FORUM - 7 FÉVRIER 2000François Legault courtise la jeune générationAprès une conférence publique, il rencontre des militants à huis clos.
"On n'a pas le droit de laisser moins à nos enfants que ce qu'on a reçu de nos parents." Ainsi le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse, François Legault, a-t-il achevé son discours devant quelque 350 étudiants de l'Université de Montréal venus l'entendre le 27 janvier dernier. Applaudi brièvement par l'assistance qui n'a pas eu droit à un échange avec le visiteur de marque, le ministre a répondu aux questions des journalistes présents avant de disparaître dans une salle où l'attendaient une cinquantaine de délégués d'associations étudiantes. Dans son discours où il a porté le chapeau du baby-boomer repentant, M. Legault s'est montré solidaire des jeunes, qu'il convie au Sommet du Québec et de la jeunesse, qui se tiendra prochainement. L'occasion leur sera offerte de parler de leurs espoirs et de leurs appréhensions. La publicité le dit: "Viens cracher le morceau." Homme d'affaires prospère qui s'est lancé tardivement en politique, François Legault a rappelé qu'il empruntait autrefois le corridor séparant l'École des Hautes Études Commerciales du pavillon des sciences sociales pour venir entendre des conférenciers à l'heure du dîner. "Je garde d'excellents souvenirs de mon passage à l'université parce qu'à cette époque, me semble-t-il, les horizons étaient ouverts à un jeune de 20 ans. Il suffisait de se fixer des objectifs, d'avoir de la volonté... et le reste se faisait presque tout seul. La jeunesse d'aujourd'hui a devant elle des défis beaucoup plus gros, beaucoup plus exigeants qu'à l'époque où j'avais 20 ans. Elle hérite de problèmes qui donnent le vertige." Pour résumer ces problèmes vertigineux, M. Legault a dit que la génération montante devait porter le fardeau de la "dette écrasante", d'une "société vieillissante" et d'un "monde du travail transformé". Il a cité au passage Jacques Grand-Maison et Fernand Dumont. Ministre de la Jeunesse Le vieillissement de la société ne saurait pourtant évacuer le problème de l'emploi chez les jeunes. "Aujourd'hui, 1% de l'effectif de la fonction publique a moins de 30 ans." La dette publique, autre sujet de discorde intergénérationnelle, suscite un élan de compassion chez le ministre. "Chaque année, on paie, seulement pour l'intérêt de la dette, à peu près les deux tiers du budget en éducation, soit six milliards de dollars. Imaginez une seconde ce que cela représente. Tous ces salaires de professeurs, tous ces équipements, tous ces services aux étudiants qu'on pourrait s'offrir avec une telle somme! Chaque année, ce sont six milliards de dollars qui partent en fumée parce que, dans le passé, on n'était pas capable de penser plus loin que le bout de son nez." Parmi ses révélations les plus inattendues, M. Legault a vigoureusement récusé l'idée (à la mode chez les politiciens provinciaux) de baisser les impôts des particuliers. "Allons-nous consacrer toutes nos marges de manoeuvre actuelles en baisses d'impôts à des baby-boomers qui, plus que toutes les autres générations, ont bénéficié de la prospérité et de la croissance de l'État québécois?" a demandé le ministre. S'il a repris à son compte plusieurs credo de militants jeunesse, François Legault s'est défendu d'agir par simple opportunisme. "Si j'ai décidé de faire de la politique, c'est pour rendre notre société équitable, pas pour laisser les écarts de richesse se creuser entre les générations", a-t-il précisé. Une rencontre appréciée Patrick Lebel, secrétaire général de la Fédération, qualifie la rencontre du ministre avec les élus étudiants de "très intéressante". "Nous avons notamment obtenu de M. Legault l'assurance que les droits de scolarité ne seraient pas haussés d'ici la fin de son mandat. C'est important, car on sait que plusieurs personnes, tant dans le milieu des affaires que parmi les recteurs, sont en faveur de l'augmentation des droits." Par ailleurs, la FAECUM sera présente au Sommet du Québec et de la jeunesse, mais comme plusieurs groupes de jeunes, elle ne se fait pas trop d'illusions sur les retombées de cette rencontre. "Nous jugerons son succès sur les résultats concrets", a dit M. Lebel. Mathieu-Robert Sauvé |