenté sérieusement la question du métabolisme des pâtes dans l'organisme: quel est le temps d'ingestion, comment le glycogène est synthétisé, etc.", dit le professeur, qui entame actuellement la même recherche auprès des femmes.

La méthodologie de cette recherche s'appuie sur un menu très particulier, constitué de pâtes confectionnées à partir de blé dur enrichi de carbone 13, un isotope stable qui ne peut s'obtenir que dans des conditions de laboratoire. Les sujets de la recherche ingèrent une généreuse portion de ces pâtes high tech (400 grammes avant cuisson) avant de subir une quantité de tests au Laboratoire de physiologie de l'exercice. On a même recours à la spectrométrie de masse pour retracer l'isotope. Cet aspect de l'étude est assuré par le Département de géologie de l'UQAM. Mais il faut préciser que le carbone 13 n'est pas un élément radioactif comme le carbone 14. Il est aussi inoffensif que le carbone 12, abondant dans la nature. Il est seulement plus rare.

"L'amidon des pâtes est métabolisé de trois façons, explique M. Péronnet. Il est soit rejeté par l'expiration (on dit alors qu'il est 'oxydé'), soit accumulé sous forme de graisses ou encore il est assimilé par les muscles sous forme de glycogène. Le fait d'utiliser des pâtes enrichies de carbone 13 permet d'observer avec précision chacune de ces trois possibilités."

Ce que la plupart des gens ont en horreur, c'est ce que les spécialistes appellent la "lipogenèse de novo". Les animaux comme les marmottes, les écureuils et les castors en ont pourtant un besoin vital. Il s'agit des graisses qui s'accumulent sous la peau pour créer un isolant contre le froid. "Les êtres humains en produisent peu, souligne le chercheur. Un plat de 400 grammes de pâtes, par exemple, ne produira que 4,6 grammes de lipogène de novo chez un homme de taille moyenne en santé. Et cette quantité disparaît rapidement aussitôt qu'il fait un peu d'exercice."

L'étude chez les femmes
La deuxième étape de cette recherche financée par l'Association française des producteurs de pâtes est donc en cours et le chercheur a besoin de sujets pour compléter son échantillonnage. "En raison des variations hormonales, on étudie peu les femmes en physiologie de l'exercice, déplore M. Péronnet. C'est vrai que les protocoles sont un peu plus complexes, mais nous n'avons pas voulu nous limiter aux hommes."

Les sujets sont répartis en quatre groupes. On étudie le métabolisme des pâtes avant l'ovulation, après l'ovulation, chez les femmes préménopausées et ménopausées. C'est dans ce dernier groupe de femmes ménopausées (qui ne suivent aucune hormonothérapie) que le chercheur a besoin de volontaires pour compléter son échantillon. La compensation est de 500$ (tél.: 514-343-6166). On demande aux sujets de se prêter à deux évaluations d'une journée complète, de 7 h à 22 h. Le comité d'éthique de l'Université de Montréal a approuvé le protocole.

Est-il besoin de l'ajouter? Les repas sont fournis!

Mathieu-Robert Sauvé


[page U de M][Accueil Forum][Calendrier][Etudiants]