FORUM - 7 FÉVRIER 2000Léger et philosophiqueLe Festival TUM présente une semaine intensive de théâtre du 14 au 20 février.
Ce festival du Théâtre de l'Université de Montréal (TUM) présente quatre programmes avec, comme point culminant, L'oiseau bleu, une féerie philosophique de l'auteur belge Maurice Maeterlinck. Les trois premiers jours, le TUM reprend le théâtre-midi, lancé l'an dernier. En lecture ou en chanson, c'est une pause hors de l'ordinaire. Ce sera aussi l'occasion pour le secteur Théâtre de changer de tête puisque Michel Forgues cède la place qu'il occupait depuis deux ans et demi à Luc Arsenault, qui prend les rênes du TUM en milieu de saison. Pour marquer sa rentrée, le nouveau directeur artistique s'est inclus dans le premier théâtre-midi, consacré à la comédie musicale. En préambule à des extraits du spectacle hommage au duo Brecht-Weill prévu pour la fin mars, Luc Arsenault interprétera des succès de Broadway. Ces morceaux seront, pour ce passionné de théâtre chanté, une façon de se faire connaître et de donner un avant-goût du programme 2000-2001, qui comprendra un spectacle réunissant comédiens, danseurs et musiciens. Pour sa part, Michel Forgues, qui veut se consacrer à l'écriture, fera en quelque sorte ses adieux au cours du troisième midi, avec la lecture de Lettre de granit, récemment publiée aux Éditions Trait d'union. Quant au deuxième théâtre-midi, sous forme de lecture aussi, il sera consacré au Bobok, de Dostoïevski, un texte plein d'humour qui annonce les couleurs que Luc Arsenault tentera de donner à cet événement l'année prochaine. "J'imagine des textes plus légers, plus faciles à digérer", clame celui qui ne voit pas comment il pourrait présenter du Camus le midi. "Bobok, ça va, c'est drôle." L'oiseau bleu "C'est un voyage initiatique, une confrontation avec les grandes questions du sens de la vie, de la mort et du véritable bonheur et avec les regards qu'on pose sur les choses", résume Luc St Denis, metteur en scène. Dans ses notes, Maeterlinck, Prix Nobel en 1911, propose d'"écarter l'être vivant de la scène". Une idée à laquelle Luc St Denis adhère. En recevant la commande de L'oiseau bleu, il a immédiatement pensé à la marionnette, lui qui est un adepte de cette forme d'expression depuis ses années passées au sein du Théâtre sans fil (Le seigneur des anneaux). Pour Luc St Denis, c'est la liberté sans limites qui fait la force de la marionnette. "On accepte qu'elle dise des choses parce qu'elle n'est pas humaine. Le public n'acceptera jamais de voir un enfant se faire frapper sur scène, mais ce sera tout le contraire avec des marionnettes", soutient-il en racontant une anecdote vécue au Japon. "Les gens riaient en voyant la marionnette-enfant se faire agresser. Et leur première réaction après le spectacle a été d'aller frapper à leur tour l'objet." Pour la conception visuelle de L'oiseau bleu, Luc St Denis a fait appel à une vieille connaissance. Denise Leprohon a commencé sa carrière de marionnettiste à La Roulotte de Paul Buissonneau et, pendant près de 20 ans, elle a conçu, et surtout manipulé, les grands personnages qui ont fait la renommée du Théâtre sans fil. Les marionnettes Depuis décembre, à raison de quatre heures par jour, une chef d'atelier dirige l'assemblage des marionnettes: des animaux, des arbres, des enfants bleus, le Temps, la Lumière, l'Eau, le Pain, le Feu, des Bonheurs, tout prend une forme humaine, répondant bien au langage symboliste de Maeterlinck. En proposant un parcours dans le monde des sens, des formes et de l'esprit, en partant à la recherche de l'âme des êtres et des choses, Maeterlinck nous convie à une quête de connaissances. Mais, comme collectivité, avons-nous les possibilités de connaître? demande Luc St Denis. Malgré le progrès, on continue à s'entre-déchirer. "Comprenons-nous ce que nous faisons?" Contrairement à l'auteur belge qui clôt la quête dès que la lumière est faite, dès que l'oiseau est retrouvé, Luc St Denis croit qu'il y a toujours quelque chose à apprendre. "Il n'y a pas une lumière mais des lumières, il n'y a pas une quête mais des quêtes", dit-il. La fin de "son" Oiseau bleu laisse le chemin ouvert, car pour lui "bien plus que le résultat, c'est le chemin parcouru qui importe". Au TUM, c'est un peu ce que Michel Forgues laisse en héritage. À l'ouverture à cette quarantième saison de théâtre à l'Université de Montréal, il déclarait espérer qu'elle ne soit pas "une mise en quarantaine" mais une mise en lumière "de ce qui a été, de ce qui est et surtout de ce qui sera". Aux Luc Arseneault et Luc St Denis de poursuivre dans cette voie. Jérôme Delgado
Le nouveau visage du TUMCe n'est jamais facile de prendre à mi-parcours ce que d'autres ont entamé. Luc Arsenault a tout de même accepté de succéder à Michel Forgues en janvier comme responsable du secteur Théâtre au Service des activités culturelles. Par le fait même, il devient directeur artistique du Théâtre de l'Université de Montréal (TUM). Il compte profiter de cette deuxième moitié d'année pour préparer la 41e saison du TUM, sa première à lui. Non seulement le théâtre-midi lui permettra de briser la glace sur la scène du Centre d'essai, mais déjà il a voulu refaçonné le contenu des cours. Depuis cet hiver, les ateliers d'interprétation abordent chacun un aspect du métier, l'un se concentrant sur le jeu en groupe, l'autre sur le travail individuel du personnage. Diplômé en interprétation du collège Lionel-Groulx (1984), Luc Arsenault est présent dans le milieu professionnel depuis presque 20 ans. Il fait autant dans le jeu que dans la mise en scène. Si, dans les années 1980, il a été très engagé dans la troupe des Nouveaux Compagnons, jouant Molière et Cervantès, et montant Lepage, dans la dernière décennie, il s'est orienté vers l'enseignement. Animateur des ateliers de théâtre au cégep de Sainte-Thérèse, il souhaite maintenant mettre à profit son expérience acquise avec des non-professionnels. "Tout ce qui est enseignement me plaît et travailler avec des jeunes est ce que je préfère", avoue-t-il, tout en sachant que "les jeunes n'ont pas beaucoup de possibilités de s'exprimer". Luc Arsenault veut donc redonner la scène aux jeunes qui l'ont délaissée parce que le théâtre est exigeant. "Ils ne sont plus intéressés à travailler. C'est l'ère de la facilité, tout est tellement simple", avance-t-il. Heureusement, la hausse des inscriptions au sein de la troupe universitaire lui laisse croire qu'il y a une effervescence autour du TUM. Et il a donc bien hâte de pouvoir lancer son propre programme en septembre. J.D. |